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MessagePosté: Lun 25 Aoû, 2008 19:04
de Muskull
J'ai essayé de maximiser la dernière photo pour la lecture:
Cliquer dessus pour l'agrandir. :wink:

MessagePosté: Lun 25 Aoû, 2008 19:57
de André-Yves Bourgès
Aeruuan a écrit:Je ne sais d'ou il sort cette interpretation, et je serai bien curieux de le savoir. Maintenant j'attend qu'on me prouve le contraire.

Si c'est votre voisin vous pourriez peut etre lui demander?


je n'y manquerai pas, mais sa source figure explicitement dans le texte de J.-C. Cassard : il s'agit du poème d'Ermold. Cette source est accessible
ici ; on trouvera une traduction, un peu trop "littéraire" au demeurant, du chant III, essentiellement consacré à l'affaire Murman.

Tout historien doit procéder à la critique de ses sources : en ce qui concerne Ermold, il faut d'abord constater qu'il n'y a aucune évidence qu'il ait participé personnellement aux négociations avec Murman puis à l'expédition contre le chef breton ; que ce chapitre comme l'ensemble de son poème est avant tout un éloge des Francs et de leur Empereur ; qu'Ermold bien sûr partage les préjugés de son temps, notamment à l'égard des femmes (voir la peinture qu'il fait de l'épouse de Murman), etc. , etc. Son ouvrage est un témoignage essentiel pour connaître la société du IXe siècle ; mais il nous renseigne avant tout sur les mentalités et les représentations, beaucoup plus que sur les réalités et les faits.

Effectuer cette critique textuelle demande beaucoup plus de temps que celui que je puis consacrer à ce fil de discussion : relever les grossières erreurs matérielles chez Ermold (ex. : il situe Vannes non loin de l'embouchure de la Loire) n'apporterait rien, car elles peuvent avoir partagées par les Francs qui participèrent à la dite expédition et qui ont été ses informateurs ; mais je serais heureux si mon message pouvait convaincre de l'intérêt de retouner, ici comme ailleurs, à la source.

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Lun 25 Aoû, 2008 22:38
de Aeruuan
Quel bonheur pour moi d'echanger avec vous.

Agraes, merci beaucoup pour ces documents c'est dement! Aurais tu d'autres docs sur ces torques draconaire?
Le scian doit etre d'environ 40cm si je ne m'abuse? Une idée visuelle de la garde?

André Yves, merci beaucoup!
Je me retrouve donc dans une impasse car je ne suis pas armé pour travailler sur un texte comme celui la car ce n'est pas mon metier.
Je constate qu'il parle bien de boucliers aux couleurs sombres contre les blancs des francs mais il est parait clair que l'on rentre plus dans une allegorie politique qu'une realité.
Aaaah misère!!!!
Il dit bien aussi que Murman dispose d'une armure sur tout le corps mais ca va à l'encontre de sa fonction de cavalier leger comme l'a dit Agraes!

l'impasse total!

J'ai retrouvé ce topic sur le noir, c'est toujours ca!

http://guerriers-du-moyen-age.aceboard. ... r-noir.htm

Sur le meme site j'ai trouvé ca:

"La galle du chêne: "La noix de galle est également une source riche en tanin. Elle permet d'obtenir avec du fer de très beaux bleus lavés mais également des violets bruns mats ainsi que des noirs profonds."
L'écorce de chêne : "L'écorce de chêne est une des sources végétales les plus connues pour le tanin et donnent donc de belles couleurs tannées qui virent vers un noir bleuté corbeau en présence de sels de fer."

Je crois que ca sort d'un petit bouquin, j'aurais la reference un peu plus tard.

Mais je crois qu'il sagit d'un siecle plus recent que le 9eme et je ne sais pas si pour vous cela a de la valeur.

MessagePosté: Lun 25 Aoû, 2008 22:54
de André-Yves Bourgès
André-Yves Bourgès a écrit: en ce qui concerne Ermold, il faut d'abord constater qu'il n'y a aucune évidence qu'il ait participé personnellement aux négociations avec Murman puis à l'expédition contre le chef breton


En revanche, Ermold nous dit (au chant IV) avoir porté le bouclier sur l'épaule et l'épée au côté lors de la seconde campagne contre les Bretons sans avoir cependant l'occasion de se battre, ce pourquoi il s'attira les moqueries de Pépin (le roi d'Aquitaine), raillant cet "intello" qui veut jouer au petit soldat :
Huc egomet scutum humeris ensemque revinctum
Gessi ; sed nemo me feriente dolet.
Pippin hoc aspiciens risit, miratur, et infit :
"Cede armis, frater : litteram amato magis"


Ce détail autobiographique confirme que le militaire et Ermold, çà faisait deux !

Merci à Erwan, qui m'a donné l'occasion de relire le Carmen in honorem Hludowici Christianissimi Caesaris Augusti après toutes ces années !

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Lun 25 Aoû, 2008 23:09
de Agraes
Pour la teinte, je peux en parler avec une collègue reconstitutrice spécialiste en textiles. Je sais que la couleur noire est un sujet récurrent dans nos débats.

On a plusieurs exemples de torques romains tardifs représentes sur les mosaïques, par exemple les empereurs avec leurs gardes, et je connais une pièce archéologique, il s'agit de ce torque "byzantin" du VIe siècle conservé au British Museum :

Image

On a notion dans l'armée romaine tardive d'une distinction de torquatus, le soldat recevant un torque d'or pour le récompenser. Ammien Marcellin mentionne également un épisode de la vie de l'empereur Julien où ce dernier est couronné par un de ses draconnaires avec un tel torque - le draconarius, porte-enseigne de la cohorte tardive, ayant cette distinction de torquatus.
Je digresse, mais on peut se demander si l'usage des torques chez les Bretons au VIe siècle (par exemple mentionné dans Y Gododdin) est hérité d'une tradition purement celtique, ou militaire romaine. Peut être un peu des deux ?

Le scian doit etre d'environ 40cm si je ne m'abuse? Une idée visuelle de la garde?


Je dirai simple manche en bois, os ou corne comme pour un couteau ou un seax. Ici en B le manche orné en os d'un couteau retrouvé au crannog de Lagore en Irlande et daté du VIIe siècle :
Image

Il dit bien aussi que Murman dispose d'une armure sur tout le corps mais ca va à l'encontre de sa fonction de cavalier leger comme l'a dit Agraes!


Je ne pense pas que ça soit foncièrement incompatible. Le cavalier léger reste porté par son cheval et peut donc se permettre d'avoir une protection corporelle supplémentaire. A forciori s'il s'agit d'un roi, qui a les moyens de se payer une armure. Pour un fantassin qui se bat en embuscade, c'est différent, une cotte de mailles risquerait de l'handicaper, même si un casque reste à mon avis acceptable.
Le cavalier est plus "léger" parce qu'il attaque à distance et qu'il évite la charge que par son équipement.

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 1:30
de Aeruuan
Ah la vache! merci Agraes.

André Yves, tout le plaisir est pour moi! J'ai enfin le texte d' Ermold le noir dans ma banque de données. Merci!

On peut y aller en mettant en place un personnage, un cavalier, avec une armure lamellaire donc? Une spatha? un scian (allons y gaiement) un epieu ou lance? et des javelines? Ces javelines je peux les colorer à la mode romaine?
Par contre Ermold dit que Murman est recouvert sur la tete et toute les parties du corps par une armure de fer. A ton avis Agraes? Une maille?


J'ai trouvé ca pour ceux qui savent lire le gallois mais il y a sans doute mieux. C'est Culhwch ac Olwen dans le Llyfr Gwyn Rhydderch et le Llyfr Coch Hergest, si je me trompe pas
Peut etre que ca pourra faire avancer ce qui concerne ce glaive epieu ou autre?

http://www.rhyddiaithganoloesol.caerdyd ... 4&page=79v

http://www.rhyddiaithganoloesol.caerdyd ... &page=200v

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 9:45
de Agraes
La lamellaire est sans doute à éviter pour cette zone géographique. La coloration des hampes, c'est typiquement antique tardif et ça ne se retrouve pas plus tard à ma connaissance.
Une "armure de fer" pour l'époque c'est soit de la maille soit une broigne à écailles, là tu as le choix. Un haubergeon de mailles peut protéger les bras jusqu'aux coudes et tomber jusqu'à mi-cuisse (des versions plus longues existent déjà dès l'antiquité tardive cela dit). La tête peut être protégée par une cervelière, simple calotte métallique rivetée très en vogue à l'époque carolingienne.

Pour quelques idées, ici le Psaultier Doré où figurent des combattants de l'époque carolingienne :
http://collectif.francs.free.fr/forum/v ... p?f=8&t=53

Elle est par exemple figurée sur ce soldat :
Image

Ici avec un renfort sur la nuque.

La pièce archéologique qui va bien :
Image

N'oublie pas le bouclier, lenticulaire ou plat.

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 13:05
de Kambonemos
Bonjour,

Aeruuan, il ne faut pas trop se focaliser sur le terme "glaive" qui comme je le rappelle pouvait désigner au Moyen-Age, une lance ou un épieu de guerre à large fer ; je pense que l'exemple de combattant transmis par Agraes peut donner une bonne idée de cette arme, courte et solide et que nous appelerions aujourd'hui tout simplement "lance"... Dans une autre psautier, celui d'Utrecht (IXe s.), les fantassins légers de l'époque sont équipés d'autres "glaives" : des lances plus longues _ que j'identifie mais peut-être me trompé-je _ comme étant des lances à ailerons destinés à parer les coups d'épée et dont le maniement pour cette raison, était sans doute plus "technique"...

Cordialement.

@+

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 15:14
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Si Ermold connaît ses classiques, comme on le voit à propos de ses références à l'Enéide, il donne peut-être au terme fucatus son sens initial de "teint, colorié (en rouge)" qui se retrouve notamment chez le poète Horace à propos du fard à base d'excréments de crocodile (sic!) dont se servait l'une de ses maîtresses (le passage complet est ici, avec traduction).

Des boucliers rouge-brun, voilà qui vous a une autre gueule que du noir qui, si j'ai bien compris, ne serait pas vraiment noir !

Au fait, la première traduction des scuta fucata par "boucliers noirs" se trouve sous la plume de La Borderie, à qui l'ont repris depuis la plupart des historiens de la Bretagne. Sacré La Borderie ! Jamais en peine d'un petit coup de pouce pour faire dire à sa source ce qu'elle ne dit pas ! Bientôt le gwenn ha du au temps des Carolingiens !

Bien cordialement,

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 16:28
de Aeruuan
salut Agraes, salut Kambonemos, salut André Yves, merci beaucoup encore une fois vous etes vraiment d'une aide plus que precieuse.

Lamellaire à proscrire donc, mais sous reserve apparement! donc plutot une maille relativement longue. La lance je garde et d'ailleur on trouve dans le psautier doré, des lances d'ecrite par kambonemos.

Agraes, que pense tu de l'influence sarmates sur les Bretons?
J'aimerais avoir ton avis aussi sur une datation sur le casque dit de saint bernard, rien à voir avec le chien...oui bon d'accord je sais c'est nul!
Le casque de la truchère, et le casque de chalon? je n'arrive pas à trouver une date sur ces pieces. Ces casque sont à paragnathydes?
je garde le couteau irlandais, trop beau et trop caracteristique pour ne pas l'utiliser afin de rajouter une touche "autochtone".
Le torquatus.
La fibule pennanulaire
Et les vetements sombres par defaut, desolé André Yves.

Bouclier rond, teinté rouge brun??? ca c'est une nouvelle! et en effet superbe d'un point de vue artistique egalement, hummm je sens que je vais me regaler.
Et en effet sacré Borderie!!! le petit malin!

Les motifs à consonnance tene tardive. Et une coupe de vetements à la carolingienne.
Il me manque tout de meme les boucles de ceintures et baudriers mais je pense que je vais trouver. Les braies, dans les differents psautiers surtout le doré, on apercois une sorte de jarretiere et des guetres qui "depasse" de bandes molletieres.
Pour le cavalier, une maille longue ou d'ecailles et un casque (encore a definir selon moi) et pour le fantassin une cerveliere classique avec protege nuque en toile je dirais. Plutot une broigne ou un gambison peut etre? sinon rien que les vetements.
Voilà en gros ou j'en suis dans ma petite tete, mais il reste encore des details à paufiner.

J'ai trouvé ce lien sur differents psautiers. Celui de charles le chauve, la couv' (si je peux me permettre) est particulierement belle, dommage qu'on ne puisse pas mieux la voir:

http://www.everyoneweb.fr/438-987/index ... untID=K464

Il me manque le psautier de stuttgart

J'ai trouver ca sur la reine Aregonde et sur le textile, je met le lien:

http://www.encyclopedie-universelle.com ... 201-3.html

C'est un site formidable on trouve beaucoup de chose y compris sur le cuir ou le bois, bref un lien precieux!

Dans les manuscrits de Durrow il y a une magnifique croix typiquement irlandaise. à mediter. sinon pour les motifs il y a encore lindisfaire. Pour des bretons d'une chretienté plutot insulaire ca serait pas mal non? La gamme de couleur utilisé est jaune et une dominante rouge avec variante pourpre mauve et sa complementaire, ponctuel sur les enluminures, le vert et le bleu (glas quoi!).
Humm encore une fois artistiquement l'idée est plus que seduisante, ca jete grave!
on peut y consulter aussi les reliques de st germain. Ce sont des chausses et des chaussures brodés et oui! Et surtout il parle d'un cuir...noir !!! Je vous jure 'y suis pour rien.

http://www.encyclopedie-universelle.com ... abit2.html

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 17:10
de Agraes
Agraes, que pense tu de l'influence sarmates sur les Bretons?


Du mal ! Voir ici :twisted:
http://www.forum.arbre-celtique.com/vie ... php?t=4628

Je reviens encore sur le torque, celui présenté ci dessus est du VIe siècle donc un peu précoce ! Peut être peux tu le "cacher" en partie sous un manteau par exemple pour éviter d'avoir à trop détailler un accessoire controversé tout en l'incluant quand même.

Pour les vêtements, ton cavalier peut avoir des habits plus riches en couleurs, contrastant avec la tenue "camouflage" du fantassin embusqué...
A noter que des tissus "à carreaux" ou chevrons sont tout à fait acceptable pour un manteau par exemple, il s'agit d'un type de tissage très répandu dans l'antiquité et le moyen âge et pas du tout restreint aux Celtes d'ailleurs. Bien sur il faut éviter de partir dans le très moderne tartan écossais :D

Ton fantassin peut très bien être non armuré, au contraire ça évitera qu'il ait l'air "trop lourd".

J'aimerais avoir ton avis aussi sur une datation sur le casque dit de saint bernard, rien à voir avec le chien...oui bon d'accord je sais c'est nul!
Le casque de la truchère, et le casque de chalon? je n'arrive pas à trouver une date sur ces pieces. Ces casque sont à paragnathydes?


Les spangenhelms dits "à équerre" sont pour la large majorité datés entre le Ve et le VIIe siècle, donc exclus ici. Nous portons ce genre de casque en reconstitution pour des Bretons de l'an 500, mais pour un guerrier continental du IXe siècle le style de casque le mieux representé reste la simple calotte rivetée type cervelière, éventuellement agrémentée d'un couvre nuque en mailles ou cuir. Je ne connais pas non plus d'exemples ou de représentation de casque avec des paragnathides à cette période (à part chez les Anglo-saxons avec le casque de Coppergate daté du VIIIe siècle). Le spangenhelm conique à nasal apparaît je pense plus tard, avec l'arrivée des normands, il pourrait convenir pour du Xe siècle mais je ne pense pas pour du IXe siècle.

Quand au "pseudo-morion" carolingien représente sur l'iconographie, il faut s'en méfier. Il s'agit d'une convention artistique datant de l'époque romaine, sans trouvaille archéologique attestant un tel type de casque mit à part peut être ceux des gladiateurs au demeurant censés être des parodies des casques de l'époque. De nombreux artistes ont tout de même choisi de représenter ce casque, et j'ai même pu en voir quelques reproductions. Je pense que le plus sage serait de se cantonner à une cervelière, éventuellement avec un couvre nuque en mailles couvrant les tempes, avec des bandes de renforts peut être dorées, et à la rigueur une crête comme illustrée sur les manuscrits, en bois ou cuir bouilli peint... Peut être une convention artistique là encore mais je pense que tu peux te le permettre déjà plus facilement que le "pseudo-morion".

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 18:21
de Muskull
Aeruuan a écrit: Et surtout il parle d'un cuir...noir !!! Je vous jure 'y suis pour rien.

http://www.encyclopedie-universelle.com ... abit2.html

Salut graphiste,
Je disais un peu plus haut que le cuir était plus facile à teinter que laine ou lin en "très sombre" avec les "moyens du bord" de l'époque.
"La galle du chêne: "La noix de galle est également une source riche en tanin. Elle permet d'obtenir avec du fer de très beaux bleus lavés mais également des violets bruns mats ainsi que des noirs profonds."
L'écorce de chêne : "L'écorce de chêne est une des sources végétales les plus connues pour le tanin et donnent donc de belles couleurs tannées qui virent vers un noir bleuté corbeau en présence de sels de fer."

Effectivement, rien ne dit dans les textes que cette chimie était connue à l'époque qui te concerne mais c'est possible "accidentellement" dans l'atelier d'un forgeron. :wink:

MessagePosté: Mar 26 Aoû, 2008 19:10
de Muskull
"Lugubre" est-il noir ?
A l’occident des Ordovikes, et très près de la côte, était située la petite île de Mona. Âpre, inculte, d’un aspect lugubre et affreux[14], Mona avait été choisie depuis des siècles par les druides pour le siège lé plus secret de leur culte. Le haut collège du sacerdoce y résidait, et les collèges inférieurs des prêtres et des prêtresses, échappés aux massacres de la Gaule et à ceux de l’est et du midi de la Bretagne, accouraient de toutes parts s’y grouper autour de leurs pontifes[15] ; ils formaient un conseil suprême, en rapport avec les peuples confédérés de l’ouest et dirigeant leurs opérations. De là partaient des ordres, des prédictions, des encouragements, des menaces, tout ce que le fanatisme de la croyance peut ajouter à celui de la patrie et de la liberté. Là sous de vieux chênes consacrés, sur d’informes autels le sang humain ruisselait chaque jour, là étaient conduits et gardés tous les prisonniers romains pour y périr l’un après l’autre par le couteau des devins, par la flamme, on dans de plus douloureuses tortures [Tacite, Ann., 14, 30]. Voilà quelle était la situation de la Bretagne libre.

Dans la province le dégoût et l’irritation du peuple contre les Romains commençait à se manifester fortement. Les Bretons se soumettaient sans trop de murmures aux enrôlements, aux tributs, aux autres charges de l’empire, pourvu qu’on s’abstînt de les maltraiter. Ce dernier point, ils le supportaient difficilement : assez soumis pour être sujets, ils ne l’étaient point assez pour être esclaves [Tacite, Agricola, 13]. Ils conféraient secrètement entre eux sur les malheurs de leur servitude : ils se racontaient leurs griefs, ils les envenimaient par mille réflexions. Ils ne gagnaient rien par la patience, disaient-ils, que d’aggraver leurs charges, en persuadant qu’ils les supportaient volontiers. Jadis ils n’avaient qu’un roi, aujourd’hui on leur en imposait deux, le lieutenant de l’empereur et son procurateur, dont l’un épuisait leur sang, l’autre leurs biens. La discorde et la concorde des préposés étaient également funestes aux misérables qui en dépendaient ; les satellites de l’un, les centurions de l’autre joignaient l’insulte à la violence : il n’y avait plus rien de sacré pour leur avarice, rien pour leurs débauches. Dans les combats au moins c’était le plus brave qui dépouillait ; ici c’étaient des lâches pour la plupart qui, n’ayant jamais vu l’ennemi, venaient leur enlever leurs maisons, leur arracher leurs enfants, qui les traînaient à la guerre, comme si c’était pour sa patrie seulement que le Breton ne sût pas mourir ; et en effet pourrait il redouter cette poignée de soldats s’il daignait les compter ! Les Germains avaient bien secoué le joug, et pourtant ils n’avaient qu’un fleuve, et non l’Océan pour rempart. Ce qui devait animer le courage des Bretons, c’était le salut de leur patrie, de leurs femmes, de leurs mères ; tandis que les Romains n’avaient de motifs de guerre que la cupidité et leurs vices : ils repartiraient bientôt, comme était reparti leur dieu Jules César, pourvu que les Bretons imitassent les vertus de leurs ancêtres [Tacite, Agricola, 15].

Chez les alliés des Romains le mécontentement n’était pas moindre que parmi leurs sujets, un incident vint le porter à son comble. Prasutag, roi des Icènes, dont les trésors étaient immenses, avait institué l’empereur Néron son héritier conjointement avec ses deux filles, espérant que cette marque de soumission affectueuse mettrait son royaume et sa famille hors d’insulte [Tacite, Ann., 14, 31] : il se trompa. Son royaume fut saccagé par les centurions, son palais parles esclaves de l’empereur, avec tous les excès d’une prise d’assaut. On commença par battre de verges sa femme, Boudicéa[16], et par violer ses filles [Tacite, Ann., 17, 31] ; puis, comme si la contrée entière eût été comprise dans l’héritage, tous les chefs Icéniens se virent dépouillés des biens de leurs pères, et les parents même du roi furent portés sur la liste des esclaves.

Ces atroces exécutions étaient â peine achevées, lorsque, de nouveaux mouvements des insurgés de l’ouest inquiétant plus vivement Suétonius Paullinus, lieutenant de Néron dans la Province, il forma le projet de percer jusqu’à Mona, et d’y anéantir le foyer du fanatisme religieux `et de la. guerre. Après avoir mis en état les forteresses de la Province et s’être assuré de places importantes chez quelques-uns de ses alliés, il partit avec la presque totalité de ses troupes[17].

Des bords de l’Avon, Suétonius marcha à grandes journées, se dirigeant en masse serrée vers la côte des Ordovikes, qu’il atteignit presque à l’improviste, sans s’arrêter à chasser les montagnards, sans vouloir livrer de bataille. Arrivé sur la plage en face de Mona, il fit construire des bateaux plats, tels qu’il en fallait pour une mer entrecoupée de bas-fonds ; il y mit son infanterie sa cavalerie se jeta à la nage, ou prit au gué où les chevaux se trouvèrent avoir pied. Le rivage bordé par l’armée bretonne présentait comme une forêt d’armes et de soldats. Çà et là couraient des troupes de femmes, en appareil funèbre, les cheveux épars, portant dans leurs mains des torches enflammées ; et tout autour, des druides, immobiles, les bras levés au ciel, prononçaient avec solennité d’horribles imprécations [Tacite, Ann., 14, 30].

L’étrangeté de ce spectacle frappa les soldats romains ; à les voir glacés par la peur, sans mouvement, se livrant sans défense aux coups, on les eût dit cloués sur leurs vaisseaux [ibid.] ; mais bientôt se ranimant à la voix de leurs chefs, s’aiguillonnant eux-mêmes, et honteux de trembler devant unie troupe de femmes et de prêtres, ils débarquent, marchent en avant, culbutent les Bretons, et les enveloppent dans leurs propres feux [ibid.]. Tout ce qui tomba entre les mains du vainqueur, druides, prêtresses, soldats, fart égorgé ou brûlé sur les bûchers préparés par eux-mêmes, et la hache romaine commença à faire jour, dans ces vieilles forêts si longtemps inaccessibles, et sous lesquelles tant de sang humain avait coulé [ibid.]. Suétonius jeta les fondements d’une forteresse destinée à garder le pays ; mais il n’eut point le temps de la terminer, car il apprit dans le moment même que tout l’est de la Bretagne était en combustion.

http://www.mediterranee-antique.info/Th ... HG_302.htm

Certaines images durent mais je crois qu'il y a un an ou deux sur ce forum le terme de "lugubre" (noir ?) avait été explicité.

MessagePosté: Mer 27 Aoû, 2008 1:14
de Aeruuan
Muskull a écrit:
Aeruuan a écrit: Et surtout il parle d'un cuir...noir !!! Je vous jure 'y suis pour rien.

http://www.encyclopedie-universelle.com ... abit2.html

Salut graphiste,
Je disais un peu plus haut que le cuir était plus facile à teinter que laine ou lin en "très sombre" avec les "moyens du bord" de l'époque.


Ah non m'sieur Muskull, je suis illustrateur, pas pareil du tout, du tout!!!

Non mais oui pas de soucis j'avais tres bien compris, mais comme je sais que sur le forum que j'ai mis en lien, il y a egalement une polemique autour de la chaussure en cuir noir et donc du cuir teinté en noir...voilà!

Sinon merci pour la lecture de ce soir...PA-SSIO-NANT!!!

Il aurait pu dire glauque Tacite, au lieu de lugubre ca aurait ete plus facile à deviner comme couleur! penible ca!!! :wink:

MessagePosté: Mer 27 Aoû, 2008 10:13
de Sedullos
Kambonemos a écrit:Bonjour,

Aeruuan, il ne faut pas trop se focaliser sur le terme "glaive" qui comme je le rappelle pouvait désigner au Moyen-Age, une lance ou un épieu de guerre à large fer ; je pense que l'exemple de combattant transmis par Agraes peut donner une bonne idée de cette arme, courte et solide et que nous appelerions aujourd'hui tout simplement "lance"... Dans une autre psautier, celui d'Utrecht (IXe s.), les fantassins légers de l'époque sont équipés d'autres "glaives" : des lances plus longues _ que j'identifie mais peut-être me trompé-je _ comme étant des lances à ailerons destinés à parer les coups d'épée et dont le maniement pour cette raison, était sans doute plus "technique"...

Cordialement.

@+


Salut à tous,
Kambonemos, le glaive de Kullwch doit être comme tu le dis un épieu ou une lance mixte tenue ou lancée puisque le texte précise qu'il peut tirer du sang au vent !

En revanche, des ailerons de lance pour parer un coup d'épée, tu es très joueur ! Je pencherais plutôt pour un fonction d'arrêtoir : comme la barre transversale des épieux de chasse qui permet de ne pas trop enfoncer le fer dans l'animal et donc d'arrêter la charge du gibier.

Lebedinsky précise bien que les lances à arrêtoir apparaissent à l'époque des grandes invasions.

Aerruan, j'ai du mal à voir le lien entre la panoplie de Kullwch, guerrier arthurien mythique et celle d'un guerrier du IXe siècle :?: