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Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Ven 17 Juil, 2009 21:14
de Alexandre
André-Yves Bourgès a écrit:pourquoi donc B. Sergent a-t-il choisi de privilégier le plus récent en écartant les plus anciens

Probablement pour la raison dont tu te doutes : parce que la version la plus tardive est la plus pertinente pour son rapprochement, et parce que la méthode du comparatisme mythologique, comme celle du comparatisme linguistique, le lui permet en vertu du principe que je t'ai illustré plus haut.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Ven 17 Juil, 2009 22:02
de Sedullos
Sedullos a écrit:Toujours à propos des massues et en restant dans la légende et le mythe, elles sont utilisées par ou associées à des rois ou grands guerriers : des rois plus ou moins historiques sont enterrés avec une panoplie comprenant une massue de fer ; Sreng des Fir Bolg et les TDD et Fomore ont aussi des massues de fer de même que Cúchulainn. Un passage du Peredur gallois dit que celui qui maîtrise l'art du bâton connaît l'art de l'épée.


Je n’ai pas retrouvé la massue de Cúchulainn dans La razzia des vaches de Cooley trad. Guyonvarc’h.- Gallimard, 1994 :s49:

Dans le Cath Maighe Lena = La Bataille de Mag Lena, éd. Kenneth H. Jackson, Dublin, 1938, un druide célèbre les funérailles de Mog Neid, roi de Munster :

« Et Dergdamsa le druide fit une tombe pour Mog Neid : il l’enterra avec ses armes, avec sa pique, avec sa massue, et avec son casque.»

Autre version, c’est le druide qui parle :

« La tombe de Mog Neid est dans la plaine de Tualang,
avec sa pique à son épaule,
avec sa massue dont le coup était rapide,
avec son casque et avec son épée. »

Les druides / Le Roux et Guyonvarc’h.- Ouest-France, 1986, p. 195

Si l'on excepte la massue, cela ressemble à une tombe laténienne :wink:

Sreng des Fir Bolg et Bres, le Fomore combattant pour les TDD s’affrontent dans un duel en tant que champions de rang royal : chacun porte une épée, un bouclier, 2 lances et Sreng porte en plus une massue de fer. La Première Bataille de Mag Tured in Textes mythologiques irlandais / trad. Guyonvarc’h.- Ogam, 1980, pp. 29-30, 42

On notera que Sreng porte une massue pour affronter son adversaire, Bres. Ce dernier bien qu' exceptionnellement beau, surtout pour un Fomore, n'en demeure pas moins un équivalent du dragon, allié à titre exceptionnel aux TDD.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Ven 17 Juil, 2009 22:21
de André-Yves Bourgès
Alexandre a écrit:
André-Yves Bourgès a écrit:pourquoi donc B. Sergent a-t-il choisi de privilégier le plus récent en écartant les plus anciens

Probablement pour la raison dont tu te doutes : parce que la version la plus tardive est la plus pertinente pour son rapprochement, et parce que la méthode du comparatisme mythologique, comme celle du comparatisme linguistique, le lui permet en vertu du principe que je t'ai illustré plus haut.


Merci de cette confirmation : comme je demeure obstinément attaché aux principes et méthodes de l'érudition classique, je laisse la place sur ce fil aux comparatistes de tout poil.

AYB

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Ven 17 Juil, 2009 23:41
de Aeruuan
André-Yves Bourgès a écrit: pourquoi donc B. Sergent a-t-il choisi de privilégier le plus récent en écartant les plus anciens, notamment celui du premier hagiographe connu (XIe-XIIe siècles) ? Si j'étais aussi perfide que Pierre :D , je poserais la question : par méconnaissance du dossier ou ignorance du latin ?


Dite donc mr bourges...ca balance severe, si je peux me permettre. :wink:

moi je dis...c'est un regale!, voilà tout à fait ce que j'esperai, c'est un vrai bonheur que de vous lire. N'etant pas specialiste comme vous, je fais mon petit bonhomme de chemin à mon rythme et je remarque des petites choses, ca vaut ce que ca vaut.

Si je comprend bien le litige se trouve dans la valeur que l'on peut accorder entre les textes les plus anciens et les plus recents?

Je ne sais pas ce vaut le texte du 17e par rapport à celui de l'hagiographe de la vita latine d'Eflamm au niveau litteraire ou autre, mais dans tout les cas on voit que arthur est un roi, à la massue (et n'a pas de peau de lion ou que ce soit, meme pas un slip en peau de bêêête) et qu'il est avec toute sa clique de guerriers.
Il est notable que la nous n'avons pas affaire à un texte d'erudit du 19eme comme Le Braz.
Pourrait il etre à l'origine de la version d'anatole le Braz et de la Villemarqué, ou on peut le considerer comme une version de plus et tout aussi importante que n'importe quelle autre anterieur?

Lequel prendre pour determinant et pourquoi?

Les extraits:

VI. Alors estoit en Bretagne Armoriquc, à la Cour du Roy Hoël I. du nom, le genereux Artur, son cousin, couronné Roy de la Grande Bretagnc dés l'an 450. Lequel (comme Prince fort vaillant & courageux) s'exerçoit à chasser les dragons et monstres qui se trouvoient parmy les bois & forests, dont le païs abondoit. S. Efflam, marchant par la gréve avec sa troupe, rencontra le Roy Artur suivy de grand nombre de Princes & Seigneurs,...

Artur pria le Saint & sa compagnie de vouloir estre spectateurs de son combat; &, ayant empoigné sa massuë & son bouclier, il attaqua le dragon, & passerent tout le reste du jour en ce combat, jusqu'à ce que le soir, Artur las & fatigué, se vint jetter sur l'herbe prés S. Efflam, pour se rafraichir,...


Il serait interressant de parler d'eflamm/lugh?

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 11:58
de Sedullos
Salut,

Muskull a écrit:Notamment dans "le voyage de Bran" gallois où cela semble manifeste.


Il s'agit du récit gallois de la seconde Branche du Mabinogi : Branwen, fille de Llyr, mettant en scène Bran Vendigeit, à ne pas confondre avec le récit irlandais de La navigation de Bran, fils de Febal.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 12:06
de Sedullos
Aeruuan a écrit:Il serait interressant de parler d'eflamm/lugh?
Pourquoi ?

Lorsque je lis :
André-Yves Bourgès a écrit:je laisse la place sur ce fil aux comparatistes de tout poil.
j'ai pas trop envie, surtout après le "petit monde des archéologues".

Ce sont les archéologues et les comparatistes, dont certains étaient linguistes, je pense à Dumézil, qui nous ont "rendu" la civilisation celtique que des siècles d'érudition classique avaient expédié dans les poubelles de l'Histoire.

Il ne faut pas s'étonner si sur d'autres forum, des jeunes gens nous présentent comme des "planqués, des sclérosés", en clair des vieux cons infréquentables... :s45:

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 14:18
de Aeruuan
Sedullos a écrit:
Aeruuan a écrit:Il serait interressant de parler d'eflamm/lugh?
Pourquoi ?


Parce que...!

Je plaisante, parce que c'est jouissif, ca va comme reponse?

Par pitié messieurs, si il y a bien un endroit ou tout le monde peut se retrouver malgré ses divergences c'est bien sur des forums. Ils serait interressant et surtout sage, de plus c'est ma demande, que tout le monde donne son opinion. apres c'est à tout à chacun de prendre ce qu'il lui fait le plus raisonnance. Chaques disciplines quelles soit classiques ou comparatistes a ses propres defauts et ses propres limites, c'est enfoncer une porte ouverte de dire ca et tout le monde le sait!

Sedullos a écrit:Lorsque je lis : [quote"André-Yves Bourgès"]je laisse la place sur ce fil aux comparatistes de tout poil.
j'ai pas trop envie, surtout après le "petit monde des archéologues".

Ce sont les archéologues et les comparatistes, dont certains étaient linguistes, je pense à Dumézil, qui nous ont "rendu" la civilisation celtique que des siècles d'érudition classique avaient expédié dans les poubelles de l'Histoire.

Il ne faut pas s'étonner si sur d'autres forum, des jeunes gens nous présentent comme des "planqués, des sclérosés", en clair des vieux cons infréquentables... :s45:


La je comprend pas tres bien, c'est qui les vieux et les planqués? Dans quel camp tu te situe pour parler clairement. C'est malheureux de dire ca mais c'est une realité et je trouve que c'est tres sain d'aborder egalement ce sujet sans perdre le fil, tant qu'a faire. Car pour moi c'est un reel probleme que ces divergences "d'ecoles" et c'est incontournable que de les aborder à un moment ou à un autre... sans faire son ronchon.

Moi ca m'interresse et je suis persuadé que cela interresse enormement de gens, amateur comme moi, y compris les divergences de methodologie.
Nous sommes des gentlemens, alors continuons.
Vous accepterez bien une passe d'armes sous le regard de dieu (cf excalibur de Boorman)

A mr Bourges,

Donc si je comprend bien le fait qu'il soit avec sa cours est lié à un cliché litteraire qui date du moyen age, la massue est egalement un emprunt, tout comme le visage humain du dragon. Le fait qu'il soit hedoniste ca viendrais d'ou?

Si je vous suis bien il ne s'agirais donc que d'un ensemble heureux de strattes qui par le plus grand des hasards correspondes en tous points avec un texte hittite?
Comme vous le dites bien, ce qui releve de l'emprunt c'est la peau de lion, que la massue soit à trois tetes et que le dragon ruse en reculant. Ce sont des elements litteraires de toutes evidences, mais ils ne sont pas de toutes facons des elements determinant dans cette histoire et ne prouve pas qu'il ne pouvait y avoir à l'origine une massue et qu'arthur soit avec une troupe de guerriers.
Par proportion, qu'un texte sur 4 ou 5, je ne sais plus, meme si il est garant qu'il soit le plus ancien, ne suffit pas à prouver qu'il est le detenteur et la preuve que tout n'est que litterature (c'est juste le plus vieux connus), comme vous le disiez vous meme c'est dans son ensemble qu'il faut regarder. Et moi je constate que le roi arthur a une massue qu'il est avec une troupe de guerrier etc...sur la majorité des textes.

Et que fait on de la parti languistique comme le signale Alexandre, du rapport lugh/efflamm, de inara/enora, ne serais que par le prenom sans parler du reste. Des comparaisons avec Efflam/gengoulph/caradec.
Meme si je prend totalement en compte votre methode, qui me laisse dans une totale interrogation car plus que pertinente et surtout eprouvé depuis...des lustres. Cette ensemble de conjonctions "heureuses" m'interroge tout autant.

De plus tout comme en archeologie, il est bien demontré que par exemple "l'evolution" d'un armement ne fonctionne pas dans une logique de temps. Il peut y avoir des abondons d'elements determinents dans leurs fonctionnalitées, sur des armes des fois plus recentes que d'autres.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 17:17
de Sedullos
La je comprend pas tres bien, c'est qui les vieux et les planqués? Dans quel camp tu te situe pour parler clairement. C'est malheureux de dire ca mais c'est une realité et je trouve que c'est tres sain d'aborder egalement ce sujet sans perdre le fil, tant qu'a faire. Car pour moi c'est un reel probleme que ces divergences "d'ecoles" et c'est incontournable que de les aborder à un moment ou à un autre... sans faire son ronchon.


Je faisais allusion à un message signalé par Pierre sur le forum de la "Communauté gauloise" où un des membres qui avait fréquenté l'arbre-celtique disait que les piliers de l'arbre-celtique étaient froids, imbus d'eux-mêmes, et fermés au néodruidisme,... Ce à quoi un de ses potes a rajouté qu'on était des "planqués et des sclérosés" qui ne vivaient pas les banlieues chaudes...

Pour le reste, je trouve que André-Yves montre un peu trop de condescendance à l'égard des archéo et des comparatistes (de tout poil), je n'ai jamais rien dit de tel à propos des hagiographes.

On a besoin de tout le monde pour étudier la civilistion celtique.

Quant à la mention du mot "cons", elle faisait référence à un jugement émis par un gars d'un autre forum à propos d'un des administrateurs de ce forum ; lequel gars s'est vu remettre en place quelque part dans la vallée du Rhône, au mois de juin ; au vu de son état d'ébriété avancé, je n'ai pas cependant pas poursuivi la discussion.

Alors vieux, oui, j'assume. Planqué ? Non :s45:

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 19:07
de Jacques
Sedullos a écrit:Je faisais allusion à un message signalé par Pierre sur le forum de la "Communauté gauloise" où un des membres qui avait fréquenté l'arbre-celtique disait que les piliers de l'arbre-celtique étaient froids, imbus d'eux-mêmes, et fermés au néodruidisme,... Ce à quoi un de ses potes a rajouté qu'on était des "planqués et des sclérosés" qui ne vivaient pas les banlieues chaudes...

J'y suis allé faire un tour, pour voir. Bizarre... je ne me reconnais pas dans cette description :
Ce qui me choque aussi est le fait que ces personnes denient aux autres le fait de vouloir se declarer Celtes.
Si tu n'est pas Breton et que tu ne parle pas Breton tu ne peux te dire Celte...

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Sam 18 Juil, 2009 20:03
de Patrice
Salut,

Eh bien, ça s'échauffe ici. C'est le chouchen?

Le dossier de saint Efflam est éminemment, tant pour les historiens que les mythologues, et se tourner le dos comme cela est navrant.
Ici, nous avons plusieurs versions d'un Vie légendaire, du XIIe au XIXe siècle. C'est rare et précieux. Autant donc essayer d'étudier la chose sainement.
Pour moi, les méthodes de Bernard Sergent et d'André-Yves ne sont absolument pas contradictoires. Bien au contraire même, il y a moyen de les croiser.
Bernard Sergent a appliqué une méthodologie classique en matière de comparatisme, à savoir qu'on se fiche pas mal de la date à laquelle un texte a été mis par écrit car on sait, depuis longtemps, que des contes oraux peuvent parfois se montrer plus archaïques que leurs versions antérieures écrites. Cela a été démontré par exemple dans le cas du motif "Polyphème" (le héros enfermé dans un grotte avec des moutons et gardé par un cyclope). La plus ancienne attestation est chez Homère, et pourtant, c'est déjà sous une forme évoluée qu'elle apparaît, alors que (par exemple) les versions connus au Pays Basque et au Caucase comportent de grandes similitudes, qui ne s'expliquent bien sûr pas par un contact de populations récent. Elles montrent juste que, dans un passé très lointain (quand? avant l'écriture en tout cas) une version qui n'est pas celle d'Homère a circulé des Pyrénées au Caucase.
Maintenant, nous sommes tout de même dans un pays, la Bretagne, où l'oral et l'écrit coexistent. On sait que des cantiques, en breton comme en français, ont circulé par écrit en Basse Bretagne, et que ces textes, récités à la messe ou en marge de la messe, ont forcément influencé les éventuelles versions orales. Donc des passerelles entre la version du XIIe siècle et celle de Le Braz peuvent exister tout naturellement.
Mais il se trouve aussi que la version de Le Braz pose problème. Elle a été publié dans les Annales de Bretagne, à la suite de ses articles sur "Les saints bretons d'après la tradition populaire". Lorsque ces articles ont été repris en volume chez Calmann Lévy, le texte sur Efflam a été éliminé. Il faut dire que le livre a été rebaptisé Les saints bretons d'après la tradition populaire en Cornouaille. Certes cela recentre la géographie de l'ouvrage (puisqu'Efflam est en Trégor), mais ces articles à la base se présentaient comme un récit de voyage. Et du coup il manque la fin, alors qu'il aurait suffi de changer le titre... (ou du moins de conserver celui de la série d'articles). Bizarre.
On sait aussi, depuis la soutenance d'une thèse dont m'a parlé Joël Hascoët, que Le Braz réécrivait ses légendes. Ses carnets de notes ont été conservés et édités dans cette thèse (malheureusement pas publiée!). Il serait intéressant de connaître quelle est la version contenue dans ces notes.

Cependant, ces doutes historiographiques ne m'empêchent pas personnellement d'accepter la conclusion de Bernard Sergent, car l'élément "hédoniste" n'est finalement qu'un élément mineur. Nous avons bien là un récit de sauroctonie qui est conforme à ceux attestés dans les mythes indo-européens, dans lesquels le "héros" (au sens large) qui combat le dragon connaît toujours (sauf dans certaines versions courtes) une phase d'incapacité due à la puissance de son adversaire, et il se trouve toujours un personnage mineur, à priori non combattant, pour remporter (ou aider à) remporter la victoire. Dans les Balkans, par exemple, cela va être une jeune fille ou un vieillard qui vont apporter de l'eau ou un baume au héros, le protégeant ou soignant ainsi du feu du dragon. C'est là un élément primordial qui est souvent absent des récits de sauroctonie présents dans les Vies de saints. J'avais noté pour ma part que la Vie de saint Germain l'Ecossais le montre en sauroctone basique, mais que dans la version orale collectée au XIXe siècle, il se fait largement aider par un enfant (motif qui n'apparaît pas dans la Vie latine du XIIe siècle).

Le motif de la massue à trois noeuds, tel qu'il est décrit dans la Vie latine d'Efflam, est bien évidemment emprunté à Hercule (voir ses représentations: la massue a quasiment toujours trois noeuds. Pourquoi trois, d'ailleurs?). Mais la massue elle-même ne l'est vraisemblablement pas. En effet, on connaît une représentation d'Arthur de la fin du XIe ou début du XIIe, dans la cathédrale normande de Modène (Italie), qui le montre à cheval sur un bouc ou une chèvre et armé d'une massue (dotée à l'extrémité d'une boule).
Au XIe siècle, la massue de combat est encore employée dans les combats: on en a des représentations sur la tapisserie de Bayeux, lors de la bataille d'Hasting. Cependant, cette arme si particulière est aussi celle qui est de toute façon attendue dans le mythe: elle est celle du dieu de l'orage. J'ai consacré pas mal de pages dans ma thèse à ce sujet. Quand bien même le héros sait-il manier toutes les armes, c'est la massue (qui est vue toutefois comme tranchante) qui est employée contre le dragon.
On a là donc, dans la Vie de saint Efflam, un beau cas d'archaïsme maquillé par un badigeon de classicisme latin. Personnellement, je trouve cela très intéressant.

Voilà. Désolé si je ménage la chèvre et le chou, ce n'est pas par soucis de diplomatie, mais simplement parce que maintenant c'est ma démarche à moi. Après tout, mon joli diplôme de la FOReL porte la mention "Histoire des religions comparées". Un beau terme que j'accepte bien volontiers.

A+

Patrice

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Dim 19 Juil, 2009 11:28
de Alexandre
Patrice a écrit:Cela a été démontré par exemple dans le cas du motif "Polyphème" (le héros enfermé dans un grotte avec des moutons et gardé par un cyclope). La plus ancienne attestation est chez Homère, et pourtant, c'est déjà sous une forme évoluée qu'elle apparaît, alors que (par exemple) les versions connus au Pays Basque et au Caucase comportent de grandes similitudes, qui ne s'expliquent bien sûr pas par un contact de populations récent. Elles montrent juste que, dans un passé très lointain (quand? avant l'écriture en tout cas) une version qui n'est pas celle d'Homère a circulé des Pyrénées au Caucase.

Je ne connaissais pas ce rapprochement... Tu as des références ?

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Dim 19 Juil, 2009 12:11
de Patrice
Salut,

Je ne connaissais pas ce rapprochement... Tu as des références ?


Je cite de mémoire, il faudrait que je retrouve ça... C'est peut-être dans l'article d'Abaev traduit par Dumézil et publié dans les Annales. A vérifier.

A+

Patrice

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Lun 20 Juil, 2009 15:47
de Sedullos
Salut,

Un texte iranien mazdéen cité par Dumézil explique que les armes ont été inventées pour lutter contre les démons.

Sur la Tapisserie de Bayeux, le duc Guillaume et l’évêque Odo portent chacun une massue noueuse et un troisième personnage, qui serait un doublet de Guillaume d’après Anne Dudant, porte une massue à trois têtes, cf Le cycle d’Harold, séquences 49, 51, 54, 55. La massue ici est un signe de souveraineté et un bâton de commandement.

Dans la longue série des massues utilisées depuis la préhistoire et pour s’en tenir à une aire géographique allant de l’Inde à l’Irlande, la massue est tantôt une arme de combat contre les d’autres humains ou dieux , tantôt une arme spécifique d’un dieu tueur de monstres. Mjollnir, le marteau de Thor, rentre dans cette catégorie : il ne l’utilise que contre les monstres et les Géants du givre, les Thurses.

La masse d’armes à ailettes, qui est à la fois une arme contondante et tranchante, a été utilisée comme arme de cavalier et de fantassin de la Pologne à l’Inde jusqu’au XIXe siècle. C’est un insigne de commandement chez les Cosaques et d ‘autres peuples. Pour les collectionneurs, il existe un exemplaire absolument unique, ayant appartenu à un officier d’Europe centrale qui a fait souder une tête de masse à ailettes à l’embouchure de son pistolet à silex, celui des Highlanders, tout en acier, avec sa crosse à cornes de bêlier. On ne peut aller plus loin dans le symbolisme fulgurant.

Le nom persan de la massue Gurz est peut-être à mettre en relation avec le vajra des Indiens et des Thibétains. Rostam, le héros perse du Cha Name, Le Livre des Rois, porte une massue à tête de taureau.

A noter que les masses indo - persanes sont souvent munies d’une garde comme celles des sabres et des épées. Des illustrations mogholes du Ramayana, datées du XVIIe ou du XVIIIe siècles, montrent les singes alliés de Rama dans sa guerre contre les démons, pourvus de lourdes massues à boule, ceux-ci côtoient des ours et des guerriers armés de fusils à mèche! (Les singes, c’est pour le poil :s45:

Un Baal phénicien ou syrien, coiffé d’un casque à cornes porte d’une main, une massue et de l’autre une lance fulgurante ; cf, la comparaison avec le dieu hittite de l’orage. Une des plus anciennes représentations d’un pharaon le montre frappant ses ennemis avec sa massue à tête de pierre. Ces deux exemples sortent du domaine indo-européen.

Tout comme le grand bâton du paysan basque évoqué sur un fil d’Aremorica consacré au penn-baz breton. Ce bâton sert à se protéger des loups qui sont pour le berger, l’équivalent du dragon du héros, promis à la royauté.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Lun 20 Juil, 2009 18:23
de Muskull
Bonjour,
A mon avis ces trois 'noeuds' signale que cette "arme" est active dans les trois mondes, un outil polytechnicien et polydivin en quelque sorte.
La massue du Dagda donne vie et mort par ses extrémités comme la lance de Lug mais trace aussi le territoire sacré et ce territoire doit s'établir dans les trois mondes par les rituels et les sacrifices de fondation.
Je vous laisse faire les corrélations avec la trifonction I.E. :wink:
Pour les 3 mondes voir des messages précédents...

Je suis d'accord avec Patrice, les opinions d'André-Yves et de B. Sergent sont parfaitement complémentaires et pour ma part je garde grand intérêt pour l'une et l'autre.
Pour la très grande ancienneté des mythes j'en suis aussi convaincu et j'avais beaucoup aimé une communication de B. Sergent où il recherchait une possible origine paléolithique à certains mythèmes.
Nous avons tendance à considérer comme très frustres et isolées les cultures d'avant les âges métalliques pourtant, par exemple, une analyse génétique sur les chèvres (animaux importés du Moyen-Orient) occidentales démontrait qu'il n'y avait pas une fixation d'un génome mais bien un renouvellement constant traduisant des échanges commerciaux intenses en Méditerranée dès le néolithique.

Re: Le dragon hedoniste

MessagePosté: Lun 20 Juil, 2009 19:06
de Sedullos
Muskull a écrit:Bonjour,
A mon avis ces trois 'noeuds' signale que cette "arme" est active dans les trois mondes, un outil polytechnicien et polydivin en quelque sorte.
La massue du Dagda donne vie et mort par ses extrémités comme la lance de Lug mais trace aussi le territoire sacré et ce territoire doit s'établir dans les trois mondes par les rituels et les sacrifices de fondation.
Je vous laisse faire les corrélations avec la trifonction I.E. :wink:
Pour les 3 mondes voir des messages précédents...
...


Salut,

A mon avis ces trois 'noeuds' signale que cette "arme" est active dans les trois mondes, un outil polytechnicien et polydivin en quelque sorte.

On pourrait aussi envisager s'il s'agit d'une massue, ayant eu une existence réelle, que c'était en rapport avec l'essence utilisée (du chêne ?) et avec sa structure. Il faut couper telle longueur d'un jeune arbre, d'où partent trois branches, les noeuds assurant la fonction de percuteur tout en maintenant la cohésion de l'arme...