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La guerre à l'époque d'Arthur

MessagePosté: Ven 14 Jan, 2005 14:04
de Agraes
Vu que le sujet fait son grand retour, je lance un autre fil sur les techniques guerrières en usage à l'époque d'Arthur, dans les territoires concernés.
Le sujet a déjà été abordé dans d'autres posts mais je pense qu'il n'est pas négligeable de lui consacrer le sien propre.

Comme point de départ le passage correspondant de mon article :roll:

4) La Guerre

Selon les uns, Arthur serait un véritable roi, pas au sens médiéval du terme mais le seigneur d’un de ces nombreux petits royaumes qui morcellent l’île de Bretagne. Selon d’autres ce serait un chef de guerre au service des différents rois 'celtes' de l’île. Quoi qu’il en soit il fut sans doute un grand guerrier, alors il est sans doute nécessaire d’examiner les informations que nous avons de la guerre des Ages Sombres.

L’arme principale du guerrier est la lance, du fait de son coût modique, associé à un bouclier souvent rond et fait de bois cerclé de métal, même si le matériau et la forme peuvent être très variables. Il existe de nombreux types de lances, certaines courtes d’autres plus longues et lourdes. On suppose que durant un certain temps les armes et tactiques du Bas-Empire romain furent conservées. Mais la reine des batailles demeure l’épée. Les Bretons ont surement conservé l’usage de la spatha romaine, largement répandu dans les reliquats de l'Empire à l'époque, une arme nettement plus longue que le glaive du haut-empire, à l'origine des épées médiévales. On devait également utiliser divers styles de coutelas et de hache, armes répandues chez les envahisseurs germaniques.

Quant aux armes de jets, on devait utiliser des arcs, des frondes ainsi que des javelines.

Du côté des armures, on estime souvent que le guerrier de cette époque allait sans doute sans protection au combat (excepté son bouclier bien sûr). Les cottes de mailles ou d’écailles étaient probablement réservées aux plus riches des guerriers, de même que les casques en métal. Il est cependant imaginable que les fantassins utilisaient parfois des protections de cuir pour se prémunir des blessures, armures qui ne nous sont malheureusement pas parvenues.

On impute souvent les victoires supposées d’Arthur à son usage intensif de la cavalerie, or à cette époque le gros des troupes étaient composé d’infanterie. Un bon usage de la cavalerie, arme très coûteuse, a sans doute permis à certains chefs de guerre de remporter des victoires décisives. On peut imaginer une aristocratie guerrière bardée de mailles et de cuir qui servira de modèle à la chevalerie médiévale, Les Bretons restèrent par ailleurs célèbres pour leur usage de la cavalerie au cours de leur conflit contre les Francs sur le continent. A noter que le surnom d’Uther et d’Arthur était "Pendragon", ce qui signifie littéralement "tête de dragon" mais que l’on peut identifier à "chef des cavaliers", grade correspondant au Magister Equitum romain selon JC Even qui en a fournit la traduction, le dragon était l’enseigne utilisée par les cavaliers bretons au combat : un manche à air en forme de serpent faisant un vacarme terrible, popularisé par les auxiliaires sarmates qui étaient chargés de la garde du mur d’Hadrien du temps de l’Empire. De même les saints mattant des "dragons" ne devaient pas en réalité dompter des reptiles mais des chefs de clan un peu trop belliqueux. D’ailleurs le terme "dragon" est resté en usage pour qualifier certaines unités de cavalerie.

La cavalerie a donc pu jouer un rôle prépondérant à une époque où la tactique la plus utilisée demeurait celle dite du "mur de boucliers" : des affrontements d’armées sans doute réduites à quelques centaines d’hommes dans des engagements frontaux.


Donc rôle de la cavalerie, ce qui induit plusieurs questions : taille des chevaux, techniques (charges frontales, harcélement comme le pratiquaient si bien les Bretons de Nominoé, etc...), armement...

MessagePosté: Ven 14 Jan, 2005 14:24
de Gwalchafed
Je connais très peu les armes des celtes, m'intéressant plutôt à celle des barbares...par contre je peux te dire ceci : les cavaliers romains possédaient des mors non articulés, et n'avaient certainement pas d'étrier...
Il est possible que des chevaux de guerre aient été dressés, mais les écoles concernant hongres/juments et étalons s'affrontent toujours. Ceux des chevaliers qui plus tard utilisaient des lances de tournoi étaient presque certainement des Hongres/jument, de par la stabilité nécessaire à l'utilisation de telles armes...je te rejoins sur le chat...

MessagePosté: Ven 14 Jan, 2005 21:26
de lopi
Il est possible que des chevaux de guerre aient été dressés

Le premier "manuel" de "dressage" des chevaux est de Xénophon.
Si seuleument ceux qui se dressent sur leurs chevaux, aujourd'hui, pouvait le lire.
On était loin des enseignements de La Guérinière, continuateur de quelques écuyers italiens, eux-mêmes continuateurs de quelques écuyers espagnols, mais il y avait déjà une science de l'équitation.

MessagePosté: Ven 28 Jan, 2005 11:35
de Gwalchafed
Une petite précision sur l'origine d'une possible cavalerie lourde en Bretagne : la Notitia Dignitatum renseigne un cuneus de Sarmates à Ribchester. Pour eux on peut préciser :
1) Ils montaient sans étriers
2) Ils portaient des lances de 4 à 5 m à deux mains
3) Sur certaines représentations on les voit effectuer des DUELS
4) Ammien Marcellin prétend qu'ils montaient des hongres, pour ne pas qu'ils s'emballent en combat s'ils sont surpris et courent la gueuse à la moindre jument en chaleur (Livre XVII, 12)

De plus Richardot (et Végèce ) soulignent la minimisation de l'infanterie, et l'importance grandissante de la cavalerie dans les derniers siècles de l'EMpire Romain...
Si Arthur commandait une armée brito-romaine, sans doute y avait-il une grande place pour la cavalerie.... :lol:

MessagePosté: Ven 28 Jan, 2005 21:33
de Agraes
En fait je m'interroge beaucoup sur la possibilité de voir des Britto-romains utilisant déjà les techniques de Nominoé, à savoir petits chevaux rapides et javelots, particulièrement efficaces contre la lourde infantrie franque (on en a déjà parlé ailleurs).

Concernant une cavalerie de charge (comme celle des Sarmates justement), on peut se demander si l'on chargeait plutôt à l'épée ou à la lance, et s'interroger sur le gabarit des chevaux.

MessagePosté: Sam 29 Jan, 2005 18:22
de Gwalchafed
Pour les sarmates, j'ai pas mal de données je te fais ça demain... :lol:

MessagePosté: Dim 30 Jan, 2005 12:59
de Gwalchafed
Salut,

Les Sarmates chargent à la lance, la spatha au côté :
Image

Les avis (même contemporains) sont partagés sur la cavalerie ultra-lourde. Ce serait en tout cas un fabuleux outil d'intimidation. En 471 Ecdicvius démontre leur efficacité devant Clermont-Ferrand, où avec 10 à 18 cavaliers en armure, il désorganise des "milliers" de fantassins Wisigoths, puis les termine par des "attaques brusquées". C'est en général la description qu'on a de ce genre de charge. Nazaire en 321 : "Leur tactique est la suivante : quand ils ont enfoncé la ligne adverse, ils poursuivent l'attaque et, invulnérables aux coups, ils brisent sans s'arrêter tout ce qui leur est opposé"
A l'inverse, Végèce souligne les points faibles : mauvaise visibilité, impossibilité de se déplacer ou de faire quoi que ce soit d'efficace une fois au sol.
En tout cas la cavalerie ultra lourde ne peut opérer seule, ce qui confirme les témoignages discordants que l'on peut avoir sur les Alains : "L'Alain rapide fait du butin".
Lebedynsky signale qu'à partir du IVème siècle la Cuirasse d'écaille et la cotte de mailles sont moins portées, même abandonnées par l'armée du Bosphore, même si on a des témoignages plus tardifs de charges de cataphractaires. Dans l'infanterie, des peuves d'une mixité des armes se montre en tout cas : en 1993, Pilet fait état d'une tombe de garde côte romain du Vème siècle contenant hache dyssymétrique à dos convexe, couteau et arc, témoin de l'adaptation romaine à la guérilla barbare.
Qu'elle se soit adaptée ou non, la cavalerie lourde fait la preuve de son efficacité aux champs catalauniques : la cavalerie légère d'Attila est "
prise de vitesse" par les cavaliers lourds d'Aétius et Thorismond. Il faut sans doute supposer ici qu'on a pas affaire à des cavaliers TROP lourds.

Références actuelles :
Lebedynsky, Armes et guerriers barbares au temps des grandes invasions, editions errance
Richardot, la fin de l'armée romaine, 2ème edition revue et augmentée, editions economica

et merci à Végèce, Ammien Marcellin, Jordanes, et les autres...

Batteur d'armure

MessagePosté: Sam 07 Mai, 2005 21:29
de ejds
Batteur d'armure
Un p’tit maillon hors sujet et hors époque.
(Bon, ben, on fait parfois ce qu’on peut avec ce que l’on a, hein ?!) : :roll:

Albert Jauret, prince de l'armure
07-05

http://actu.voila.fr/Depeche/ext--franc ... 3b6wr.html

Exercer en 2005 le métier de "batteur d'armure" d'époque renaissance ne relève pas, pour Albert Jauret, artisan à Alaise, de la folie douce mais d'une passion pour l'histoire et le travail du métal.

Ce franc-comtois d'adoption, originaire de Belgique, peut se targuer d'être le seul créateur professionnel d'armure en France, voire en Europe, au regard de ses méthodes de fabrication.

"Je me définis comme un « archéologue du geste »,explique Albert Jauret, 42 ans. La réalisation obtenue doit évidemment être parfaite et fidèle aux originaux mais ce qui compte avant tout, c'est de retrouver le geste des artisans d'autrefois en utilisant les mêmes outils et les mêmes matériaux qu'eux".

Exit donc le recours à la soudure ou à la presse hydraulique qui permettent à ses rares concurrents de sortir en deux mois une armure complète de leurs ateliers. Albert Jauret ne jure que par les innombrables marteaux qu'il transforme et adapte à la fabrication de chaque pièce.

"Une armure compte environ 120 éléments. Je donne près de 500 coups de marteau au cm2, soit un million de coups pour l'ensemble. Pour la réalisation d'un masque sophistiqué, je vais utiliser environ 50 marteaux différents, mais quel plaisir de voir la tôle prendre forme sous vos mains !".

Définitivement affranchi des notions d'époque et de temps, Albert Jauret passe entre huit et douze mois sur la réalisation d'une armure complète. Il en a achevé sept en quinze années d'une activité démarrée après avoir été restaurateur de meubles puis facteur de clavecin.

Pour ses clients - musées, collectionneurs, férus d'histoire- il fabrique également des éléments d'armure à l'unité : heaume, jambières, gantelets, toujours issus d'un travail de recherche historique très poussé qui occupe un tiers de son temps.

Car rien ne hérisse davantage ce passionné que les contre-vérités véhiculées par le cinéma et la littérature : "Quand je vois la plupart des films, je suis catastrophé. L'armure ne date pas du moyen-âge mais de la renaissance italienne. Elle apparaît au 14ème siècle, connaît son apogée au 15ème et disparaît au 16ème lorsque l'arme à feu portative devient totalement opérationnelle".

L'image d'Epinal d'un objet lourd et encombrant ne lui inspire pas d'avantage d'indulgence : "On n'a jamais eu besoin de grue pour monter les soldats en armure sur leur cheval ! Une armure est souple, maniable, permet de courir, de sauter, faire le poirier. Elle est légère, environ 25 kilos, et pèse d'autant moins que son poids se répartit sur l'ensemble du corps".

Dans l'exposition qu'il présente chaque été depuis trois ans au château de Cléron (Doubs), près de Besançon, Albert Jauret tente de tordre le cou aux idées reçues sur une époque où "on ne jetait pas plus d'huile bouillante sur les assaillants qu'on ne les jetait aux oubliettes, ou qu'on vivait dans la crasse".

Un paradis où il aurait souhaité vivre ? : "Je crois qu'un mois de vacances à cette période m'aurait largement suffi !"

© AFP.

e.


Documentation sur le sujet

MessagePosté: Mer 04 Mar, 2009 9:55
de arno
Bonjour,
Je me permet de signaler (mais sans doute est vous déjà au courant) la ré édition chez Osprey Publishing de deux volumes sur l’age arthurien, un généraliste, l’autre sur les fortifications.
C’est de l’histoire militaire, c’est un peu ancien, mais les planches d’illustration peuvent être utiles

Titre British Forts in the Age of Arthur
Collection Fortress
Référence 80
Adresse http://www.ospreypublishing.com/store/B ... 1846033629


Titre Arthur and the Anglo-Saxon Wars
Collection Men-at-Arms
Référence 154
Adresse http://www.ospreypublishing.com/store/A ... 850455489/

Cordialement

MessagePosté: Mer 04 Mar, 2009 13:55
de Agraes
En fait le premier est tout récent, je viens d'en terminer la lecture et j'en ai fait une petite critique disponible ici :
http://schnucks0.free.fr/forum/viewtopic.php?f=39&t=593

MessagePosté: Mer 04 Mar, 2009 14:13
de Agraes
Au passage, histoire de relier les sujets, ce dernier est un peu plus actualisé :
Particularismes guerriers chez les Bretons.

MessagePosté: Jeu 05 Mar, 2009 12:37
de arno
Pour continuer le sujet sur Osprey je trouve que le traitement de l'arrivée des anglo-saxons en Bretagne, a une petite odeur nationaliste, du genre "c'était juste/c'était leur terre" qui manque d'impartialité.

Vous qui avez lu les deux qu'en pensez vous ?
Ce sont mes racines trégoroises qui me poussent a défendre l'idée que les bretons étaient chez eux (autant que les anglos saxon le sont, rassurez vous, je ne lance pas une guerre sainte) ou est ce un sujet sensible pour un historien anglais ?

MessagePosté: Jeu 05 Mar, 2009 13:42
de Damianus
Si le surnom Pendragon renvoit au Draco des unités de cavaleries (et d'infanterie...) je ne crois pas du tout qu'on puisse l'attacher au Magister Equitum.

1) Le Draco n'a jamais signé la présence du Magister Equitum.

2) Aucune enseigne n'est associée au Magister Equitum.

3) Aucun Magister Equitum n'a résidé en Britannia pour frapper suffisamment les imaginations au point de lui réserver à ce point une place dans la tradition...

3) Le Draco est d'usage dans l'infanterie autant que dans la cavalerie.

4) Cette enseigne marque la Vexillatio et l'aile de cavalerie. Si Arthur peut être associé à cette enseigne, il faut chercher un grade bien plus bas que Magister Equitum: Tribun ou préfet, leurs commandant directs.

MessagePosté: Jeu 05 Mar, 2009 17:51
de Agraes
Inévitablement certaines idées nationalistes bien modernes tendent à appuyer certaines interprétations plutôt que d'autres. La réalité était surement bien différente, je crois de moins en moins à un clivage culturel si net entre Saxons et Bretons, des Saxons à l'origine appelés par les Bretons comme alliés, notamment pour les aider dans des conflits entre civitates trouvant peut-être leurs origines dans les rivalités tribales de l'âge du fer - c'est du moins l'hypothèse récemment mise en avant dans l'ouvrage de Stuart Laycock, Britannia: The Failed State.

MessagePosté: Jeu 05 Mar, 2009 22:38
de Gwalchafed
J'ai tendance à dédaigner un peu les Osprey, personnellement je possède le Late Roman Cavalryman, qui n'hésite pas à combler les "trous " avec des approximation, voire des contre-vérité. J'ai un peu l'impression que le but est de dresser un tableau le plus complet possible, quitte à s'appuyer sur des trucs un peu bancals...