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MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 10:39
de Adcanaunos
8) Parfaitement d'accord. Mais de ce point de vue, Corent n'est pas un cas isolé : à Ribemont, Gournay, Fesques, l'alignement sur les points cardinaux est toujours partiel.
Même remarque pour le plan, "à peu près" carré de ces trois sanctuaires - en fait, franchement parallélépipédique ou trapézoïdal, avec une branche rentrante et des angles arrondis.
Visiblement, les perpendiculaires n'étaient guère appréciées de nos architectes gaulois, qui savaient pourtant tracer des plans au cordeau, en utilisant des canons métriques précis au décimètre près.
Un détail parmi d'autres : l'espace mesuré entre chaque poteau de la galerie monumentale est de 3 m 20, d'axe en axe. Soit, très exactement. l'équivalent de dix pieds grecs (attiques = 32 cm). Le parallèle pourrait sembler purement fortuit. Mais cette mesure de dix pieds correspond, précisément, à l'espacement-type des colonnades classiques et hellénistiques.
Pour le reste, il semble que les considérations ou prescriptions d'ordre symbolique ou rituel primaient sur le respect de la norme orthogonale. Une différence notable avec les Grecs classiques, qui ont privilégié l'angle droit comme point de départ d'une ordonnance du monde à l'image de nos centres-ville modernes...
Truisme : les Celtes du second âge du Fer, dont Poseidonios affirme qu'ils n'ignoraient pas les théories de Pythagore, n'avaient pas tout à fait la même vision que Socrate ou Ictinos. La forme de leurs sanctuaires, qui ont pourtant bénéficié d'une conception architecturale particulièrement soignée, souligne les limites de la comparaison avec leurs voisins méditerranéens.
:P

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 10:55
de Muskull
Pour les matheux :
http://users.belgacom.net/symbolisme/co ... nnexe2.htm
A la latitude de Corent, correspondance avec le solstice d'été ou "décalage celtique" :
http://users.belgacom.net/symbolisme/orientannexe3.htm
Nous savons d'après Guyonvarc'h et Leroux que l'Est est "devant", le Nord à gauche, etc...
Ce qui est intéressant c'est qu'il n'y ait pas de "correction gallo" dans l'orientation du temple laténien.

Pour une datation saisonnière des festins l'on pourrait retirer des informations de l'âge des jeunes animaux sacrifiés, l'agnelage par exemple se situe dans une fourchette assez étroite.
Approximatif certes, mais l'on pourrait sans doute définir une saison.

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 11:04
de Adcanaunos
:?
Une correction existe au niveau des fosses libatoires situées dans l'axe de l'entrée : elles sont remplacées par de petits puits à parement en pierre, dont les parois sont orientées au degré près sur le nord magnétique.
Pour le reste, les bâtiments romains ne font qu'enchâsser les vestiges gaulois préexistants, comme dans un écrin, sans modifier leur orientation.
:D
Bien vu, en ce qui concerne les agneaux. L'étude consacré par mon collègue P. Méniel aux "fosses à moutons" d'Acy-Romance avait mis en évidence l'abattage et la consommation de centaines de brebis prêtes à mettre bas. Ce qui correspond, en termes d'économie agro-pastorale, à du pur gaspillage.
A Corent, les études en cours révèlent une proportion non négligeable d'animaux jeunes abattus au printemps, ce qui nous rapproche plus d'Imbolc ou de Beltaine que de Samain. Mais la situation n'est pas aussi tranchée qu'à Acy.

Travaux pratiques

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 11:14
de Adcanaunos
Merci pour ces infos, qui me semblent plutôt éclairantes.

Et pour faciliter la comparaison :

Image

Le plan des deux sanctuaires successifs, conventionnellement orienté au nord (haut de l'image) :

Image
Plan en version 5 fois plus grande

:wink:

A vous de jouer, j'attends vos propositions.

Edition de Guillaume : Je me suis permis de réduire ton plan pour que le chargement soit plus rapide en connexion modem classique...

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 12:35
de gérard
1) pour la pierre gravée, votre interprétation me semble très plausible. Je pense aussi au rite de fondation romain (indo-européen?) : tracé au sol d'un quadrilatère (d'un carré?) avec diagonales et médianes, et "pomoerium". Y a-t-il des spécialistes de ce genre de choses sur ce forum?

2) Mercure? Vu de Corent, le Puy de Dôme (à 21 km tout de même) apparaît-il vraiment comme "la" hauteur dominante à l'horizon ouest?
Le coucher de soleil à la période du solstice d'été, vu de Corent, se fait-il sur le Puy de Dôme? (ma réponse est oui il y a 2200 ans, et celle de mon vérificateur, astronome compétent, aussi, mais c'est celle de calculs, je ne suis jamais allé sur place, donc vérification nécessaire sur place, en apportant les correctifs nécessaires vu les 2 millénaires et quelques qui nous séparent de l'époque de la fondation de Corent).
Le Pic de Mercurol, à environ 8 km à l'est, est quant à lui bien sur une ligne équinoxiale, je me suis fait vérifier par une autre personne compétente.
Le Puy de Mercoeur (environ 19 km si je me souviens bien) est dans la direction du coucher du soleil à la période fin avril début mai.

"Le" spécialiste de la toponymie de l'Auvergne est Pierre-Henry Billy.
Pour lui, les noms en merk- dériveraient d'un francique * marka "limite".
J'avais commencé une recension de ce type de toponyme autour de Corent à partir des cartes IGN 1/25000 (qui voudrait la reprendre, avec élargissement au cadastre?)

Tout ça, c'est des pistes de recherche…

J'avais lancé un fil de discussion sur "sanctuaire laténien Gournay-sur-Aronde sur l'Arbre Celtique le 1er août 2004. A consulter pour mieux comprendre ma problématique.

Cordialement,
Gérard

PS ma réflexion porte donc plus sur le choix du lieu "Corent" par rapport
à l'environnement toponymique extérieur, l'orientation des temples et fanums , si elle joue pour autre chose, n'est pas là concernée.

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 13:03
de Hadañ drailh
Adcanaunos a écrit:Une correction existe au niveau des fosses libatoires situées dans l'axe de l'entrée : elles sont remplacées par de petits puits à parement en pierre, dont les parois sont orientées au degré près sur le nord magnétique.


Sur le nord magnétique? C'est quand même curieux... Quel est actuellement la déclinaison entre le nord magnétique et le nord géographique à Corent?

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 13:45
de Adcanaunos
??? :?
Pour être plus précis : le Nord indiqué par ma boussole posée sur le bord des puits. J'ignore s'il existe un décalage avec le Nord géographique, mais j'en doute.
Je m'aperçois que le plan ci-dessus n'indiquait pas sa direction.
En voici un nouveau tirage (compressé, cette fois), orienté par rapport au schéma :

Image

La coïncidence est presque parfaite. Presque...

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 14:40
de gérard
Il me semble qu'il y a forcément un décalage entre nord magnétique et nord géographique.

Autre chose:
Très intéressante, la distance de 3,2 m d'axe à axe entre les poteaux. Je ne connais pas la valeur du pied grec attique (le pied grec ancien ferait 29,6296 cm). Par contre un pied gaulois trouvé à Criquebeuf, cité par P.-M. Duval, ferait 32,4 cm (La Gaule pendant la paix romaine, p. 133, coll. "la vie quotidienne", éd. Hachette).
Une lieue vaut 7500 pieds et mesure donc 2400 m. On retrouve la lieue gauloise indigène chère à Jacques Dassié. (par opposition à la lieue gallo-romaine ou lieue gauloise romanisée de 2212 m-2222 m selon la valeur –fluctuante selon les époques- du pied romain).
Je retrouve aussi ces valeurs de 2400 m -2430 m dans la Creuse et l'Allier, mais c'est une autre histoire.

mille romain (1471-1481,5 m, selon la valeur du pied romain utilisé),
lieue gauloise hypothétique (~2400-2500 m),
lieue gallo-romaine (2206,5-2222,25 m, valeur variant selon la valeur du pied romain utilisé).
Le mille vaut 5000 pieds romains.
Le pied romain possède des valeurs variables:
le pied "tardif" (dès la fin du 2ème s.) de 29,42 cm,
le pied de 29,445 cm,
le pied officiel dit "monétal" (conservé dans le temple de Junon Moneta) est de 29,57 cm,
le pied "moyen" ou "arrondi" de 29,6 cm (dérivé du pied attique),
le pied issu du pied grec ancien de 29,6296 cm arrondi à 29,63 cm (serait-ce le même que celui dérivé du pied attique?).
La lieue vaut 7500 pieds.
La lieue gallo-romaine LGR du Bas-Empire serait en fait une lieue gauloise LG romanisée. Les valeurs différentes de la lieue gauloise hypothétique seraient dues à des valeurs de pied gaulois différentes.
Le pied gaulois trouvé à Criquebeuf est de 32,4 cm (Duval, p. 133).
Le pied gaulois trouvé (avant 1947 ?, Gallia, V, 1947, fasc. 2, p. 449-451, article de Georges MATHERAT, merci à "Hervé" de Picardie pour ce renseignement) à Senlis mesure 28,2 cm (Duval, p. 133).
Ils donneraient respectivement des lieues gauloises de 2430 m et 2115 m.
Le pied gaulois des Tongres fait 33,2 cm (J. Dassié), la possible lieue gauloise ferait alors 2490 m.
Le pied médiéval de Roy dit aussi "pied de Paris", de 32,48 cm, donnerait une LG de 2436 m. Ce pied est à l'origine, semble-t-il, de la lieue "d'une heure de chemin" de 4872 m.
Charlemagne tenta une unification des mesures de son empire.
Le pied de Charlemagne, 144 lignes pour 32,36 cm, a-t-il eu une réelle existence indépendante du pied de Roy? Il serait encore employé dans la ganterie (parisienne?) (32,4 cm en arrondi? Différent de l'arrondi attendu à 32,5 cm du pied de Roy). 7500 pieds de Charlemagne font 2427 m.

Cordialement,
Gérard

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 14:48
de Adcanaunos
:79:
Rien de surprenant : l'alignement du pied gaulois sur le pied grec a été démontré (notamment par Chr. Goudineau dans un récent numéro de Gallia, si je ne m'abuse).
Je confirme, en revanche, que l'intercolumnium des temples et stoai d'époque classique et hellénistique correspond à dix pieds attique, soit 3,20 m et des poussières d'orteils...

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 17:17
de Pierre
Bonjour à tous,

Etrange, Dominique Garcia parle d'un pied de 0,35m, alors que nous sommes dans le voisinage des Massaliètes...

Sur le plan le nord est vers le bas. L'axe du mur Est, est donc SSE-NNO. L'entrée du sanctuaire ne peut donc s'aligner avec un levée héliaque, que sur des journées longues (Soltice d'été, ou Lugnasad). A calculer...


@+Pierre

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 17:31
de Pierre
Je viens de verifier dans les éphémerides.


20° Nord (en partant de l'Est :wink: ),

Correspond à deux periodes de l'année.

Fin mai / début juin (?)

Fin Juillet / Début aout (Hasard?)


Toutefois à confirmer pour l'époque. Avec cette histoire de précessions des équinoxes il y a des variations.




@+Pierre

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 19:00
de Muskull
Ah les mathémagiques ! :wink:

Il y a aussi un notable coefficient d'incertitude due aux reliefs, nous ne sommes pas dans la plaine de Salisbury. :D
Je pense qu'ils utilisaient des valeurs locales et non des valeurs absolues mesurées ailleurs, possible corrélation d'une phase lunaire aussi, complicou quoi !
Je pense que les parages de Lugnasad ne sont pas une coïncidence.

Pour ce qui est des pitits zagneaux, naissances pragmatiquement programmées en altitude pour Mars / Avril, en parages plus tempérés comme l'Irlande, Février / Mars. (Vu sur un site sur l'élevage ovin).
La consommation cultuelle de viandes "de lait" correspond bien à la symbolique de Beltaine. :)

Pour les carnassiers (plus sauvages que les guerriers :lol: ), nous entrons dans la symbolique du "domaine sauvage", sylvestre (le chat :roll: ), le texte de Guilaine que j'ai mis à ce propos (mais où ???) est signifiant dans ce sens.
Je pense que ce serait aller "chercher midi à quatorze heures" d'y voir une référence au "maître des animaux" mais leur association à un domaine mortuaire est peut-être judicieux.
Soyons prudents... :wink:

Retrouvé le texte de J. Guilaine mais brut d'OCR. :?
Virilité /féminité.~
une inversion des symboles :

On voit donc que la période qui s’étire entre — 3500 et —2000 voit peu à peu émerger l’image du mâle et de son espace, à la fois réel et idéologique, qui s’oppose, de façon structurelle, à celle de la femme dont la sphère est davantage orientée vers la maison, le tissu familial, la reproduction. Le guerrier est pourvu prio-ritairement du poignard — de silex puis de métal — qui est l’arme fétiche de cette époque. Il porte toujours, en héritage des temps antérieurs, l’arc, les flèches, la hache. Mais les améliorations techniques ont fait leur oeuvre les flèches ont atteint une perfection jusque-là inégalée, la hache de cuivre a remplacé la lame de pierre. L’archéologie témoigne de cette ascension du guerrier. C’est un homme en armes qui est représenté sur les statues masculines, premières manifestations de la statuaire européenne. Parallèlement, les fortifi-cations enferment de plus en plus les établissements dans un espace protégé. Les flèches (et donc les arcs) connaissent une circulation sans précédent. Surtout, les signes de la masculinité s’affichent jusque dans les lieux les plus reculés de la nature armes et chasses au cerf sont gravées sur les plus hauts sommets comme sur les blocs des forêts profondes.
On ne manquera pas, pour terminer, d’observer une certaine contradiction dans la manipulation symbo-lique (fig. 52). Si le mâle s’épanouit dans l’espace non anthropisé, s’il appose sa griffe dans la nature la plus sauvage, il le fait par le biais d’armes, c’est-à-dire de productions techniques plus ou moins sophistiquées, d’artefacts culturels. On assiste donc à une appropria-tion de la nature par l’homme, lui-même codé par des signes spécifiques.
À l’inverse, la femme est d’abord louée pour ses fonctions biologiques c ‘est son anatomie qui est prio-ritairement signalée sur les statues-menhirs et plus particulièrement les seins, symbole maternel et nour-ricier. Reproductrice, allaitante, elle est une certaine image, depuis toujours, de la Nature. Or son espace de prédilection, depuis les débuts du Néolithique — voire auparavant — est la maison, l’habitat, le champ, c’est-a-dire l’espace le plus anthropisé, le plus transformé par la société, le plus culturel qui soit. On atteint donc à cette époque, et désormais pour longtemps, les limites de l’inversion. L’homme exprime, avec des outils fortement culturels, sa maîtrise de l’espace le moins humanisé, celui du périphérique, du sylvestre. de l’inconnu, du non-limité où il peut donner libre cours à sa virilité et à ses prouesses. La femme, dont on perçoit prioritairement la fonction naturelle, sau-vage, spontanée. évolue dans la sphère du domestique, de l’anthropique, de l’humanisé, du fermé. L’inversion est totale l’homme avec des outils culturels achève ou reproduit la conquête du sauvage; la femme, toujours empreinte de naturel, d’affectif. de spontané, occupe l’aire la plus modifiée par l’action humaine.


Oualà, c'est important parce que Beltaine est très féminin. :wink:

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 19:56
de Hadañ drailh
gérard a écrit:Il me semble qu'il y a forcément un décalage entre nord magnétique et nord géographique

Normalement, sur ta carte IGN du site, ce décalage (déclinaison) doit être indiqué dans la marge. Y a pas d'ex-scouts ici? :wink: Je n'ai pas d'ordre d'idée de combien de ° il peut être, mais ça peut avoir son importance, surtout si l'on veux être précis par rapport à un repère solaire.

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 20:41
de gérard
Au 01 / 01 / 1994 la déclinaison magnétique était pour la carte 1/25000
IGN Veyre-Monton de 1°58', soit presque 2°. Comme elle diminue de 8' par an, si la mesure a été prise en 2004, elle n'est plus que de 40' : négligeable je pense.

Le pied attique est-il le même que le pied grec ancien?
C'est le "Bailly" qui dirait pied attique 29 cm et quelques.
Mais ça n'a pas d'importance pour nous en fait.

Je trouve environ 65° pour le côté nord du fanum nord laténien
et 68° pour le côté nord du fanum sud.
C'est très important, je peux déjà affirmer que le côté Est n'est pas orienté vers le lever du soleil au solstice d'été (il faudrait environ 55°).
Quel relief vers l'est? L'Allier et sa vallée? Je regarde et vérifie.
Mais il me semble , à vue de nez et en consultrant tout de même mes archives, que les côtés Est regarde le lever du Soleil mettons en avril et mai: ça confirmerait pour la consommation d'agneaux.
Je ne sais plus pour le 2e stade de Gournay, je regarde.
A+
Gérard

MessagePosté: Dim 09 Jan, 2005 20:45
de gérard
Voilà: pour Gournay, 1ere quinzaine de mai (aussi!)

Gérard