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Il est arrivé !

MessagePosté: Mer 09 Jan, 2008 16:01
de Adcanaunos
Le rapport des fouilles de Corent 2007 est disponible en téléchargement sur le lien suivant :

http://www.luern.fr/Rapports.htm

Une livraison plus volumineuse que d'ordinaire : plus 170 pages de texte et de figures, ainsi qu’une centaine de pages d’annexes, correspondant au rapport final d’opération (RFO) des trois dernières campagnes consacrées à l ‘exploration des quartiers de l’oppidum périphériques au sanctuaire.

Image

Extrait de l'intro :
Après avoir démontré l’existence, au nord du sanctuaire laténien fouillé en 2001-2005, d’habitats à caractère aristocratique ordonnés au sein d’un système urbain cohérent, la fouille a confirmé l’étendue et la complexité de ce quartier, qui a livré bien d’autres surprises.
Cette dernière année de fouille répond notamment à deux interrogations majeures laissées en suspens par la précédente campagne.
La première visait à établir la nature et la fonction des espaces de circulation identifiés à l’est du chantier, bordés de structures artisanales organisés le long d’un espace de voirie. Elle a montré qu’ils appartiennent à un ensemble beaucoup plus vaste, constitué d’une place entourée de grandes halles à vocation artisanale et commerciale. L’identification et la fouille quasi-exhaustive de ce complexe, l’identification de ses différentes activités, exercées par des corps de métiers très variés (artisans métallurgistes, monétaires, bronziers, bouchers, tablettiers) et son évolution dans le temps marquent le point d’orgue de ce programme triannuel.
La proximité de ces structures avec le sanctuaire attenant soulevait également la question de l’articulation chronologique et fonctionnelle des espaces publics et privés, religieux et profanes, constitutifs du centre de l’oppidum. Exploré sur une surface atteignant près d’un hectare, ce quartier présente des zones d’activité bien distinctes et bien délimitées sur le plan architectural. La stricte organisation et la complémentarité des vestiges témoignent d’un cadre urbain parfaitement maîtrisé, dont le centre monumental présente toutes les constituantes fonctionnelles d’un forum romain ─ places publiques, halles artisanales et commerciales, lieux de culte et parcelles d’habitat. La comparaison avec d’autres chefs-lieux de Cité contemporains confère à cet espace un rôle de tout premier plan dans les processus d’urbanisation du territoire arverne.
L’importance de ce centre-ville se signale également par les quantités considérables de mobilier qu’il a livrées : plus de 16,5 tonnes pour la seule fouille 2007, soit le double de 2006 (8,4 tonnes) et du total cumulé de l’ensemble des campagnes 2001 à 2005 (7,8 tonnes). Ce mobilier se distingue à la fois par son abondance et par sa qualité : outre divers marqueurs aristocratiques, comme l’armement, les pièces de char ou les ustensiles de toilette, ce quartier a livré des parures en métaux précieux, du matériel d’écriture, d’éclairage, de chirurgie et d’autres objets exotiques importés du monde gréco-romain, qui témoignent du très fort degré d’acculturation des occupants de ces vastes demeures aménagées à la romaine (cour interne, toits en tuiles, sols en dur). Leur étude en cours a permis d’affiner la chronologie de l’oppidum, caractérisé par une longue séquence d’occupation rythmée par plusieurs états de reconstruction et de réfection échelonnés entre le troisième quart du IIe et le milieu du Ier s. av. J.-C.


Pour ceux que l'archéologie en général, les trous de poteau en particulier rebutent, passer directement à la page 111 !

Une synthèse "allégée" des résultats sera bientôt en ligne, en attendant une publication prochaine dans des revues et des ouvrages grand public.

Bonne lecture !

MessagePosté: Mer 09 Jan, 2008 17:26
de Patrice
Salut,

Excellent, rien que pour ça:

du matériel d’écriture


Héhé.

A+

Patrice

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 17:53
de Sedullos
Salut à tous,

Merci Adcanaunos :D

Les scalpels et la bague sont intéressants aussi.

Je note aussi uen précision sur les chiens de guerre de Bituit : des chiens-loups ! S'agit-il d'une métaphore ou de l'ancêtre du berger allemand 8)

Re: Il est arrivé !

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 18:19
de Muskull
Bonjour et merci Matthieu.
J'ai lu et vu un peu en diagonale mais j'y reviendrai car il y a beaucoup, beaucoup de choses très intéressantes et de plus mises en relation avec les découvertes sur d'autres sites.
Par rapport à l'écriture:
Adcanaunos a écrit:Au premier rang d’entre eux figure le matériel d’écriture : au moins deux stylets en os de typologie précoce,
découverts parmi les épandages de l’espace D, et deux boîtes à sceau en forme de bourse, caractéristique
du Ier s. av. J.-C., ont été recueillis dans des niveaux contemporains des empierrements du corps de
bâtiments A. Ces objets, attestés sur de très rares sites de Gaule interne (Lyon, Toulouse), attestent une
maîtrise et d’un usage courant de l’écriture grecque ou latine qui s’illustre, à défaut de tablettes de cire
conservées, sur des graffiti tracés à la pointe sur des tessons issus du même horizon.
page 128.
Stylets d'os sur tablettes préparées à la cire donc. Ce qui induit un usage à court terme et sans doute dans un contexte commercial (ce n'est pas très précis dans le rapport ou alors j'ai mal lu :oops: )
Si par exemple un tel stylet avait été découvert dans une maison aristocratique (en dehors des intendances), le sens aurait été différent.
Je note aussi que le passage de la tablette "cirée" à la feuille de plomb participe de la même technique, seule la volonté de conservation est différente. La gravure sur la terre avant cuisson est aussi similaire mais il n'est, semble-t-il, venu à l'idée de personne d'écrire un poème sur une plaque d'argile et de la cuire, dommage.

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 18:29
de Alexandre
Si je me réfère à l'exemple grec, les plaquettes d'argile n'étaient pas destinées à être cuites... C'étaient des archives pour deux ou trois ans, après quoi on les remodelait pour faire de nouvelles archives.
Celles qui nous sont parvenues ont brûlé dans des incendies.

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 18:56
de Muskull
Alexandre a écrit:Si je me réfère à l'exemple grec, les plaquettes d'argile n'étaient pas destinées à être cuites... C'étaient des archives pour deux ou trois ans, après quoi on les remodelait pour faire de nouvelles archives.
Celles qui nous sont parvenues ont brûlé dans des incendies.

Oui Alexandre, c'est ce que j'avais à l'esprit en écrivant: les conservations accidentelles de "cahiers de comptes" mais pas de contes. :wink:
Par contre, pas bien loin et depuis longtemps, on "cuisait" les écrits pour les conserver et cette idée fut très heureuse pour nous.
Les celtes sont restés "crus". :D

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 19:00
de DT
Salut à tous,
Tiens, revoici du Cl. lévi-Strauss. :wink:
A+

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 23:20
de Pierre
Merci Adcanaunos,

Je viens de voir ça en diagonale. Eune ch'tite question, quelle datation pour les "peintures" de la structure C4 ?

@+Pierre

Re: Il est arrivé !

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 23:22
de Adcanaunos
Muskull a écrit:Stylets d'os sur tablettes préparées à la cire donc. Ce qui induit un usage à court terme et sans doute dans un contexte commercial (ce n'est pas très précis dans le rapport ou alors j'ai mal lu :oops: )
Si par exemple un tel stylet avait été découvert dans une maison aristocratique (en dehors des intendances), le sens aurait été différent.


Petite précision : les stylets ont été découverts devant l'entrée principale de la grande demeure aristocratique B, à quelques cm de la lunule en or illustrée en couverture du rapport. L'usage de ces accessoires, rarissimes en Gaule avant la conquête, renvoie certainement aux plus hautes sphères de la société indigène, qui a pu utiliser des tablettes pour sa correspondance publique et privée. Dans l'hypothèse (tout aussi probable mais indémontrée en l'état) selon laquelle des négociants romains auraient séjourné sur le site, l'usage commercial n'est pas à exclure.

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 23:31
de Adcanaunos
Quant aux fragments de torchis "peints" (badigeon de rouge) du bâtiment-atelier C4 : ils proviennent d'une grande fosse datée de l'état Ib, scellée par les empierrements du second état et par conséquent, forcément antérieure aux années 70 av. J.-C. L'existence de parois peintes en contexte aristocratique correspond à une réalité désormais bien établie, que l'on commence à peine à entrevoir : des décors polychromes géométriques, formés de lignes et de de rosaces, ont été révélés par les fouilles de l'INRAP sur l'A19 à Batilly-en-Gâtinais, dans un bâtiment de statut et de datation comparables à ceux de Corent. Ce n'est assurément qu'un début. Mais on se heurte là à un problème de conservation, la durée de vie des parois en terre crue étant bien inférieure à celle des enduits au mortier utilisés pour les peintures romaines...

MessagePosté: Jeu 10 Jan, 2008 23:52
de Pierre
Merci de ta réponse 8)

La question avait été posé il y a quelques jours sur ce forum....

Je vais attaquer la lecture à partir de la page une. Mais prévoir des délais. Je suis en train d'entamer la lecture d'un magnifique sujet intitulé "Religion et société à la fin de l'âge du fer - Systèmes (en)clos et logiques rituelles", qui m'a l'air bien interessant :wink:

@+Pierre

MessagePosté: Ven 11 Jan, 2008 0:00
de Adcanaunos
Pierre a écrit:Je suis en train d'entamer la lecture d'un magnifique sujet intitulé "Religion et société à la fin de l'âge du fer - Systèmes (en)clos et logiques rituelles", qui m'a l'air bien interessant :wink:


Drôle de titre... N'est-ce pas un peu indigeste, pour une lecture de chevet ?

MessagePosté: Ven 11 Jan, 2008 0:20
de Pierre
Je vais quand même prendre le risque,

Si ça refile des insomnies, je pourrais du coup le lire d'une traite :lol:

@+Fourbos...

MessagePosté: Ven 11 Jan, 2008 0:20
de Sedullos
Salut,

Adcanaunos a écrit:Cette dimension politique s’exprimait par de grands rassemblements à caractère festif et vraisemblablement électoral, ainsi que par une activité de frappe monétaire exercée dans le sanctuaire ou à proximité immédiate, placés par nature sous l’autorité de ses plus hauts dirigeants. Il a également été observé que deux des principaux
aménagements liés à ces pratiques, à savoir les cuves libatoires et un dispositif d’accrochage des victimes sacrificielles, étaient placés dans l’axe de l’entrée, de sorte à ce qu’elles soient visibles de l’extérieur du
téménos. Les portes du sanctuaire sont surmontées d’un porche monumental qui culminait à plus de 10 m de haut, pourvu d’un étage supérieur d’après la nature des éléments d’assemblage en fer retrouvés dans ce secteur (mémoire inédit F. Blondel). Ce dispositif était orné de symboles à caractère dynastique, des crânes de carnassiers rapprochés de l’iconographie des monnaies « au renard » frappées sur le sanctuaire,
associés à une multitude de petits objets (jetons, monnaies) liés aux pratiques de représentation collective. Sans qu’il soit possible de le démontrer, cette tour-porche a pu être utilisée par les maîtres de cérémonie à la manière d’une tribune, pour s’adresser à une foule nombreuse réunie sur l’esplanade qui lui faisait face :
inscrite dans la perspective visuelle du trapèze formé par les deux bords convergents de la place, cette « scène » constituait le point de focalisation, au sens propre, d’un cérémoniel aux rites très chorégraphiés,
où le premier rôle revenait aux classes dirigeantes en charge de la redistribution des richesses. Cette dimension scénographique donne tout son sens au terme de theatron utilisé par Poseidonios d’Apamée pour
qualifier le cadre de ces grands banquets à caractère liturgique, auquel fait écho celui de skénè utilisé par Phylarque dans le même contexte (Poux 2004). Elle vient conforter le lien, pressenti sur différents sites
(Lyon, Tintignac, Javols, sanctuaire de l’Altbachtal près de Trèves) entre enclos communautaires d’époque laténienne et dispositifs scénographiques d’époque romaine, parfaitement illustré par l’exemple de
Ribemont-sur-Ancre : en face du sanctuaire du IVe siècle, dans le prolongement de l’esplanade trapézoïdale, est édifié un grand théâtre romain dédié aux rassemblements publics (Poux 2005).


Tout ce passage ouvre des perspectives étonnantes, je pense à Tintignac en particulier, où les vestiges du théâtre sont à quelques dizaine de mètres de l'endroit où a été enfoui le "trésor" d'armes et de carnyx

MessagePosté: Ven 11 Jan, 2008 0:34
de Adcanaunos
Le parallèle avec Tintignac ne m'avait pas échappé, lorsque j'avais évoqué cette question à propos des enclos et théâtres de Lyon-Fourvière . Ma visite du site (bien-nommé "Les Arènes" !) de Tintignac avec Chr. Maniquet m'a conforté dans l'idée que la configuration des lieux se prêtait idéalement à des rassemblements nombreux : une cuvette naturelle aux bords peu distants, reconvertie à l'époque romaine en véritable théâtre-tribune...

Pour plus de développements, voir mon intro de l'ouvrage d'A. Desbat, Lugdunum, naissance d'une capitale, Ed. Infolio-Département du Rhône, Lyon-Gollion 2005.