Thierry a écrit:Merci Agraes et je dirai même merci à tous....Voilà un fil bien lancé et sans aucune animosité en plus
Donc si je comprends bien, arrivée de Dumnonii dans le contexte de la fin des tourmentes du III° siècle. S'agit il uniquement de guerriers chargés de la défense du littoral ou de populations entières (des familles) ? Que connait-on de l'ampleur de cette migration ?
Et là, j'ai envie de dire, et ensuite ? Je sais, je suis gourmand.
Quid de l'impact par exp des derniers "royaumes" militaires romains à la désagrégation de l'empire ?
Le schéma proposé pour cette "première migration bretonne" allant de la fin du IIIe à la fin du Ve siècle serait celui d'établissements de colonies à vocation surtout défensive. Ce que nous montre l'archéologie serait à comparer avec les établissements de lètes germaniques dans le reste de la Gaule.
Les lètes sont des colons déplacés par le pouvoir romain. A l'intérieur de l'empire ils constituent des îlots de barbarité, conservant leurs propres coutumes, vivant avec leurs familles et mettant aussi la terre en valeur. Ils servent de force militaire irrégulière, combattant avec leurs propres armes. Ils sont aussi un important vivier de recrutement pour l'armée régulière.
Le cas de figure des Bretons serait quelque peu différent, puisqu'ils avaient un statut juridique probablement différent. En toute logique ils étaient citoyens romains depuis l'édit de Caracalla, mais ces habitants des franges de l'empire ont pu avoir un statut de
gentiles, de par leurs lois "celtiques", leur langue et leurs coutumes. On peut également faire l'analogie avec l'Afrique du Nord où les chefs tribaux frontaliers ont titre militaire romain. D'autres insulaires, Irlandais (bien documentés pour les Attecotti), Pictes voire Bretons du nord ont pu être installés sur le continent à cette époque en qualité de
gentiles,
laetes ou
deditices. Voir à ce sujet les travaux de Soazick Kerneis.
Si l'on poursuit la comparaison avec les lètes germaniques, les colons bretons auraient donc été installés pour remettre certaines terres abandonnées en valeur, défendre le pays contre des incursions barbares et fournir des hommes à l'armée romaine régulière, notamment aux forces du
Tractus armoricani.
On ne saurait chiffrer avec précision les migrations bretonnes. Pierre-Roland Giot proposait tout simplement un ordre d'idée similaire aux autres grandes migrations de l'époque, à savoir une à plusieurs centaines de milliers d'individus sur une vaste zone géographique, sur plusieurs siècles.
A la fin du Ve siècle les Bretons (insulaires ou continentaux ?) semblent avoir joué un rôle très important sur l'échiquier politique de la Gaule. Fleuriot avait très bien mis en valeur ce rôle en évoquant l'expédition militaire de Riothamus contre Euric, répondant à l'appel de l'empereur Anthemius et allié aux Romains du comte Paul ou de Syagrius. La chronologie est floue cependant.
On a également la référence de Procope à la lutte des Armoricains contre les Francs de Clovis. On sait que des "soldats romains" se donnèrent aux Armoricains et aux Francs et étaient toujours constitués en unités au VIe siècle. On peut en déduire que les Armoricains pouvaient s'appuyer sur des forces suffisantes pour tenir en respect le chef franc, et il est possible que les Bretons y aient joué un rôle important.
Archéologiquement, les indices sont encore maigres mais pas inexistants. On a retrouvé en Bretagne un certain nombre de monnaies de la fin du Ve siècle, notamment des
solidii et
aureii de Julius Nepos et de Zénon dans les Côtes d'Armor, respectivement l'avant-dernier empereur d'Occident et empereur d'Orient dans les années 480-490. Ce type de monnaie est typiquement associé à la paye de soldats romains.
Muskull fait l'analogie avec la désintégration de l'URSS, pour la fin de la Grande-Bretagne romaine Stuart Laycock avait fait la comparaison avec l'explosion de la Yougoslavie, voir par ici :
viewtopic.php?f=3&t=4876