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Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Lun 24 Mar, 2014 22:49
de Matrix
Nemossos sur l'Allier : j'adhère :wink:

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Ven 31 Oct, 2014 14:02
de dromeuf
etnos a écrit:Bonjour,

Beau travail. Donc, vous prouvez mathématiquement cette intuition que, plus il y a de points quelconques, plus il y a de chances d’en trouver 3 alignés par le hasard.

Pour notre problème, il ne s’agit pas de points quelconques, mais de points remarqués a priori, rares, et de plusieurs sortes, par exemple 3 Marmand/t et 3 oppida. En simplifiant, on peut dire qu’ici, on a 3 alignements de 3 points parmi 6. Or, en appliquant votre méthode avec 6 points tirés au hasard, on trouverait sans doute 0 alignements de 3 points, puisqu’il y en a déjà 0 parmi 20. Ce qui confirmerait que ces 3 alignements ne sont pas dus au hasard. Mais en l’occurrence, il est vraisemblable que mon erreur est bien supérieure à la vôtre, et les deux calculs ne sont pas comparables.


ETNOS, en relisant mon post et le fil, je m’aperçois que je ne vous avez pas répondu. En fait, mon propos et mon exemple de tirage n'avait pas valeur de jugement sur votre calcul de probabilité. Je voulais simplement partager ma surprise de trouver aussi facilement des alignements et triangles avec une contrainte de précision assez forte et finalement avec peu de points. Sur 1 exemple, je ne peux pas tirer de loi probabiliste et ce n'est pas statistiquement significatif. Depuis ce post, je n'avais pas eu le temps de continuer ce travail mais nous le reprenons. La suite dans quelques semaines ou mois...

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Sam 01 Nov, 2014 13:48
de etnos
Désolé si ces lignes apparaissent trop longues

Vous dites: « Sur 1 exemple, je ne peux pas tirer de loi probabiliste »

Là, je ne comprends pas la formulation, bien qu’il soit vrai que j’ai appliqué les lois probabilistes à un seul exemple. C’est sans doute que la méthode que vous envisagez est différente. Je crois comprendre qu’elle consiste à rechercher par screenage systématique un nombre d’alignements suffisants pour être statistiquement supérieur à ce que voudrait le hasard.

Je vous ai déjà dit à ce sujet que votre pb essentiel va être votre méthode pour choisir un jeu de points XY sur une carte. Si vous prenez tous les sites archéologiques gaulois de la CAG, j’ai peur que vous démontriez qu’il n’y a pas plus d’alignements que ne le voudrait le hasard et que votre conclusion hâtive soit que les lignes de sites sont des foutaises. Idem si vous mettez en jeu tous les toponymes gaulois (il vous faudrait un linguiste du gaulois qui aurait le temps de faire pour vous une revue régionale systématique…). En revanche, si vous choisissez seulement tous les oppida et tous les toponymes Marmand en Auvergne, il y aura peu de points, et vous retrouverez que mon cas n’est pas du au hasard.

Donc tout est dans la qualité de l’hypothèse de travail qui conditionne le choix des points et il faut d’abord écrire cette hypothèse : pourquoi il pourrait y avoir des points alignés. Donc de quelle sorte de points il s’agirait. Puis les répertorier aussi exhaustivement que possible. Puis tester l’hypothèse de travail avec votre méthode de stat qui fait un test sur le nombre de lignes d’une fiabilité choisie a priori inférieure à 5% avec le jeu de points, comparé avec un jeu de points au hasard.

A la fin, il faudra bien expliquer ce qu’il est vrai ou faux de dire : « il est vrai/faux de dire qu’il existe des alignements intentionnels entre les N sites archéologiques de tel type recensés dans la région X ». Ou « Il est vrai que 2 oppida sont alignés intentionnellement avec 2 Marmand en Auvergne ».

Peut-être qu’une solution serait de mettre un poids aux points choisis, ce qui reviendrait de toutes façons à une typologie des points. Le site d’une capitale ne vaut pas celui où on a trouvé un tesson. Le site d’un toponyme sur Nemeton ne vaut pas celui d’un toponyme en ialo.

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Mer 11 Jan, 2017 20:00
de etnos
Le 22 Mar 2014, éponasse a écrit :

« D’un autre côté les fouilles de Corent semblent assez convaincantes pour en faire une capitale et au pied de ce plateau se trouve effectivement une station thermale (St Marguerite) et de nombreuses sources naturelles (dont les Saladis à l’eau salée et thermale) et surprise : une source des Roches, dont je ne sais pas si le nom tient du folklore ou si elle a un rapport avec la fameuse source des Roches qui se trouve à Augustonemetum la capitale Gallo-romaine. Cette dernière a livré un nombre invraisemblable d’ex-voto en bois, des noisettes etc… et une tablette en plomb en langue gauloise dédiée à Maponos (le fils de Belenos) en tant que guérisseur. A tel point que l’on peut se demander si Apollon n’était pas le deuxième dieu après Mercure chez les Arvernes. L’Apollon guérisseur décrit par César (Belenos). …Troublant les travaux de Dromeuf semblent indiquer le soleil dans l’axe de la porte au moment de Beltaine. Mercure et Apollon dans le sanctuaire. »



Source des Roches est un nom courant. C’est une coïncidence sans conséquences. Pour le reste, c’est bien vu, car je viens peut-être de trouver une confirmation.


Sous Corent, on pourrait reconnaître Belinos à la Font de Bleix ou fond de Blé, alias Fond Debleix (cadastre, sic), une source en rive gauche de l’Allier au niveau du vicus de la barrière du Lot (Les Martres de Veyre) : 12 ha (Lauransson), potiers, fanum, nécropole, port…. J’ignore si son eau est thermale, mais la fontaine ne verse pas de grain.

Comme la finale –eix peut dériver du suffixe adjectival latin –ensis, je propose aux linguistes la restitution *Fons Belensis, qui revient plus ou moins à fontaine de Bel(l)os (0), ou *Fons Belenensis, fontaine de Belenos. Il en serait de même aux sources de la Couze de Valbeleix, *Vallis Belen(en)sis. On aurait donc Beleix au lieu de Belès, comme cela se produit régulièrement dans Ministerium Cartlad-ensis > Carlad-ès. Si le nom vient de Belenos, il faudrait que le N soit perdu. Cela a pu se produire au ruisseau du Balai (au lieu de *Balain) bien placé près d’Arlempdes (43), *Arenemetum, le « sanctuaire de l’Est » qui séparait les Vellaves des Helviens.

Sidoine Apollinaire a parlé du « Belenatensis Mons de quo vici Ricomagensis positio contemplatur », qui séparait Riom de Chatelguyon, et d’où l’on restitue un lieu appelé *Belenate qui signifie « domaine de Belenos ». Delamarre en fait l’ancien nom de St Bonnet près Riom. Dans la toponymie, c’est lui qu’on doit retrouver sous la forme Bionet sur le flanc du « mont » qui regarde les sources de Chatel Guyon. Il y a peu de différence entre Bionet et Bonnet, mais les deux sont dans des directions opposées. Dans celle de Bionet, et plus près des sources de Chatel, un autre toponyme, Biona, est situé sur le mont Chalusset, au dessus et à 400 m des sources du parc thermal. Donc, à l’origine Belenos n’était pas le dieu du mont, mais plus vraisemblablement le dieu des sources thermales de Chatelguyon. Il faut observer au passage que ces sources ont en commun avec celles de Ste Marguerite d’être thermales et de produire des quantités de gaz carbonique qui amènent les lieux jusqu’à l’asphyxie.

Le nom des sources de Ste Marguerite au pied de Corent est une usurpation de la sainte (1). Comme en beaucoup d’autres endroits, il vient du gaulois Morgoritu, « gué du bord », ici un gué sur l’Allier en direction de Billom et Lyon. A ce titre, sainte Marguerite signale la frontière entre les pagi de Corent-Tallende (Telemate), et de Billom (Biliomagos) (2). J’ose proposer qu’à Sainte Marguerite, la source du Héron tire son nom du gaulois Icoranda, « frontière d’Ico » (3). Exemple 1: à Culan (Cher), la Font Léron est à 400 m de la limite départementale et à 1700 m d’EGUIRANDE,* Icoranda, sur une limite triple de pagi bituriges qui fut conservée dans la limite triple des archidiaconés de Bourbon l’Archambault, Déols et Bruères (héritiers respectifs des pagi commandés par les oppida de Cordes, Chateaumeillant et Drevant). Exemple 2: à Montbeugny (Allier), à la frontière des Arvernes et des Bituriges, le toponyme Bois l’Heron est situé à 2.5 km du chemin-frontière explicité par le toponyme Bois de Chamardon, du gaulois *Camaranda, « chemin frontière». Il s’agit de la voie antique qui allait de la ville frontière d’Yzeure, Icioduron (3), à Bibracte. Elle passait à Guérande, autre Icoranda, sur la commune voisine de Toulon sur Allier (4) (5).

Bref, Ste marguerite et le Héron indiquent que, sous Corent, l’Allier servait de frontière entre des pagi arvernes, une particularité de cette cité très centralisée (F. Trément) (2). Du même coup, la Font de Bleix était frontalière.

Dans la toponymie arverne, on trouve Belenos aux frontières de pagus ou de cité. Ce serait le cas au Valbeleix et à Beaune (St Genès Champanelle), un point frontière entre les pagi de Clermont (P Arvernensis) et de Tallende (P. Telamitensis) (2). Sur la frontière des Bituriges, il y a votre Beaune d’Allier ; Bellenaves, Bellonava, un autre « domaine de Belenos », etc ... Belenos est donc une divinité topique récurrente sur les frontières arvernes, mais je reste d’accord qu’il est aussi au centre.

1. Avant Corent, la capitale était Aulnat Gandaillat où l’on trouve le toponyme Beaulieu, pas loin du menhir replanté. La forme ancienne, Belde, se reconstitue *Belate. JP Chambon y voit le « domaine de Bellos » dans un nom de lieu muni du suffixe ate au neutre. A l’animé (sans suffixe et au masculin), on pourrait aussi bien y voir, *Belatu, du théonyme Belatos, attesté en Angleterre par le Deo Sancto Belatu Cadre, et plus près, à Lyon dans le nom des Belatumagienses, habitants de *Belatumagos, « le marché de Belatos » (X. Delamarre, d’après CIL XIII 2043). Je me demande si Belatos n’est pas aussi à Blot l’Eglise (63), ancien Blote, et à Blet (18).

2. Belenos est attesté par l’archéologie à Gergovie (C. Mitton).

3. De *Belna « les domaines de Belenos », on a déjà vu Beaune (St Genès Champanelle), aux sources de l’Auzon. Le ruisseau tire son nom d’*Alisanos, un théonyme attesté chez les Eduens. Comme par ailleurs, à la frontières des Eduens et des Bituriges, Balaine (Allier) est le nom des sources et à la fois celui du ruisseau éponyme, je pense que Belenos est à la fois à la source à Beaune et, sous le nom d’Alisanos, dans la rivière d’Auzon qui baigne plus bas les pieds de l’oppidum de Gondole à son confluent dans l’Allier.

4. Bello ou Belenos semble donc être dans la Font de Bleix sous Corent. Il s’agirait du nom gaulois originel des sources du plateau St Martial replié dans cette source cachée dans une rive abrupte, alors que celles du plateau St Martial recevaient des noms modernes : Saladis, Tambour sur le plateau St Martial :, Valois, Brissac, Chapin, César et la Chapelle à Ste Marguerite (6).

2. A Augusto Nemetum, vous avez vu Belenos par son fils Maponos aux sources des Roches de Chamalières.

Tout cela confirme que Belenos fut un dieu tutélaire des Arvernes. X. Delamarre insiste pour que Belenos incarne (-nos) la puissance (Bello). Ce n’est pas le dieu brillant des celtisants, mais un dieu gaulois de la bonne santé, oraculaire et guérisseur, qui opérait notamment aux sources thermales. Il fut interprété en Apollon qui avait les mêmes fonctions.

Des confirmations linguistiques restent nécessaires. Force est de reconnaître que la toponymie nous ballote entre trois noms propres, dont deux issus de Bello, « puissant » :
1. Bellos nom d’homme non attesté comme théonyme ;
2. le théonyme reconnu Belenos > Belinos ;
3. le théonyme moins connu Belatos, dont l’étymologie et le sens, non élucidé, pourraient être différents.

Liste éclair
Aulnat-Gandaillat : Belatos ou Bellos (toponyme)
Corent : Beltaine (orientation du sanctuaire) ; Bellos ou Belenos (hydronyme) à vérifier
Gergovie : Belenos (archéologie)
Gondole : Belenos-Alisanos (hydronyme Auzon)
Augusto Nemetum : Maponos-Apollon (inscription dans une source votive)
Sur 2 siècles on dirait que c’est le même dieu qui change à peine de nom ou prend des surnoms


Notes :
(0) Quand le nom de lieu était encore limpide, il arrive que l’adjectif latin relatif restitue le nom propre à l’étymologie du nom de lieu, sans tenir compte du nom du lieu. Exemple : on trouve Finis Taruensis, « confins de Taruos », à Tart (21), une localité qui s’appelait *Taruate, « domaine de Taruos », et qui justifierait *Finis Taruatensis, « confins du domaine de Taruos ». Comme cela se passe régulièrement dans Mons Belenatensis.

(1) Le premier saint est Martial, qui a donné son nom au plateau St Martial, la boucle de l’Allier (G. Fournier). Il s’agirait du chef du Pagus Vialoscensis « qui aetate tempore Martialis dicitur » de Sidoine (G. Fournier).

(2) Trop long à montrer ici. J’avais ébauché une justification sur cet Arbre.

(3) Le même Ic(i)o plaide pour qu’il ne s’agisse pas du nom d’homme Iccios, mais d’un non gaulois utilisé dans les théonymes Icotiae deae, Icolisama, Icaonna…, non élucidé, mais en rapport étroit avec la frontière, dont la connotation religieuse ou juridique était persuasive.

(4) Une liste exhaustive de 7 toponymes Héron et Hérondière autour de l’Auvergne en donne 6 en frontière de pagi/cité. Le Héron est donc un indicateur non absolu des frontières gauloises.

(5). Il n’y a pas d’exemple qu’Icoranda ait été un nom de divinité des sources frontières, même si c’est le cas pour Randos, Randannos et Mars Randosatis.

(6) Sur une frontière, sous Corent, dix sources en partie thermales, dont un geyser : impossible qu’elles n’aient pas eu de nom gaulois. L’une d’entre elles s’appelait peut-être Icoranda pour fixer la frontière de pagi.

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Ven 23 Fév, 2018 11:15
de dromeuf
Bonjour,

Matthieu vient de publier le rapport final d'opération 2014-2016 des fouilles de Corent (850 pages).

2 fichiers sont en téléchargement : I – Texte, II – Études spécialisées, annexes

https://www.academia.edu/35989220/Oppidum_de_Corent_-_Les_quartiers_Ouest_-_Rapport_Final_dOp%C3%A9ration_2014-2016

Bonne lecture !

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Dim 25 Fév, 2018 22:32
de Pierre
Merci David,

Voilà une bien bonne nouvelle.

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Mer 31 Oct, 2018 10:38
de dromeuf

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Mer 31 Oct, 2018 15:05
de artio

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Ven 18 Jan, 2019 9:28
de artio
Merci David de nous tenir au courant dès que le rapport de fouilles 2018 sera disponible.

Et par la même occasion celui de Gergovie!

J'en profite également pour souhaiter une bonne année 2019 riche en découvertes!

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Mar 29 Jan, 2019 19:29
de dromeuf
artio a écrit:Merci David de nous tenir au courant dès que le rapport de fouilles 2018 sera disponible.


Bonjour ARTIO ! Je viens d'ajouter les 3 derniers rapports sur notre site http://www.luern.fr/index.php?mod=menu&act=sinformer&id=5

Bonne lecture. David.

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Dim 03 Fév, 2019 11:47
de etnos
Merci Dromeuf.

On se demandait déjà pourquoi la limite communale entre Corent et Veyre-Monton passait par le sanctuaire gaulois…
Voilà qu’elle semble passer aussi par un sanctuaire chasséen !

Re: Coup de théâtre à Corent

MessagePosté: Lun 04 Fév, 2019 9:15
de artio
dromeuf a écrit:
artio a écrit:Merci David de nous tenir au courant dès que le rapport de fouilles 2018 sera disponible.


Bonjour ARTIO ! Je viens d'ajouter les 3 derniers rapports sur notre site http://www.luern.fr/index.php?mod=menu&act=sinformer&id=5

Bonne lecture. David.


Merci David pour la mise en ligne!

Chaque campagne de fouilles apporte son lot de découvertes et enrichit nos connaissances sur les rapports entre les différents sites d'occupation du bassin clermontois.
Et comme nous avons la chance d'avoir, dans un faible périmètre, plusieurs sites archéologiques importants, les analogies ou différences permettent d'affiner et de mieux comprendre l'organisation spatiale et la chronologie d'occupation de cet espace.