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MessagePosté: Lun 07 Juin, 2004 8:26
de Muskull
"Archi faux", te voilà bien péromptoire Patrice. :D

Je me bornais à signaler que le concept de la "faute" ne paraissait pas actant dans la (les) religions celtiques et que dans les sacrifices il n'y avait pas la notion de "rachat" mais de "concilliation".

" La faute engendre une série de conséquences où l'on croit reconnaître, à peine voilé par le langage symbolique, tout ce que l'étude de l'art et des techniques nous a déjà suggéré : un sentiment de finitude humaine ("nudité") répondant à un éloignement du divin désormais perçu comme inaccessible, la fin en corollaire d'une certaine facilité édénique dans la quête de subsistance et le début d'un travail "à la sueur du front" qui désigne explicitement dans le texte les débuts d'abord de l'agriculture (Caïn), puis de l'élevage (Abel). Tous ces traits caractérisant expressément la Révolution néolithique, il est difficile de ne pas envisager que c'est d'elle qu'il puisse s'agir. "
Jacques Cauvin

Cette notion de faute originelle n'a l'air de rien mais elle est très importante philosophiquement. Les grecs l'avaient adopté comme le démontre le mythe de Prométhée alors que pour les populations I.E. (en grande partie), le "feu" était un don du divin permettant à l'homme de se parfaire...

Maintenant il me paraît assez clair que les auteurs anciens faisaient du comparatisme :
" Tiens, tel rite ressemble à tel autre cheu nous."
De plus, rien ne prouve qu'ils connaissaient " de l'intérieur" les religions à mystère alors qu'ils connaissaient par ouïe-dire les rites occidentaux.
De plus-plus, il est possible que certains rites aient été importés et aient trouvé des fidèles en terres "barbares".

" Le nomadisme pastoral est plus tardif que l'agriculture et contemporain d'une virilisation des figures et de sanctuaires où s'effectuaient des sacrifices sanglants, y compris humains. C'est l'inondation du golfe Arabo-persique et la fin du déluge, le retour à un temps sec. C'est aussi l'époque du culte des crânes, qui sont détachés du corps, parfois modelés et coiffés, et qui sont exposés dans ou à l'extérieur des maisons carrées (Ka'ba) et non plus rondes. Cette pratique est sans doute à rapprocher des futures momies égyptiennes et du culte des ancêtres. On suppose aussi la pratique de banquets où se réunit la communauté.
Le nomadisme, amplifié par la nouvelle sécheresse, va accélérer l'expansion du néolithique, surtout en touchant des populations qui vont pouvoir passer directement du nomadisme de cueilleur-chasseur à celui d'éleveur nomade, préservant des éléments archaïques dans la nouvelle religion. Cette diffusion se fera en même temps que celle de la langue dite indo-européenne.

La religion de ces éleveurs nomades nous est en partie accessible par ce que nous savons des religions indo-européennes, bien que beaucoup plus tardives et qui se retrouvent de l'Inde à l'Iran, aux Scythes, aux Celtes, aux Slaves et aux Germains. Ces peuples nomades devaient protéger leur bien, objet de convoitise, à moins qu'ils ne vivent de rapines comme les premiers grecs (d'après Thucydide) ou les premiers Romains, formant, donc, une classe de guerriers. La prépondérance de l'homme dans cette organisation ainsi que l'attention de ces populations aux problèmes de reproduction s'exprime dans une religion patriarcale et le culte des héros. L'unité de la vie et de la mort (Si la mort sort de la vie, la vie en revanche sort de la mort. Hegel p62) est affirmée dans les cérémonies phalliques. Les initiations guerrières, les rites du Soma ou de l'Ambroisie donnent aux guerriers l'espoir de l'immortalité. Les sacrifices évoluent de leur fonction magique à un ritualisme formaliste qui se réduit à affirmer l'unité de la communauté ("ON DIT QU'ON S'EST INSTALLÉ LORSQU'ON A CONSTRUIT UN AUTEL" Satapatha Br. VII, I,I,I-4). Le banquet restera, chez les Grecs ou les Gaulois le rite principal de la communion.

On peut déduire qu'issues de la religion du taureau (Mithra) mais s'éloignant d'une culpabilité originelle, la religion se réduit au social, reflétant les fonctions efficaces de l'organisation de la société ; religion plus utilitaire, au service du pouvoir, et qui se renforcera de l'âge du bronze à l'âge du fer. "

" Les Grecs, très divers, sont indubitablement un peuple indo-européen (surtout Sparte, Athènes restant très cosmopolite) mais leur religion n'en comporte guère plus que des traces, elle est plutôt formée des traditions Mycéniennes (Crétoises en particulier les Mystères), Phéniciennes et, à travers elles (ou par contact direct) Suméro-Egyptiennes. Outre la nostalgie de la civilisation qu'ils avaient détruite à leur arrivée, il faut tenir compte du fait que ce fut surtout un peuple de navigateurs, le découpage des côtes décuplant le voisinage de la mer aux dépens des communications avec l'intérieur des terres et privilégiant donc les croyances communes aux peuples de la mer.
L'ancienne écriture perdue (linéaire B), ce sont les Phéniciens qui vont apporter à nouveau l'écriture à la Grèce. La nouveauté va consister, grâce à l'invention des voyelles, dans sa diffusion zélée, systématique (en Grèce et dans toute la Méditerranée) qui fera sortir l'écriture de sa fonction spécialisée, réservée au scribe ou au prêtre, ouvrant à la possibilité de la démocratie.

L'effet de cette démocratisation, de cette libération de l'écriture, va être le développement de la rhétorique et la confrontation d'opinions divergentes : ceux qu'on appelle les pré-socratiques dont Parménide (La vérité comme identité éternelle) et Héraclite (Le changement, la vérité comme coïncidence, exactitude) incarnent l'opposition ontologique de l'Esprit et du Corps, de l'Universel et de la Singularité. D'où la mise en cause de la tradition et l'ironie des Sophistes à quoi répondra une dogmatisation de la religion, un passage à l'écrit (Orphisme). La philosophie prend naissance sous le patronage de l'Oracle de Delphes, temple d'A-pollon (Non-Plusieurs - à coupler avec Dyonisos le divisé - dieu des purifications qui commencent à la reconnaissance de notre étrangeté puisque son principe est "Connais-toi toi-même"), se constituant dans la confrontation des opinions divergentes (Socrate), leur mise en dialogue (Platon) qui dans la scolastique (Aristote) ne sera plus que citation de pure forme. La dialectique est ce qui affirme la vérité comme lieu du discours, de la critique. Le sacrifice de Socrate en est la fondation.

Socrate seul ne se fit pas initier, sachant bien que la science et l'art ne sortent pas des mystères et que la vérité ne réside jamais dans le secret.
Hegel

Mais à la divergence des philosophes (Théologie platonicienne/Biologie aristotélicienne) devait répondre le Scepticisme post-philosophique (niant l'un et l'autre) puis l'Éclectisme (affirmant l'un et l'autre) fondant un nouveau dogmatisme post-philosophique (Stoïciens, Hermès, Néopythagoriciens, Néoplatoniciens). La théologie païenne restera toujours fidèle à la tradition d'un Dieu doublement transcendant exprimant son unité dans une diversité de manifestations ou de dieux dont les mortels sont séparés, par le corps. Pourtant le culte de Dyonisos- "Deux fois né", le double étranger, déchiré, mi-homme/mi-dieu, le divin enfant, le ressuscité, appelait à un dépassement de cette opposition comme son homologue Orphée. Le succès du Stoïcisme qui offrait le premier dogmatisme post-philosophique (une conception du monde unitaire et scientifique) s'est heurté au fatalisme astrologique qu'il justifiait après Aristote (au nom de l'ordre cyclique du Cosmos), et qui dégénérait en superstition délirante, impressionné par la mort du sauveur Alexandre en pleine gloire à 33 ans. Les initiations ont prospéré sur l'espoir d'échapper au déterminisme astral. La liberté avait besoin de proclamer un dieu créateur, historique transfigurant l'existence humaine en histoire sainte où la liberté devient consciente d'elle-même. "

http://perso.wanadoo.fr/marxiens/philo/ ... ligion.htm

MessagePosté: Lun 07 Juin, 2004 18:48
de Patrice
De plus, rien ne prouve qu'ils connaissaient " de l'intérieur" les religions à mystère alors qu'ils connaissaient par ouïe-dire les rites occidentaux


Là encore, ça n'est pas tout à fait vrai: Posidonios d'Apamée est allé en Gaule, et l'informateur de Plutarque est très probablement breton.
Donc, ces renseignements sont à mon sens d'une grande valeur.

A+

Patrice[/code]

MessagePosté: Mar 15 Juin, 2004 18:32
de Pan
Shalom,

J'ai encore la vue basse et ça vole haut. Beau fil.
Pê un petit bémol, il y gagnerait si l'on tentait de le réduire à un thème plus stricte: dionysos en Celtie, orphisme, métempsycose, extase, religion à mystère, sacrifice, ... Bien entendu, tout cela peut aisément se rejoindre mais le problème est que chacun répond à son interlocuteur (avec des variantes) sans pour autant se soucier des dires du dernier intervenant, ce qui laisse un sentiment de décousu parfois malaisé à digérer. Mais tout cela est très enrichissant, plus je découvre vos discussions sur ce forum, plus mes Pénates s'y sentent à l'aise.

Après vous avoir dit cela, ce que je vous annonce va vous paraître inapproprié et pour le moins consternant :( .
En effet, j'aimerais continuer le fil conducteur du vin psychotrope, de l'extase et de l'initiation car c'est bien de Dionysos et de son spiritueux dont il s'agit. Ce ne sera qu'une introduction pour un développement ultèrieure si ça vous intéresse. C'est à qqchose prêt ce que j'en disais dans mon dea sur une analyse anthropologique de l'âne sur le pourtour méditerranéen.

Je commencerai donc avec les associations déjà évoquées (trop rapidement? :cry: ) sur ce fil entre le sang et le vin, mais d'un point de vue pê plus sémitisant avec tout de même une touche de grec pour ne pas vous paraître hors sujet.

Dans la tradition mésopotamienne, l'homme fut créé à partir d'un pâton d'argile mélangé au sang d'un ou plusieurs dieux (Elena Cassin). Chez les Grecs, plus spécifiquement dans l'orphisme, et chez les Sémites, l'on retrouve des connivences entre la création de l'homme à partir de l'argile rouge et du souffle qui l'anime et l'apparition de la vigne dont les fruits participent de la même teinte et dont la fermentation les remplit d'esprit "pentecôtesque". En grec, l'analogie entre sang/aima et vin/oinos est si évidente qu'elle ne nécessite aucune étiologie (aima sert d'ailleurs parfois à désigner le vin), que dire alors de l'association linguistique, phonétique et mythologique entre l'âne/onos et le vin/oinos. C'est encore plus criant dans la culture sémitique, en araméen un même mot, hamr'a, désigne à la fois l'âne et le vin.

Pausanias, assez tardivement, se fait l'écho d'une tradition déjà bien établie sur le pourtour méditerranéen mettant en scène un âne broutant une vigne et révélant ainsi l'aspect fécondant et fortifiant que la taille peut apporter à la qualité de certains végétaux. Dans la Bible, l'on pourra alors relire avec intérêt la bénédiction de Juda par Jacob en Gn 49. 8-12: "Lui ( le Pacifique que la tradition aura assimilé au Messie) qui attache son âne à la vigne et au cep le petit de son ânesse, il a foulé son vêtement dans le vin et sa tunique dans le sang des grappes". On sent bien en substance qu'on attache pas un âne comme cela à un cep de vigne et que la relation sang/vin est ici explicite.

L'on sait notamment que si Dionysos était oenophile, il n'en était pas moins onophile, son maître Silène cuvait d'ailleurs toujours sur son âne. Les rationalistes vous soutiendront que c'est parce que l'âne connaît une allure suffisamment lente pour ne pas perturber l'ivrogne qui est assis dessus :roll: . L'âne, selon Platon, Nonnos, Lucien, Valère Maxime, Diogène Laërte, Apulée, Pline,... et de nombreux cratères et rhytons découverts par l'archéologie, ne se faisait d'ailleurs pas prié pour vider la coupe de mémoire.

Dans la tradition juive, l'âme est dans le sang. Ne pourrait-on pas alors mieux appréhender la Cène à la lumière de l'orphisme :?:

Jn 15. 1-2: Je suis la vraie vigne et mon Père le vigneron. Tout sarment qui, en moi, ne prote pas de fruit, il l'émonde, afin qu'il en porte davantage encore

Taille de la vigne et circoncision, vaste sujet si l'on veut bien admettre que toute plante, dans la pensée mythique et religieuse, est un homme qui doit porter des fruits (religion à mystère).

Alors, pour reprendre le fil de l'histoire, Dionysos, les Grecs et les Romains, et plus tard le christianisme, n'apportaient-ils pas plus que du vin en Celtie? Sait-on où les Celtes, et pê plus grossièrement les IE, plaçaient leur âme?
Un conte hindou le dit avec bcp de poésie, en gros les dieux ne voulant pas que les hommes soient à leur égal décident de placer son immortalité non pas au plus haut sommet des montagnes, non pas dans d'inextricables forêts, ni dans les profondeurs abyssales des océans, nulle part où l'homme, par son avidité et sa curiosité porté essentiellement sur l'extériorité, finira de toute façon par découvrir. Ils décidèrent donc de placer l'immortalité de l'homme en son sein, là où jamais il n'ira rechercher quoique que ce soit.

MessagePosté: Mer 16 Juin, 2004 20:53
de Muskull
Bonsoir :)

Soyons prudents, rien ne nous dit que les celtes avaient un concept équivallent à celui de l'âme mais le culte des têtes semble indiquer que pour eux "l'esprit" du guerrier ou de l'ancêtre y résidait ; après tout les sens majeurs se situent dans la tête.
Dans les mythes anciens (pas particulièrement celtiques) le sang est associé au feu et l'ocre rouge était sacrée dès les néanderthaliens. On la retrouve associé aux sépultures de façon quasi universelle comme un signe de rédemption.
Le sang vivant est rouge, le sang mort devient noir (comme le feu), il y a aussi une analyse à faire en ce sens dans l'art pariétal.

Dans les rites tauroboles à Cybele, les participants étaient aspergés du sang du sacrifice, il s'agissaient de rites très archaïques par rapport au culte de Mithra alors contemporain.
Le sacrifice du taureau à la déesse mère, maîtresse des fauves, est très ancien et vient d'un temps où le taureau était encore un animal sauvage.

L'analyse de tout celà par rapport aux croyances celtiques est complexe et personnellement je manque d'information pour la développer...

Mikhail, il ne parle pas de ça le livre sur les fêtes irlandaises ?
Je viens de le commander. :wink:

MessagePosté: Mer 16 Juin, 2004 21:18
de Fergus
rien ne nous dit que les celtes avaient un concept équivallent à celui de l'âme


Voir :
Ogam, tome 19, 1967 :
Ch.-J. Guyonvarc'h :
- Les noms celtiques de l'âme et de l'esprit : 1. vieux-breton anau, gallois anaw, anant, cynan, gaulois ANAVO, irlandais anair. 2. Les noms celtiques de l'âme et du souffle.

Spirituel

MessagePosté: Mer 16 Juin, 2004 23:26
de Adcanaunos
:49:

De passage en coup de vent...
Quelques arguments archéologiques pour abonder dans le sens de la métaphore âme-vin-sang :

Dans les tombes gauloises du 2e-1er s. av. J.-C., amphores de vin et services à boisson sont presque toujours déposés à proximité de la tête ; contrairement à la vaisselle alimentaire, disposée autour de l'abdomen.
Façon de signaler que la consommation d'alcool ne relevait pas, chez les Celtes, de la sphère alimentaire, mais bien du domaine spirituel (spiritueux !).

Le tri des cols sur les sanctuaires, équivalent à celui des crânes, procède de la même idéologie : l'amphore-symbole anthropoïde, emplie de "sang" végétal qui jaillit lors du sabrage des cols.

Une amphore retrouvée dans la tombe de Primelles en Gaule centrale recelait des cendres mêlées à des squelettes d'oiseaux (éternels convoyeurs de l'âme) : matérialisation de l'alcool volatile ?

Tout comme la coutume, rapportée par les textes et confortée par quelques découvertes (Montmartin, Manching, Agen...) de boire dans des crânes réaménagés en coupe à boire (ou dans des casques, ce qui revient à peu près au même), afin de s'approprier les forces ou l'âme de l'ennemi vaincu.

Spiritualité et spiritueux sont explicitement reliés, chez Tite-Live (Ab Urbe Cond. 23), à propos des Boïens :

"Les dépouilles du corps du général ainsi que sa tête coupée étaient portés en triomphe par les Boïens jusqu'au temple qui est dans leur pays le plus sacré. Ensuite, après avoir nettoyé la tête, ils montèrent le crâne en or, comme c'est leur coutume. Et ils en usent comme d'un vase sacré avec lequel ils versent des libations lors des fêtes et le même objet est une coupe pour le prêtre et les servants du temple."

C'est tout pour ce soir,

Au plaisir de vous lire !

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 0:15
de Fergus
Merci, Adcanaunos, de ces précisions intéressantes. Il est important de comprendre que dans une société traditionnelle (et "très adonnée aux choses de la religion", comme dit Jules), rien n'est laissé au hasard, surtout dans l'agencement d'une tombe. L'emplacement de chaque objet a un sens symbolique.
L'association tête-esprit est évidente pour nous, bien qu'elle ne soit pas systématique (les Orientaux placent souvent l'esprit dans le coeur). Le coeur est aussi une coupe qui contient la vie.
A lire sur le sujet, avec des développements celtiques et arthuriens, le livre de Ananda K. Coomaraswamy, La Doctrine du Sacrifice, Dervy-Livres.

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 9:37
de Patrice
Salut,

Sur les têtes coupées, il y a tout ça:

http://www.arbre-celtique.com/approfondissements/druidisme/inventaire-txt/tetes-coupees.php

Mais effectivement, il y a aussi l'usage des calottes crâniennes en guise de coupe:

Tite Live : Histoire romaine, XXIII, trad.: Charles Nisard, 1869, Paris, Firmin-Didot.

Au milieu de toutes ces missives, on apprit une nouvelle défaite. La fortune accumulait tous les désastres cette année. L. Postumius, consul désigné, avait péri en Gaule [Cisalpine] avec toute son armée. Il y avait une vaste forêt, que les Gaulois appelaient Litana, et où il allait faire passer son armée. A droite et à gauche de la route, les Gaulois avaient coupé les arbres, de telle sorte que tout en restant debout ils puissent tomber à la plus légère impulsion. Postumius avait deux légions romaines ; et du côté de la mer supérieure il avait enrôlé tant d'alliés, qu'une armée de vingt cinq mille hommes le suivait sur le territoire ennemi.


Les Gaulois s'étaient répandus sur la lisière de la forêt, le plus loin possible de la route. Dès que l'armée romaine fut engagée dans cet étroit passage, ils poussèrent les plus éloignés de ces arbres qu'ils avaient coupés par le pied. Les premiers tombant sur les plus proches, si peu stables eux mêmes et si facile à renverser, tout fut écrasé par leur chute confuse, armes, hommes, chevaux ; il y eut à peine dix soldats qui échappèrent. La plupart avaient péri étouffés sous les troncs et sous les branches brisées des arbres ; quant aux autres, troublés par ce coup inattendu, ils furent massacrés par les Gaulois, qui cernaient en armes toute l'étendue du défilé. Sur une armée si considérable, quelques soldats seulement furent faits prisonniers, en cherchant à gagner le pont où l'ennemi, qui en étaient déjà maître, les arrêta.


Ce fut là que périt Postumius, en faisant les plus héroïques efforts pour ne pas être pris. Ses dépouilles et sa tête, séparée de son corps, furent portées en triomphe par les Boïens dans le temple le plus respecté chez cette nation ; puis la tête fut vidée, et le crâne, selon l'usage de ces peuples, orné d'un cercle d'or ciselé, leur servit de vase sacré pour offrir des libations dans les fêtes solennelles. Ce fut aussi la coupe du grand pontife et des prêtres du temple.



Silius Italicus, La guerre punique, XIII, 482, trad. collective, 1979, Paris, Les Belles Lettres.

Quant aux Celtes, ils se plaisent à vider les crânes, à les border - horreur ! - d'un cercle d'or, et ils gardent ces coupes pour leurs banquets.



Ammien Marcellin, Histoires, XXVII, 4, trad. personnelle.

Le territoire des Scordisques notamment, en faisait partie [de la Thrace], et il se rattache de nos jours à une province qui est en fait éloignée. Nos annales nous apprennent qu'elle était la brutale férocité de cette race, qui sacrifiait ses prisonniers à Mars et à Bellone, et buvait avec délice du sang dans des crânes humains.


Cette usage est attesté sur le territoire français dès le néolithique rubané, donc néolithique ancien (référence à retrouver: un article dans l'Archéologue il y a 2 ans au moins) et se retrouve dans quelques textes médiévaux français (là aussi, référence à retrouver, mais je sais à qui demander, au besoin).

Sinon, il y a tout un article dans la revue Archéologie Médiévale qui montre qu'à l'époque mérovingienne, bien souvent la tête est absente des tombes, ou bien à une place abbérante.

A+

Patrice

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 11:59
de Patrice
A propos, quelqu'un aurait un e-text ou une copie de l'article d'Ananda Coomaraswamy: "Sir Gauvain et le chevalier vert"?

Je n'arrive pas à le trouver en bibliothèque.

Merci d'avance,

Patrice

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 12:48
de Fergus
J'ai le livre où se trouve ce texte, La Doctrine du Sacrifice. Si tu me laisses un peu de temps, je peux le copier.

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 13:12
de Marc'heg an Avel
Voici ce que j'ai publié sur le cas de Noyelles sur Mer (embouchure de la Somme), dans le cadre de : Genèse de la Bretagne armoricaine :

*********

Noyelles-sur-Mer (80133) commune de la Somme, arrondissement d'Abbeville, canton de Nouvion en Ponthieu, sur la rive droite de l'embouchure de la Somme. (IGN : 2107E).

Ancien gué de passage de la route littorale passant la Somme, en aval et probablement en complément de celui de Blanquetaque, en Port-le-Grand.

Une charte municipale à été installée à Noyelles-sur-Mer le 08 mars 1194 par Guillaume III de Talvas, comte de Ponthieu.

Étymologie : Noyelle sur la Mer, 1194; Nigella ? Nivilla ? = nova villa ?

Archéologie :

A. Leduque, Ambianie, (année 1972) p 85 : "La région de Noyelles-sur-Mer est riche en tombelles. Six tombes furent repérées entre Port et Noyelles, elles contenaient des urnes cinéraires, des boites de bois pleines d'ossements calcinés, un petit sceptre surmonté d'une tête de coq. A l'est de la commune, la Tombelle de Martimont (Mont de Mars ?) est mentionnée dans la charte communale de 1194 sous le titre : ad Tumbas de Portu, et comme servant de limite à la banlieue de Noyelles. La Butte de Saint-Ouen renfermait un vase en bronze, brisé, et un grand nombre de crânes humains séparés du tronc, et disposés en sorte de cône. A Noyelles, au bas du rideau qui borde la Somme, non loin du Chemin des Valois aujourd'hui effacé par le passage du chemin de fer, et de la Tombelle de Saint-Ouen, on découvrit en 1834 les substructions d'un vaste établissement dont la superficie s'étendait sur plus de cinquante ares. On y distingua des murs de silex liés par un ciment très dur, aux assises de tuiles plates superposées, offrant des traces d'incendie, des tuyaux de terre cuite, des tuiles à rebords, des enduits de stuc, des poteries, les restes d'un pavé en porphyre et en marbre blanc, un morceau de granit vert, une auge en pierre, "une large pierre couverte d'inscriptions et de figures en relief", des morceaux de cuivre, une monnaie gauloise, au type du cheval, des médailles de Commode, de Marius le Tyran, de Claude II le Gothique, de Constantin, de Gratien, de Valentinien II, des débris d'armes, deux épingles en ivoire, deux aiguilles en bronze, une figure de femme en émail, des ossement d'animaux surtout de volatiles, et un oiseau en bronze".

R. Delmaire, Civitas Morinorum, (année 1976), p 201 : " Séparation du crâne. Ce rite apparaît en particulier dans une tombe de Louches où l'on a un squelette sans crâne. Ceci nous amène à considérer d'autres types d'inhumation sans crâne ou au contraire, d'inhumation de crâne seul. Nous avons vu que dans certaines tombes à incinération le crâne était mis à part et déposé dans la tombe au lieu d'être brûlé (Grigny où l'urne est posée sur le crâne, Nortkerque). On sait que le culte du crâne a joué un rôle important dans la civilisation celtique et F. Benoit a montré les ramifications du rite de la tête coupée et sa persistance jusque dans l'iconographie médiévale. On peut remonter peut-être encore plus haut car on trouve déjà cette pratique de la séparation du crâne en Belgique à l'époque néolithique. En Gaule du Nord on a découvert trois amoncellements de crânes ou de squelettes décapités qui remontent peut-être à la période celtique : à Moeuvres (Nord), 200 corps décapités dans un charnier que Déchelette croit pouvoir dater de La Tène II d'après quelques petits objets qui y furent trouvés; à Noyelles-sur-Mer (Somme), un monceau de crânes dans un site gaulois bien connu de l'estuaire de la Somme; en Morinie orientale, à Lumbres, lors de la construction de la gare, un amoncellement de crânes dans lesquels Debray crut voir les restes de condamnés à mort du moyen âge. Le rite se retrouve un peu plus au sud, par exemple dans les tombes de la Tène I en Champagne. On peut aussi se demander dans quelle mesure il ne faut pas rapporter à un rite de ce genre la mystérieuse accumulation de plus de 200 têtes de chevaux découvertes à Fréthun au XIXè siècle dans une construction maçonnée : l'absence d'ossements autres que le crâne indique bien un rite religieux et non pas un charnier de bêtes malades ou tuées dans une bataille."

R. Salesse (article de Presse) : "Les fouilles permettaient de mettre au jour des têtes humaines superposées en cônes et toutes séparées du tronc, sans la moindre apparence de fracture ni de lésion aux vertèbres cervicales. Sur un de ces crânes, présenté à la Société d'Émulation d'Abbeville, on crut reconnaître des caractères de la race nubienne, fait après tout plausible, d'autant que parmi les têtes fut trouvée une bague en bronze dont le chaton portait des caractères indéchiffrables".

L'article est suivi d'une photographie portant la légende : "Nubiens, Normands, Gaulois ? plus de 10000 corps, estime-t-on, reposent en ce lieu. Le mystère de leur origine n'a pas encore été dissipé."

D. Piton : (envoi personnalisé du 21.08.1997) : "La nécropole du Bas-Empire de Noyelles-sur-Mer, découverte en 1974 lors de la construction de la route d'Abbeville-Le Crotoy (D.260), a été fouillée par l'équipe de Crécy-en-Ponthieu, à la demande du SRA de Picardie... 31 sépultures ont été fouillées et étudiées, aucun armement de figurait dans les dotations funéraires. Aucune étude ostéologique ou anthropologique n'a été menée sur les ossements provenant de cette fouille;;;"

*******

Pour info.

JC Even :)

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 13:54
de Patrice
Si tu me laisses un peu de temps, je peux le copier.


Merci!!!!!!

:D

A+

Patrice

MessagePosté: Jeu 17 Juin, 2004 21:38
de mikhail
Muskull a écrit:Le sacrifice du taureau à la déesse mère, maîtresse des fauves, est très ancien et vient d'un temps où le taureau était encore un animal sauvage.

L'analyse de tout celà par rapport aux croyances celtiques est complexe et personnellement je manque d'information pour la développer...

Mikhail, il ne parle pas de ça le livre sur les fêtes irlandaises ?
Je viens de le commander. :wink:

Les troupeaux sont une richesse ; il y a les taureaux mythiques Le Beau Connu d'Aé et le Brun de Cualnge, mais ils sont plutôt un prétexte, mourant tous deux à la fin de la Razzia ; en ce qui concerne le livre de Mme Guibert, c'est une étude actuelle, "folklorique" c'est à dire populaire. Elle a appris le gaélique et a parcouru l'Irlande par périodes tous les ans pendant dix ans... d'où elle fait une thèse.

Livre riche et complexe, aux résultats étonnants. La conclusion peut être discutée, mais il y a des points intéressants :
- correspondance celtique indiscutable entre l'Irlande et le continent, avec des différences ;
- probable (?? c'est là qu'on discute) fusion d'un peuple autochtone avec les Celtes, d'où les dates des fêtes celtiques, décalées d'une demi-saison par rapport aux événements astronomiques : solstices, équinoxes...
- quelques chose sur le taureau, mais il faut que je relise.

mikhail

MessagePosté: Ven 18 Juin, 2004 0:31
de Fergus
Patrice, j'ai commencé, mais 28 pages touffues... Patience. :wink:

MessagePosté: Ven 18 Juin, 2004 8:17
de Patrice
Euh... Tu fais quoi en fait? Tu retapes tout?
Ca ne t'est pas possible de faire simplement un scan des pages?

A+

Patrice