Page 8 sur 11

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 2:08
de Pierre
A. Ferdière, F. Malrain, V. Matterne, P. Méniel, A. Nissen-Jaubert, B. Pradat, Histoire de l'Agriculture en Gaule, page 36

"Enfin, certains animaux, considérés actuellement comme sauvages, bien qu'ils soient élevés ici et là pour diverses raisons (production de venaison, repeuplement de territoires de chasse) ont pu être apprivoisés et rien n'interdit de penser qu'ils aient pu faire l'objet d'une reproduction contrôlée. C'est ainsi qu'à la période romaine, des cerfs harnachés et utilisés comme appelant à la chasse ont été inhumés avec parfois une offrande céramique; cela oblige à reconsidérer leur statut d'animal sauvage (Poplin 1996)."


Comme appelant, c'est tout du moins ce qui est proposé :wink:

@+Pierre

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 11:56
de André-Yves Bourgès
Muskull a écrit:C'est pour cela que j'évoque la possibilité d'une "chasse sacrée" du cerf car il n'y a aucune trace de sanglier dans les reliefs alors que ces chasses existent dans certains mythes et dérivés comme les vies des saints.


Il y a une laie ou truie sauvage (sus silvatica) et ses petits mentionnés dans la vita de saint Paul Aurélien par Wrmonoc, que le saint découvre dans une place forte à l'abandon, en compagnie d'abeilles, d'un ours et d'un boeuf sauvage ; il apprivoise la laie et ses petits : d'elle et de sa progéniture sortit pendant de nombreuses années une innombrable descendance des porcs de race royale (ex qua ejusque progenie innumera porcorum regii generis seges multos postea per annos est procreata)

Cette vita de saint Paul Aurélien est l'un des rares monuments hagiographiques bretons à être datée avec précision (884).

Cordialement,

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 13:00
de Sedullos
Salut à tous,

En dehors du point très précis sur la domestication éventuelle de grands animaux sauvages comme appelants ou autres fonctions, il est important de distinguer deux type de chasse.

La chasse au petit gibier, oiseaux, lièvres,... pratiquée par les gens du peuple,a vec des frondes, des arcs et des "bâtons", pour protéger les cultures et améliorer l'ordinaire.

La chasse au gros gibier, cerf, sanglier, ours, cf les griffes d'ours des rituels funéraires des Ardennes, pratiquée par les nobles, les guerriers, disposant de chevaux, de chiens et d'armes de guerre utilisées pour la chasse comme des javelots, des lances et des épées.

Cette chasse devait être un entraînement pour la guerre et devait se pratiquer pendant la saison sombre ; la guerre étant pratiquée pendant la saison claire.

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 13:12
de Taliesin
Bonjour à tous

André-Yves Bourgès a écrit:
Il y a une laie ou truie sauvage (sus silvatica) et ses petits mentionnés dans la vita de saint Paul Aurélien par Wrmonoc, que le saint découvre dans une place forte à l'abandon, en compagnie d'abeilles, d'un ours et d'un boeuf sauvage ; il apprivoise la laie et ses petits : d'elle et de sa progéniture sortit pendant de nombreuses années une innombrable descendance des porcs de race royale (ex qua ejusque progenie innumera porcorum regii generis seges multos postea per annos est procreata)

Cette vita de saint Paul Aurélien est l'un des rares monuments hagiographiques bretons à être datée avec précision (884).


Louis Pape, et après lui Bernard Merdrignac, pensent que ce passage est est directement inspiré de l'Enéide de Virgile. Voir la contribution de Bernard Merdrignac à l'ouvrage "Mythologie du porc" édité par Philippe Walter.

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 16:19
de André-Yves Bourgès
Taliesin a écrit:Louis Pape, et après lui Bernard Merdrignac, pensent que ce passage est est directement inspiré de l'Enéide de Virgile. Voir la contribution de Bernard Merdrignac à l'ouvrage "Mythologie du porc" édité par Philippe Walter.


L'inspiration virgilienne de Wrmonoc est probable ; mais elle ne rend pas compte de la différence de point de vue : chez Virgile, c'est la couleur blanche de la truie qui est "signifiante", car elle est à l'origine du nom, Albe, donné à la ville fondée par le fils d'Enée, Ascagne, et, de surcroît, il ne s'agit pas d'un animal sauvage. Enfin, la portée prodigieuse (30 porcelets) est en même temps prophétique, car ce nombre correspond au nombre d'années écoulées entre la découverte par Enée de l'endroit où vivaient la truie et ses petits, et la date de la fondation d'Albe par Ascagne ; au surplus, les animaux sont sacrifiés à Junon par Enée. L'étude de ce mythème, à la fois chez Virgile, comme chez les auteurs pré-virgiliens et péri-virgiliens, a fait l'objet de la part de J. Poucet d'un travail érudit et fouillé.

Il me semble que la truie blanche appartient également à l'outillage mythologique des Bretons d'outre-Manche et je suis frappé de voir que Wrmonoc, qui nous a transmis des traditions insulaires (cf. le roi Marc Commore), n'a pas rapporté sa truie virgilienne à celle des Celtes.

Bien cordialement,

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Dim 30 Nov, 2008 17:24
de Muskull
Un indice complémentaire:
Dans la mythologie grecque, la truie ou laie de Crommyon (en grec ancien Ύς Κρομμυων / Hus Krommyôn) est une créature fantastique, fille de Typhon et Échidna selon Apollodore, et mère du sanglier de Calydon selon Strabon. Hygin fait de l'animal plutôt un sanglier, mais il est le seul dans ce cas.

Sauvage et féroce, elle est décrite comme une « tueuse d'hommes » d'après un fragment Bacchylide, et terrorise les habitants de Crommyon en Corinthie, où elle vit. Elle est cependant terrassée par Thésée lors de sa traversée du golfe Saronique.

Elle est parfois appelée Phaïa (Φαια), du nom de la femme qui la nourrissait. Plutarque livre cette interprétation tardive du mythe (Vie de Thésée, IX) :

« On a dit aussi que cette Phaïa était une femme prostituée, qui vivait de brigandages, et habitait à Crommyon ; qu'on lui avait donné le nom de laie à cause de ses mœurs et du genre de vie qu'elle menait, et que Thésée la fit mourir. »

Sur les céramiques la représentant, la laie de Crommyon est systématiquement opposée à Thésée, et souvent accompagnée d'une vieille femme.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Phaia

Ce thème de la truie (blanche ou noire) en tant qu'animal guide se retrouve aussi dans le mythe de fondation de Phocée:
http://marseilleveyre13.free.fr/fondati ... dation.htm
L'Artémis phocéenne étant clairement une déesse truie qui dans ce cas guide les marins.
Image

Guide, fondation, fertilité du "nouveau monde", les hommages à la déesse mère traverse les temps et les écrits. :wink:

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 10:23
de DT
Salut à tous,
Salut Muskull,
Là, je ne te suis pas. Ce n'est pas parce qu'il y a un hommage masculin envers des qualités plus souvent féminines, qu'il y a un culte de la Déesse-Mère.
C'est une question de degrés et de démonstration de l'affection.
Nous les hommes sommes bien trop souvent Macho.
Ton image de l'Artémis d'Ephèse est une "reconnaissance".
A+ :wink:

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 11:37
de Patrice
Salut,

Le thème de la chasse au sanglier existe dans les représentations gallo-romaines, contrairement à ce que dit Muskull.

Pour le passe de la Vie de saint Paul Aurélien, voir aussi l'interprétation de Jean-Paul Lelu dans Mythologie Française, corrigé par Bernard Robreau dans Mythologie Française et dans Ollodagos qui voient bien dans ces animaux des représentants tri-fonctionnels de la société celtique traditionnel.
On retrouve un classement de ce genre dans la vie de saint Taurin d'Evreux, lequel, avant d'arriver dans la ville, rencontre un diable qui se déguise successivement en lion, en ours puis en buffle.

A+

Patrice

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 11:49
de Sedullos
Salut à tous,

il y a notamment le sarcophage de Déols et une coupe en verre gravé conservée à Cologne avec un veneur armé d'un épieu affrontant trois sangliers. cf, le chapitre sur les vêtements de chasse de Costumes et textiles en Gaule romaine, p. 35-36

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 17:44
de Muskull
Citation du livre de Joël Hascoët dont nous avons parlé plus haut:
Eustache, d'abord nommé Placide, était un général romain. Un jour, alors qu'il participait à une chasse, il vit un grand et magnifique cerf qu'il poursuivit.
Au bout de quelque temps, le cerf s'arrêta, une croix apparut entre
ses bois et lui-même se mit à parler, s'identifiant alors comme le Christ.
Aussitôt Placide se convertit et fut baptisé sous le nom d'Eustache. La
légende d'Hubert, qui a pris sa source en Belgique et dans le Nord de la
France, est en tout point semblable, hormis le fait qu'Hubert était un
noble mérovingien. Toutefois, cette dernière ne remonte vraisemblablement
qu'au XVe siècle mais elle introduit un nouvel élément qui semble
spécifique aux pays celtiques : Hubert est fêté le 3 novembre, non loin de
la fête des morts.
Or il est remarquable de constater que les représentations les plus anciennes que l'on connaisse de la légende d'Eustache proviennent toutes pourla plupart d'Anatolie et qu'elles sont pour beaucoup présentes dans des tombeaux.
C'est d'ailleurs aussi en Anatolie que l'on connaît l'ancêtre de cette iconographie avec des cerfs d'époque romaine en bronze portant entre leurs bois l'aigle de Jupiter. Ce culte du cerf remonte à l'époque
Hittite, mais il est vraisemblable qu'il s'est exercé en plus une influence
galate, car toutes les représentations anciennes d'Eustache sont situées en plein territoire galate. Par l'intermédiaire de ce peuple celtique, nous voilà revenu dans le domaine de la mythologie française.

Là aussi l'animal-guide, le thème de la chasse et lorsqu'il s'arrête il y a théophanie, vision, apparition, appelez cela comme vous voulez. :wink:

Notre auteur écrit aussi:
Le monde gréco-romain
La représentation d’une chasse au cerf n’est pas un motif nouveau
dans l’iconographie funéraire du territoire français. Elle apparaît au 1er
siècle après J.C., ornant une urne funéraire en marbre trouvée à
Lyon234, sur une face de laquelle on voit un chasseur à pied, accompagné
d’un chien et armé d’une lance, menacer un cerf gigantesque qui
bondit vers lui. Derrière le chasseur se trouve un sanglier au repos,
La communauté / 237
alors que l’autre face de l’urne présente un énorme dogue affronté
avec un taureau. Il est à remarquer que tous les éléments présents sur
cet objet, mis à part le sanglier, le sont aussi sur le panneau du dieu au
bois de cerf du chaudron de Gundestrup, un lien entre l’iconographie
de la chasse au cerf et le mythe de Cernunos n’est donc pas à exclure235.
Le motif de la chasse infernale est très tôt récupéré par l’iconographie
paléochrétienne. Sur de nombreux sarcophages du IVe siècle après J.C.,
on peut observer des chasses au sanglier, au cerf, mais aussi au lion,
motif inspiré des thèmes gréco-romains qui sera d’ailleurs très vite
abandonné durant le Moyen Age. Si certaines christianisations primitives
ne sont pas parfaites, accusant un mélange d’influences diverses,
les exemples les plus récents sont tous chrétiens, ainsi le sarcophage
orné d’une chasse au sanglier provenant de l’ancien monastère de
Saint-Samson-de-la-Roque en Normandie.
Le motif n’est toutefois définitivement christianisé qu’avec l’introduction
à Rome au VIIIe siècle du mythe de saint Eustache, puis sa popularisation
par Jacques de Voragine


D'accord sur l'interprétation tri-fonctionnelle des animaux de St Paul Aurélien mais les abeilles font un lien subtil et comme il y a un focus actuellement sur Levi-Strauss je causerai une autre fois sur les "transversalités" de ce quintette qui n'est pas d'Alexandrie...

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 18:05
de Patrice
Salut,

Notre auteur écrit aussi:
Citation:
Le monde gréco-romain
La représentation d’une chasse au cerf n’est pas un motif nouveau
dans l’iconographie funéraire du territoire français. Elle apparaît au 1er
siècle après J.C., ornant une urne funéraire en marbre trouvée à
Lyon234, sur une face de laquelle on voit un chasseur à pied, accompagné
d’un chien et armé d’une lance, menacer un cerf gigantesque qui
bondit vers lui. Derrière le chasseur se trouve un sanglier au repos,
La communauté / 237
alors que l’autre face de l’urne présente un énorme dogue affronté
avec un taureau. Il est à remarquer que tous les éléments présents sur
cet objet, mis à part le sanglier, le sont aussi sur le panneau du dieu au
bois de cerf du chaudron de Gundestrup, un lien entre l’iconographie
de la chasse au cerf et le mythe de Cernunos n’est donc pas à exclure235.
Le motif de la chasse infernale est très tôt récupéré par l’iconographie
paléochrétienne. Sur de nombreux sarcophages du IVe siècle après J.C.,
on peut observer des chasses au sanglier, au cerf, mais aussi au lion,
motif inspiré des thèmes gréco-romains qui sera d’ailleurs très vite
abandonné durant le Moyen Age. Si certaines christianisations primitives
ne sont pas parfaites, accusant un mélange d’influences diverses,
les exemples les plus récents sont tous chrétiens, ainsi le sarcophage
orné d’une chasse au sanglier provenant de l’ancien monastère de
Saint-Samson-de-la-Roque en Normandie.
Le motif n’est toutefois définitivement christianisé qu’avec l’introduction
à Rome au VIIIe siècle du mythe de saint Eustache, puis sa popularisation
par Jacques de Voragine


Héhé, c'est tiré d'un article à moi, ça...

A+

Patrice

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 18:13
de Muskull
Patrice a écrit:
Héhé, c'est tiré d'un article à moi, ça...

Normal, tu es une référence :wink:
Mais sur le fond, qu'en penses-tu de ces "chasses" ?
Une des formes du rituel ou simplement cette option profane de "l'entraînement de guerriers en période sombre" comme le signale Sed. :?

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 19:01
de Sedullos
Hop hop,

Ils pouvaient aussi s'entraîner ou chasser en période claire !

Il y avait probablement d'autres entraînements que la chasse.

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 19:04
de Pierre
Sedullos a écrit:Il y avait probablement d'autres entraînements que la chasse.


La muskullation ? :P

@+Fourbos

PS : Par contre, je ne vois toujours pas ce qu'il y a d'historiographique dans ce fil :!:

MessagePosté: Lun 01 Déc, 2008 19:21
de André-Yves Bourgès
Pierre a écrit:PS : Par contre, je ne vois toujours pas ce qu'il y a d'historiographique dans ce fil :!:


Moi non plus !

AYB