Pénétrer dans l’engrenage de l’Histoire antique, équivaut immanquablement à des égarements, des probabilités, une « scotomisation ». C’est-à-dire balayer, élaguer, éliminer, obscurcir ce qui est vrai pour ne garder qu’une part de réalité et qui plaît, si ce n’est ce qui est faux.
Parmi les étoiles fixes, le géocentrisme des sept planètes mobiles ou "astres errants" (Lune, Mercure, Vénus, Soleil, Mars, Jupiter, Saturne) et tournants autour de la Terre, avait été défini par Aristote au IV° s. av. J.-C. Elles étaient visibles avec une bonne acuité visuelle et en des cieux plus propices à l'observation astronomique que les nôtres. Il faudra attendre le XVIe siècle de notre ère pour que l'héliocentrisme soit cette conception cosmologique qui prend le Soleil, et non la Terre, comme centre de référence.
Image jeremy-vaulonDouze constellations seront associées à des formes animales ou humaines, sauf la Balance : c’est le zodiaque (
zodiakos), « ou cercle des animaux » pour former l’astrologie telle qu’on l’a connaît de nos jours.
Siècle gaulois et présage de trente années Auetos a écrit:Tout le problème est là… je ne peux vous donner un jour exact. Nous savons juste, d’après Plutarque, que « Quand l’étoile de Cronos [Saturne] que nous appelons Phénons et qui, dans cette île, porte le nom de Nycture, entre dans le signe du Taureau, ce qui arrive après une révolution de trente ans … »
Outre
De la face qui apparaît sur la Lune, c’est aussi Plutarque (v. 46 -125 ap. J.-C.), qui indique dans une autre version
Sur la disparition des oracles, 18, que "Cronos-Saturne-Phénon-Nycture" était retenu prisonnier quelque part dans une des îles du haut de la Grande-Bretagne.
Hypothèse lancée à tout hasard, mais qui pourrait être un début de rapprochement expliquant le cycle astronomique ou "siècle gaulois de trente ans" évoqué par Pline l’ancien au Ier s. ap. J.-C.,
Naturalis Historia, XVI, 250 : — « [...] quae principia mensum annorumque his facit et saeculi post tricesimum annum ».
Les années de présage sont au nombre de trente :
XXX en chiffres romains. Trente ans est aussi à peu près le temps mis par Saturne pour accomplir sa trajectoire, ou révolution, autour du soleil (env. 29 ans et 165 jours). Dieu de la mythologie italique et romaine, il a été identifié avec quelques modifications aux dieux grecs Cronos et le dieu du temps Chronos. A la fade lumière, cet astre est représenté comme un vieillard léthargique, boiteux tenant à la main une faux ou faucille, et d’après l’anneau qui l’entoure, une espèce de cercle formé par un serpent qui se mord la queue (l’ouroboros, cycle éternel de la nature).
Dans les Vosges, à Grand (
Gran, Granno,Granis civitas) s’élevait un centre de culte de plusieurs dieux, véritable lieu saint et de pèlerinage sur le territoire des Leuques et à la limite de celui des Lingons. Vers 310, l’empereur Constantin (272-337) dans un de ses voyages d’Arles à Trêves, y fit un détour pour se rendre au « temple le plus beau du monde » :
templum toto orbe pulcherrimum dédié à Apollon Grannus. L’épisode est relaté dans un panégyrique anonyme, si ce n’est attribué à Eumène, un rhéteur athénien, directeur des écoles d’Autun dans son
Panégyrique de Constantin Auguste, XXI : — « [...]
vous avez vu votre Apollon, avec la victoire qui l'accompagne, vous offrir des couronnes de laurier, dont chacune renferme un présage de trente années : tel est le nombre qui sert à supputer l'âge des hommes, et il est juste que votre existence se prolonge au-delà de la vieillesse de Nestor ». Comme on peut le supposer, cette phrase en latin :
quae tricenum singulae ferunt omen annorum, prête à confusion, et est sujette à réinterprétations. Selon quelques auteurs (Homère, Plutarque, Caton…), Apollon accorde de vivre à Nestor trois âges ou trois générations d'homme (chaque âge était de trente ans). D’autres
auteurs (Aulu-Gelle, Hérodote, Hygin, Ovide… ) ne s’accordent pas et le font vivre trois siècles.
Constantin, qui aurait reçu l’augure par le Sommeil (
somno iussus), régna pendant 31 ans (306-337) aurait donc eu, auprès de ce temple, a défaut de trois générations, la promesse de trente longues et heureuses années (il vivra et règnera encore vingt-sept ans) et mourra à l’âge honorable de 65 ans.
L'empereur, a qui l’on doit la reconnaissance officielle du christianisme, décidera d’abandonner le culte solaire d’Apollon, dieu de la divination et des oracles et aussi celui de Mithra-Sol invictus, le souverain des constellations sacrifiant le taureau, souvent entouré du cercle du zodiaque et aux plafonds de ses sanctuaires ornés d’étoiles. Il aurait aussi vu une croix lumineuse dans le ciel en 312 lors d’une bataille près de Rome, qui serait à l’origine du monogramme du Christ qu’on a appelé le chrisme constantinien (☧).
La légendaire Libaire est vénérée à Grand, où une chapelle a été élevée en son honneur. Il est dit qu’elle a été décapitée en 362 pour avoir voulu faire disparaître toutes traces des cultes portées aux faux dieux, et d’avoir abattu, de sa quenouille, une statue d’or d’Apollon.
C’est aussi à Grand qu’on retrouvera des
tablettes zodiacales importée en ivoire, aux figures animalières d’astrologie égyptienne.
Et dans les premiers monastères occidentaux, tel celui de Landévennec, on retrouve aussi les enluminures des Evangéliaires aux figures anthropozoomorphes d’inspiration égyptienne, des Saints dardant leur foi comme douze rayons ou douze heures. On y trouve aussi quelques remarquables traités de médecine, de comput et d’astronomie, pour certains reproduisant des originaux antiques.
Ouf ! Tout cela pour en revenir à la gastronomie et aux
pratiques rituelles dans le sanctuaire de Corent, où les animaux locaux d’eau, d’air ou de terre, étaient au menu.
Et tenter d'éluder en l'honneur de quelle (s) divinité (s) ?!