Page 10 sur 15

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 9:58
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

dromeuf a écrit:
eponasse a écrit:Bonjour, Dans le « De bello gallico », il y a peut-être cette petite phrase exploitable : quand César fait dire à Vercingétorix : « ..puisqu’il fallait céder à la fortune… », comme si Cesar lui-même reconnaissait que le hasard l’a bien aidé. Tout en sachant, il faut le rappeler, que Cesar ne se séparait jamais d’une statuette de la Fortune (Fortuna). À vous de voir.


Effectivement on peut se poser la question.


Le nombre d'occurrences du mot fortuna dans le DBG (j'en ai relevé près d'une quinzaine, mais ce relevé ne prétend pas à l'exhaustivité) ne me semble pas de nature à véritablement permettre d'extrapoler sur la "petite phrase" en question. En revanche, à l'instar de la statuette dont parle Eponasse, il ouvre des perspectives sur "l'outillage mental" de César.

Cordialement.

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 10:09
de bellovese
Aliénor a écrit:Arrivant à cours de vivres, les assiégés doivent faire sortir les femmes, les enfants et les vieillards. César refusant de les nourrir ou de les laisser passer, ils mourront de faim entre les deux camps.

Je n'en crois pas un mot. C'est impossible.

3) César l'a écrit pour donner une image inhumaine des gaulois et se donner celle qui n'avait pas le choix, malgré sa grande bonté.


Bonjour,

César ne me semble ni bon, ni mauvais, c’est un pragmatique, quand il doit sauver parce que cela préserve ses intérêts, il l’écrit, quand il doit faire un exemple en massacrant ou en mutilant il l’écrit aussi.
D’ailleurs dans ce cas précis, je ne vois pas bien où sa bonté s’exerce ?
Il aurait pu laisser les Mandubiens passer et s’évanouir dans la nature alors qu’au contraire il les laisse mourir devant ses retranchements, et là encore il l’écrit noir sur blanc, nulle bonté ne s'exerce ici.
Il sait très bien qu’à Rome, ses lecteurs n’auront pas beaucoup plus d’états d’âme que lui.
Quand à ses motivations, je suppose qu’il voulait montrer qu’il ne fallait attendre aucune faiblesse de sa part, et mettre les gaulois en face de leur propre culpabilité devait certainement contribuer à mettre à mal leur mental.

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 10:29
de bellovese
gérard a écrit:Cela, ça plaide pour la date de l'éclipse.
Eclipse qui a pu favoriser le départ de l'armée de secours gauloise.
Peut-être ne lui fallait-il pas parler de l'éclipse dans le BG, qui aurait été considérée ultérieurement (dans les combats futurs que César devait mener, après "publication" du BG, vu sous l'angle d'un ouvrage de propagande bien conçu à sa gloire sans trop le faire paraître) comme une IN-Fortune par ses troupes peu au courant de la mécanique céleste.


Peut-être ai-je mal compris la chronologie, toujours est-il que je vois plutôt les choses comme ça : nuit du 25/26 (éclipse), marche de Vercassivellaun, 26 après-midi, attaque du camp nord puis déroute des 60000, nuit 26/27 (pas d'éclipse), retraite de l’armée de secours, attaque de l’arrière-garde par les cavaliers germains et romains, 27 reddition de Vercingétorix.

Il ne faut pas perdre de vue que les «180000» hommes restants de l’armée de secours ne sont pas si frais que ça, César l’écrit, ils ont déjà combattu deux fois avec des pertes importantes et de surcroit la plupart des 60000 sont morts ou blessés, leur mental doit être fortement altéré.
Certes cela reste une armée importante, mais amputée de peut-être 100000 hommes blessés ou tués, ce qui est énorme, s’ils décident de retraiter c’est qu’ils considèrent qu’ils n’arriveront pas à forcer les retranchements, et le fait que César, malgré une journée de bataille soutenue, décide de les poursuivre, ce n’est évidemment pas pour exterminer cette armée, de toute façon, défaite, c’est pour envoyer un signal clair. César a vaincu, il a encore des forces et les moyens de mener la guerre, la preuve, il peut encore infliger des pertes sévères à l’arrière garde. Quand l’information a dû remonter toute la colonne gauloise en retraite, on peut imaginer l’effet produit.
Pour le reste, je suis d’accord avec l’analyse de Sedullos, bien que je sois, au contraire, persuadé qu’il n’y avait plus d’auxiliaires gaulois dans les troupes césariennes au moment d’Alésia.

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 17:04
de Sedullos
Salut,

à Bellovese,

(Helviens, Lingons, Volques, Allobroges ?


trois des peuples que j'ai cités appartiennent à la province, ils peuvent combattre en tant qu'auxiliaires, tributaires ou même pour des Helviens en tant que futurs citoyens ; certains le sont déjà. Des Helviens combattront pour César, pendant la guerre civile, puis se retourneront contre lui.
Quant aux Lingons, je les vois comme des socii, des alliés.

Il y a aussi des Gaulois cisalpins dans la légion mais ils se battent à pied et devaient être rompus.

Avant 52 av. J.-C. la cavalerie romaine est gauloise : Eduens, Arvernes, Trévires, Rèmes,..., à partir de 52, les Germains et peut-être des Celtes danubiens forment le gros du contingent

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 20:24
de dromeuf
bellovese a écrit:Peut-être ai-je mal compris la chronologie, toujours est-il que je vois plutôt les choses comme ça : nuit du 25/26 (éclipse), marche de Vercassivellaun, 26 après-midi, attaque du camp nord puis déroute des 60000, nuit 26/27 (pas d'éclipse), retraite de l’armée de secours, attaque de l’arrière-garde par les cavaliers germains et romains, 27 reddition de Vercingétorix.


L'idée des historiens était que l'attaque des cavaliers s’exécutait "au milieu de la nuit", durant une nuit claire qu'ils fixaient donc à la PL de fin septembre:
DERNIER QUARTIER 4 septembre -51 à 08h50m UT
NOUVELLE LUNE 11 septembre -51 à 04h19m UT
PREMIER QUARTIER 17 septembre -51 à 21h41m UT
PLEINE LUNE 25 septembre -51 à 23h00m UT

La pleine lune était dans la nuit du 25 au 26 septembre (et donc l'éclipse aussi). Si on poursuit leur logique, l'attaque de la cavalerie serait dans la nuit du 25 au 26, et donc le conseil le lendemain matin (le jour suivant au sens romain) le 26 septembre -52. La reddition le jour même ou le 27... ?


D'autres auteurs intéressants à lire sur le récit d'Alésia :

Annaeus FLORUS, Abrégé de l’Histoire Romaine Livre III (vers +100) :
http://books.google.fr/books?id=NinYhdWbNpsC&pg=PA237#v=onepage&q&f=false

Lucius Mestrius PLUTARQUE, Vie des hommes illustres César, la fin de la bataille d’Alésia (vers +100) :
http://books.google.fr/books?id=des9AAAAcAAJ&pg=PA227#v=onepage&q&f=false

Dion CASSIUS, Histoire romaine (vers +200), Alésia à partir de 39 :
http://books.google.fr/books?id=E48ZAAAAYAAJ&pg=PA209#v=onepage&q&f=false

Re: Alésia

MessagePosté: Sam 28 Juin, 2014 20:45
de Aliénor
bellovese a écrit:
Bonjour,

César ne me semble ni bon, ni mauvais, c’est un pragmatique, quand il doit sauver parce que cela préserve ses intérêts, il l’écrit, quand il doit faire un exemple en massacrant ou en mutilant il l’écrit aussi.
D’ailleurs dans ce cas précis, je ne vois pas bien où sa bonté s’exerce ?
Il aurait pu laisser les Mandubiens passer et s’évanouir dans la nature alors qu’au contraire il les laisse mourir devant ses retranchements, et là encore il l’écrit noir sur blanc, nulle bonté ne s'exerce ici.
Il sait très bien qu’à Rome, ses lecteurs n’auront pas beaucoup plus d’états d’âme que lui.
Quand à ses motivations, je suppose qu’il voulait montrer qu’il ne fallait attendre aucune faiblesse de sa part, et mettre les gaulois en face de leur propre culpabilité devait certainement contribuer à mettre à mal leur mental.


Bonjour Bellovese,

Oui, vous traduisez bien mon sentiment, César est un homme de guerre. Point. J'avais omis de mettre "sa grande bonté" entre guillemets. Ce que vous dites complète parfaitement les dires de Sedullos. Et j'avoue, avec un peu de honte, que j'aurais mieux admis qu'ils soient sacrifié pour être mangés que d'être laissés là à mourir de faim, souffrants inutilement.

Bien cordialement

Re: Alésia

MessagePosté: Dim 29 Juin, 2014 12:06
de bellovese
dromeuf a écrit:
bellovese a écrit:Peut-être ai-je mal compris la chronologie, toujours est-il que je vois plutôt les choses comme ça : nuit du 25/26 (éclipse), marche de Vercassivellaun, 26 après-midi, attaque du camp nord puis déroute des 60000, nuit 26/27 (pas d'éclipse), retraite de l’armée de secours, attaque de l’arrière-garde par les cavaliers germains et romains, 27 reddition de Vercingétorix.

L'idée des historiens était que l'attaque des cavaliers s’exécutait "au milieu de la nuit", durant une nuit claire qu'ils fixaient donc à la PL de fin septembre:
La pleine lune était dans la nuit du 25 au 26 septembre (et donc l'éclipse aussi). Si on poursuit leur logique, l'attaque de la cavalerie serait dans la nuit du 25 au 26, et donc le conseil le lendemain matin (le jour suivant au sens romain) le 26 septembre -52. La reddition le jour même ou le 27... ?


Bonjour,

Au temps pour moi, je croyais que nous parlions de la marche des 60000 de Vercassivellaun, alors que nous étions sur la poursuite de la cavalerie de la nuit suivante.

Ceci dit, j’avoue que tout ceci est pour moi un peu trop capillo-tracté, je laisse cette discussion aux spécialistes ou aux passionnés. Si la période est plausible, en l’absence d’indication chronologique très précise, si on considère que la luminosité ne doit pas être bien différente les quelques nuits qui précédent ou suivent la pleine lune, je ne vois pas comment on peut réellement décider que telle ou telle action s’est déroulée à telle ou telle date.

Re: Alésia

MessagePosté: Dim 29 Juin, 2014 12:18
de bellovese
Sedullos a écrit:
(Helviens, Lingons, Volques, Allobroges ?

trois des peuples que j'ai cités appartiennent à la province, ils peuvent combattre en tant qu'auxiliaires, tributaires ou même pour des Helviens en tant que futurs citoyens ; certains le sont déjà. Des Helviens combattront pour César, pendant la guerre civile, puis se retourneront contre lui.
Quant aux Lingons, je les vois comme des socii, des alliés.


Oui, je comprends la logique, ces peuples sont ceux qui ont pu accompagner César dès le début de la campagne et qui, loin de chez eux, étaient de toute façon obligés de lui rester fidèle, toute relation avec la province étant impossible.

Pour les Lingons, c’est une possibilité, puisqu’il semble que César a passé plusieurs semaines sur leur territoire avant d’atterrir à Alésia.

Ceci dit, ces auxiliaires ne sont pas cités (ce qui n’est pas dirimant je le concède) et reste du domaine de l’hypothèse. Certains spécialistes, tel Le Bohec, considèrent que César n’avait quasiment plus d’auxiliaires gaulois dans ses troupes au moment d’Alésia :

« De toute façon, au moment d'Alésia, les contingents des socii (soldats fournis par les peuples alliés) ne devaient pas être très nombreux. Les Eduens avaient fait défection, entraînant dans leur sillage les peuples qui étaient leurs clients. Beaucoup d'autres étaient entrés en dissidence et s'étaient placés sous l'autorité de Vercingétorix. Il ne restait guère du côté des romains que les Rêmes et les Lingons, ainsi que les Ubiens qui étaient des Germains ». Y. Le Bohec, Alésia, 2012, p.83.

Re: Alésia

MessagePosté: Dim 29 Juin, 2014 14:38
de Sedullos
Salut,
On peut rajouter une chose qui irait dans ton sens : la pression exercée par Luctérios avant Avaricum et par les Arvernes, Eduens et leurs alliés respectifs, après Gergovie, sur la Province a pu contraindre des socii ou tributaires, Volques, Allobroges, ... à regagner leurs terres pour les défendre. C'est une hypothèse mais César n'aurait pu qu'y consentir pour assurer ses bases arrières, Narbonne et la vallée du Rhône.

Re: Alésia

MessagePosté: Mar 01 Juil, 2014 18:30
de bellovese
Aliénor a écrit:Oui, vous traduisez bien mon sentiment, César est un homme de guerre. Point.


Bonjour Aliénor,

Si on juge les événements de la Guerre des Gaules avec notre sensibilité du XXIeme siècle, alors, les gaulois comme les romains vont passer inévitablement pour des barbares.
A titre personnel, dans l'horreur, j’estime que le massacre des habitants d’Avaricum vaut bien le sort des pauvres Mandubiens, mais je ne juge pas César, je me contente de le lire comme un « simple » témoignage, que je trouve crédible malgré l’habillage de la propagande. César et Vercingétorix ont déjà été mis à toutes les sauces par de bien plus érudits que moi, et pas toujours avec bonheur, loin de là, je préfère donc rester sobre et considérer que ce qui est raconté s’est passé. Quand bien même il faille rester prudent.

Re: Alésia

MessagePosté: Mer 02 Juil, 2014 8:25
de dromeuf
bellovese a écrit:Ceci dit, j’avoue que tout ceci est pour moi un peu trop capillo-tracté, je laisse cette discussion aux spécialistes ou aux passionnés. Si la période est plausible, en l’absence d’indication chronologique très précise, si on considère que la luminosité ne doit pas être bien différente les quelques nuits qui précédent ou suivent la pleine lune, je ne vois pas comment on peut réellement décider que telle ou telle action s’est déroulée à telle ou telle date.


Je suis d'accord. On peut très bien considérer les quelques nuits avant ou après la PL (c'était d'ailleurs ma première réflexion à la lecture de l'argument des Historiens). Il faudrait juger pour quelle luminosité une poursuite de cavalerie est envisageable.

Nous ne saurons probablement jamais. On adhère ou pas à cette hypothèse. La coïncidence est troublante et des textes antiques démontrent des superstitions par rapport aux éclipses de Lune. César n'a pas écrit "moi qui savait qu'une éclipse allait se produire, j'en ai profité pour envoyer ma cavalerie à la suite malgré la fatigue des mes combattants... et je comptais sur mes victoires précédentes, leurs superstitions et croyances pour semer le trouble entre eux (Guerriers de base, Druides, Membres du conseil, Habitants...) dès le lendemain".

J'en profite pour vous livrer César en relief, lors d'une visite au Musée d'Arles :
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:DRomeuf-6818-6819-anag-JulesC%C3%A9sarMus%C3%A9eArles-nb-h1080.png?uselang=fr

Image

Re: Alésia

MessagePosté: Mer 02 Juil, 2014 11:46
de Sedullos
Salut,
Dans un message Bellovese a évoqué le nombre important de blessés dans l'armée de secours. Même si une partie n'a pas été au contact, on peut y voir la conséquence de l'action des archers et frondeurs césariens. Matthieu Poux, Sur les traces de César, soupçonne César d'avoir minoré le nombre et le rôle de ses auxiliaires. Le nombre de pointes de flèches en fer retrouvées sur différents site de batailles impliquerait un nombre très important d'archers.

Yann le Bohec, Alésia , au contraire, dit que seuls les légionnaires participent à l'affrontement de masse à Alésia.

Re: Alésia

MessagePosté: Mer 02 Juil, 2014 11:54
de Kambonemos
Bonjour,

Matthieu Poux, Sur les traces de César, soupçonne César d'avoir minoré le nombre et le rôle de ses auxiliaires. Le nombre de pointes de flèches en fer retrouvées sur différents site de batailles impliquerait un nombre très important d'archers.


Ne pas oublier également je pense, le rôle de l'artillerie...

@+

Re: Alésia

MessagePosté: Mer 02 Juil, 2014 12:26
de Sedullos
Tout à fait. Mais Matthieu Poux (et moi-même) considérons les archers et les frondeurs comme une sorte d'artillerie légère, s'ils sont utilisés de manière groupée avec des stocks de munitions.

Les archers gaulois, eux, sont dispersés dans un rôle de soutien aux cavaliers. A ce titre, ils fonctionnent comme des tirailleurs ou des voltigeurs alors que les archers crétois et frondeurs Baléares, regroupés, effectuent l'équivalent d'un tir de salve au mousquet à silex, les mousquetaires tirant épaule contre épaule du XVIe au XIXe siècles. On ne vise pas. La guerre de Sécession apportera de nouvelles façons de combattre avec les fusils à canon rayés qui permettent la visée.

Re: Alésia

MessagePosté: Mer 02 Juil, 2014 13:06
de Alexandre
Il ne faut pas non plus oublier "l'effet Heysel", en référence au stade où, il y a 30 ans, une bagarre entre hooligans a fait des dizaines de morts et de blessés, presque tous assez loin de la bagarre. Il est très marqué dans les dispositions de troupes de type phalange : quand la première ligne recule, la cinquième ligne ne comprend pas ce qui se passe, panique et éventuellement écrase les lignes suivantes, faisant des morts parmi des soldats qui n'ont même pas vu l'ennemi.