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MessagePosté: Lun 18 Juil, 2005 15:03
de lopi
Un interdit religieux, un geis, un tabou... Mais non m'sieurs dames, ce n'est pas du tout la même chose !
Malgré Freud, malgré Kafka et bien d'autres, l'on se retrouve ainsi dans des dichotomies infinies et en odeur de fagot de la part des inquisitions scientistes. Pourtant la source, la constante, le centre perceptif du rite est la conscience humaine et ses déclinaisons... centrifuges.

Atalante fugens, O Ogmios, dieu lieur, aide nous !


Hey Muskull, il s'agit de choses si anciennes, de chose science sienne...
Les images se fixent... et créent des "ombres"...
Le fratricide se situe au niveau du miroir (et t'en connais un bout sur les jumeaux).
Mais tu as raison, seuls les mots peuvent nous sauver, nous élever. Michel Maïer (Atalanta fugens) voulait le Mercure, le dieu de la communication, comme Ogmios. Tout savoir est un discours! :roll:

MessagePosté: Mar 19 Juil, 2005 10:33
de Muskull
Ombres et reflets, réflexes et réflexions, le contenant est actif de, par (pour ?) son contenu, encore faut-il être acceuillant.
Partage et portage, parfois le bât blesse mais Jason, velu doré, est surtout nautonier vers l'oeil draconien où l'ourse gravite.
Le Fou écailleux a la vision mais aussi le verbe perdu qui est aux mots ce que le nombre est aux chiffres.
Le Zat tourne :

"La fugitive

Vous glissez dans l’ombre, ô Fugitive dont l’immatérielle présence laisse derrière elle un sillage lumineux !

Votre coeur est-il perdu pour l’amant qui vous appelle à travers d’infinies solitudes ?
Est-ce la rapidité de votre fuite qui répand ainsi sur vos épaules le désordre orageux de vos tresses ?
Vos pieds en baisant la poussière de ce monde, y laissent une empreinte de douceur ;
Si vous arrachez du fond des abîmes de la mort toute vie et tout épanouissement, et si quelque lassitude vous arrêtait soudain, l’univers cesserait d’exister.

Le rythme de ces pas invisibles m’émeut !...
Le psaume des flots écoulés vibre en moi ! Vous m’entraînez de mondes en mondes, d’apparence en apparence, et j’apprends des joies, des douleurs et des chants.

La marée est haute, le vent souffle, la barque danse comme le désir même de mon âme...

J’abandonnerai sur la rive mon trésor et voyagerai pas des nuits insondables jusqu’aux immortelles clartés.
Rabindranath Tagore (1861 – 1941)

MessagePosté: Mer 20 Juil, 2005 7:48
de Muskull
Je viens de relire l'intégralité de ce fil qui malgré quelques dérives hors de propos est d'une bonne tenue.

Dans cette continuité je vous propose une mise en perspective du "Savoir Humain".

" Vous noterez qu’aujourd’hui on admet sans réserve que les connaissances humaines officielles ont été laborieusement rassemblées, par tâtonnements successifs, au cours des millénaires.
Si les gens le pensent, c’est qu’il ne peuvent croire que l’on puisse recueillir des informations autrement que par essais successifs ; par observation et application ; par transmission orale.

Pour eux, il ne saurait y avoir d’autres méthodes pour rassembler des faits. Ils en sont tellement persuadés qu’ils n’ont pas encore remarqué que, si c’était vrai, la race humaine se serait autodétruite.
Vrai ! Quelqu’un ayant fait essayer des graines de cumin à de jeunes enfants aurait pu découvrir qu’une infusion de cumin avait sur eux un effet calmant. Cela, il pouvait le transmettre. Mais comment cet homme, et ceux à qui il aurait transmis l’information, auraient-ils pu s’abstenir d’essayer sur les enfants toutes sortes d’autres préparations, les exterminant plus vite qu’ils ne pouvaient être remplacés ?
Imaginez la situation : des groupes humains relativement peu nombreux, l’insuffisance des communications et la déperdition de l’information transmise, le grand nombre d’ "essais" possibles... Et demandez vous comment la race humaine a survécu à cette période supposée...

Puis considérez les traditions persistantes, que l’on trouve partout, relatives à l’acquisition de connaissances et d’informations à partir de sources « surnaturelles » ou autres..."

Fragment d’un colloque de médecins anglais (diplômés...) à Edinburgh 1986...

MessagePosté: Mer 20 Juil, 2005 10:27
de Leucobena
Je n'ai pas grand chose à dire, sinon que j'admire le grand savoir de tous ces intervenants... :D
Le problème m'a préoccupée ce week-end où j'ai joué une "sorcière" gauloise, bien que ce mot me semble connoté médiéval (rappelons les deux étymologies : sourcier; ou lanceur de sorts). J'ai proposé devineresse, on m'a dit non. (il faut dire que des textes de spectacle ne se changent pas un un clin d'oeil).

Puis un archéo m'a expliqué très sur de lui qu'il voyait des druides hommes, dans la "magie blanche" et des sorcières femmes, plutôt dans le côté obscur.
J'ai trouvé ceci tellement judéo-chrétien (je rappelle car je viens de débarquer que ma période de prédilection est le bas moyen-âge) que j'ai laissé tomber le débat.

MessagePosté: Mer 20 Juil, 2005 18:32
de Snorri
En tout cas, chez les Germains, les femmes officient mais uniquement pour la divination. Le reste étant 'reservé' aux hommes.

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 9:36
de Muskull
Bonjour Leucobena :)

Cette analyse simpliste (voire simplette) de "ton" archéologue risque de poser problème lors d'interprétations de découvertes.

Nous avons eu de nombreux débats sur le rôle des femmes dans le sacerdoce druidique et il n'était certes pas réduit aux oracles ni, pire, aux imprécations. :wink:
http://forum.arbre-celtique.com/viewtop ... 0171#30171

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 13:29
de Leucobena
On leur accorde généralement le droit de pratiquer la médecine, hormi la médecine sanglante (chirurgie)...

Tu ajoutes que tu restes dubitatif, j'ajouterai pour ma part une simple réflexion de bon sens, hallucinamment souvent oubliée des analystes divers, dans toutes, je dis bien toutes, les sociétés avant le dix-neuvième siècle européen et sa main-mise globale de l'homme sur la médecine, ce furent des femmes qui accouchaient leurs semblables, pour aider le père.

Artémisia vulgaris était connue de tous temps...

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 13:57
de lopi
Hello Leucobena,
Pour F.Le Roux et C.J.Guyonvac'h, les femmes n'avaient pas accès à d'autres spécialités que celle de la prophétie. Elle ne pouvaient ainsi exercer la médecine.
Un célèbre passage de Pomponius Mela nous montre toutefois que certaines femmes pratiquaient la médecine, mais il s'agit là de la seule mention faite chez les anciens à ce sujet : « Séna, dans la mer Britannique, en face du littoral des Ossismiens, est célèbre par l'oracle d'une divinité gauloise dont les prêtresses, consacrées par une virginité perpétuelle, sont, dit-on, au nombre de neuf ; on les appelle Gallizènes et on les croit douées du pouvoir singulier de soulever les mers et les vents par des formules magiques, de se métamorphoser à volonté en n'importe quel être animé, de guérir des maux qui, pour d'autres, sont incurables, de connaître et de prédire l'avenir ; mais ce sont des dons qu'elles réservent aux navigateurs, à ceux-mêmes qui se sont mis en route dans la seule intention de les consulter » (III, 6, 48 )).
(Le peuple des Ossismiens, dois-je encore le rappeler, est le plus grand et le plus ouvert des peuples de la Gaule) Sena serait pour J.de Vries, le nom d’un dieu guérisseur (p. 119) et signifierait « vieux »(Dottin, p. 286). Reinach 1897 RC, 1-8
De l’époque gallo-romaine, nous disposons d’un témoignage remarquable : le plomb du Larzac ; il s’agit d’une tablette d’exécration sur laquelle est mentionné un groupe de six femmes, dont deux d’entre elles semblent avoir joui de réputation de magiciennes, jeteuses de sort et d’ensorcelleuses, peut-être comparables aux Gallizènes citées par Mela. (Le plomb magique du Larzac et les sorcières gauloises, M.Lejeune et Coll, Ed du CNRS, Paris, 1985, pp. 58-59, d'autres publications aussi à ce sujet : Fleuriot, Lambert..)

A Rome, les femmes avaient accès à l'exercice médical, mais elles traitaient essentiellement d’autres femmes, et plus particulièrement les affections gynécologiques et l’obstétrique ; c’est, selon Caelius Aurélianus, la nécessité de ménager la pudeur des patientes « qui amena les Anciens à créer les medicae afin que les maladies des organes génitaux des femmes ne soient pas offertes aux yeux des hommes pour être examinées » (Gyn, I, 12-13) (Par contre, tous les traités de gynécologie sont écrits par des hommes : Soranos d’Ephèse, Galien, Caelius Aurélianus, Théodore Priscien). Avant l’arrivée des medicae, inspirées du modèle des sage-femmes grecques, les femmes enceintes n’avaient jamais recours aux médecins et à leur médication ; elle bénéficiaent des soins « des bonnes femmes », détentrices d’un savoir transmis par voie orale (André, p.124).
Au sein du personnel médical féminin, on distinguait deux statuts principaux :
les obstetrix, littéralement, « celle qui se tient devant » (l’accouchée pour recevoir l’enfant). Caelius Aurélianus résume les qualités requises pour être une bonne sage-femme : « La sage-femme est une femme instruite de toutes les maladies féminines, d’un grand savoir médical, capable de soigner comme il convient toutes les affections, ni agitée, ni avare, ni bavarde, mais raisonnable, sobre et discrète, non superstitieuse et sachant diriger avec sollicitude les femmes en couches. En outre, elle sera compatissante, solide, chaste, ingénieuse, calme et réfléchie » (Gyn, I, 48 sq.).
les medicae associe à la pratique de l’obstétrique celle de la gynécologie, ainsi qu’une pratique médicale plus étendue ; une des soeurs de Psyché, dont le mari est perclus de rhumatisme se lamente : « Je frictionne sans cesse ses doigts tordus et durcis comme la pierre, je brûle mes mains délicates aux compresses puantes, aux linges sordides et aux cataplasmes fétides ; ce n’est pas d’une épouse dévouées que j’ai l’air : je tiens le pénible emploi d’une medica » (Apulée, Met., V, 10, 2).
Il existait une autre appellation, les iatromea, de iatros médecin et maïa accoucheur, attestée seulement par deux inscriptions à Rome (André, p. 125)
En Gaule gallo-romaine, on recense 3 inscriptions mentionnant des femmes médecins, trois medicae :
Nimes Flavia Hedone
Lyon Metilia Donata CIL XIII, 2019, qui a fait don d’un important monument, témoin de son statut social élevé.
celle de l'église Sainte Ségolène, à Metz, conservée au musée de la ville, figure une femme debout ; son nom est illisible mais elle est qualifiée de medica.
B.Rémy Les inscriptions des médecins en Gaule Gallia, 42 ( 1984), 1
Cependant, comme le suggère Ausone, par ces vers adressés à sa tante, Aemilia Hilara : « Tu t'essayas, comme l'eut fait un homme, dans l'art de la médecine » (Parentalia, 6), l'exercice de la médecine était essentiellement masculin.
Mais vu l'importance des femmes et leur solidarité au sein de la société celtique, il est fort probable qu'elles aient au moins eu le rôle d'accoucheuses... mais on n'en sait pas plus.


A propos d'Artemisia :
Ces trois termes gaulois : Ponem, Titumen, Bricunum, désignent l'armoise, ou des variétés d'armoise.
Le nom latin ancien de l'armoise est artemisia.
Pline nous explique l'origine du terme latin. Pour certains, elle tirerait son nom de celui d'Artémise II, reine d'Hélicarnasse en Grèce, qui adopta cette plante. Cette reine fut célèbre pour avoir fait élevé à son époux, Mausolos, un tombeau qui fut une des sept merveilles du monde. Pour d'autres, elle tirerait son nom de la divinité grecque Artémis, appelée Diane par les Romains.
Les Latins et les Grecs voyaient ainsi dans l'armoise un symbole de la féminité.
Dioscoride a une vision très classique des effets de l'armoise, c'est-à-dire une plante qui selon l'expression de Pline, est "spécifique des maladies des femmes". Il distingue deux variétés d'armoise, qui ont sensiblement les mêmes effets. Le Pseudo-Dioscoride ne fait pas cette distinction, et nous donne un nom gaulois générique pour les deux variétés : ponem.
Selon Dioscoride, leurs effets thérapeutiques sont les suivants : "utilisée dans des bains dans lesquels on fait asseoir la femme, elle provoque les règles, attire le foetus et le placenta. Cette technique est également bonne pour les obstructions et les inflammations de l'utérus. Elle rompt les calculs et provoque l'urine retenue... Emplâtrée sur le ventre elle provoque les règles... On peut pour tout celà également boire la décoction du haut du feuillage de l'armoise au poids de trois drachmes".
Le Pseudo-Apulée distingue trois espèces d'armoise. Pour celle qu'il appelle artemisia monoclonos, il donne un nom gaulois : titumen. Il l'utilise pour les douleurs des intestins, pour les douleurs des pieds,
Pour Marcellus, l'armoise est une herbe "qu'on appelle en gaulois bricunum", et il l'utilise pour les lombalgies : "il faut la chercher là où elle pousse, et l'ayant trouvé le matin avant le lever du soleil, et l'arracher de la main gauche et en frotter les reins nus ; c'est là un remède remarquable et instantané".

A+
Lopi osismien qui aime les femmes

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 14:08
de Patrice
Salut Lopi,

Toi qui a une immense culture médicale antique, tu n'aurais pas sous le coude par hasard le texte de Marcellus de Bordeaux (IVe siècle)?
Si oui, ça m'intéresse beaucoup. Sinon, connaitrais-tu une référence?

A+

Patrice

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 14:28
de Pierre
lopi a écrit:Le peuple des Ossismiens, dois-je encore le rappeler, est le plus grand et le plus ouvert des peuples de la Gaule



Gaché un si beau texte avec de la propagande pas vrai :evil:

Je me demande si tu est très eloigné du sujet, ou est-ce le sujet qui est très éloigné :P :P :P



@+Pierre


Ps: Pour nos visiteurs, méfiez vous de
Lopi homme du peuple Osisme....

MessagePosté: Jeu 21 Juil, 2005 18:17
de lopi
Marcellus Empiricus, Marcelli De Medicamentis Liber in Corpus Medicorum Latinorum, tome V, retranscrit par M. Nierdermann, Berlin, Teubner, 1916

Il n'existe pas à ma connaissance de traduction intégrale.
Je ne le possède pas malheureusement...

avec de la propagande pas vrai

Noyée dans la masse, ma seule certitude...

MessagePosté: Ven 22 Juil, 2005 0:19
de Leucobena
Bravo :!:
merci pour tout cet exposé. En tous les cas si l'on en revient au sujet de départ, d'une manière générale le shamanisme ne refuse pas la femme. Bien au contraire (sibérie par exemple). Mais trois fois hélas il y aura encore moins de traces que pour les hommes...

MessagePosté: Ven 22 Juil, 2005 8:26
de Patrice
Merci Lopi!

:D

A+

Patrice

MessagePosté: Ven 22 Juil, 2005 9:41
de Muskull
Un interview de Jean Clottes :
http://presse.ffspeleo.fr/article.php3?id_article=693

Beau texte chamanique contemporain à la fin de l'article. :wink:

Nécessaire rappel :
"En 1996 J. Clottes et D. Lewis- Williams réouvrent le dossier du chamanisme. Selon eux cette pratique très répandue chez les chasseurs-cueilleurs expliquerait la plupart des particularités de l’art paléolithique. L’attrait pour les grottes profondes et pour les détails de leurs parois serait le reflet d’une cosmogonie à étages et de la croyance en un monde autre souterrain. Les chevauchements de figures, l’absence de sol comme d’horizon ou de contexte écologique, les animaux en position anormale…seraient des évocations des images hallucinatoires vécues pendant la transe. Dans l’ensemble cette thèse a été fort mal reçue. Elle a suscité un énorme silence qui n’est pas sans évoquer celui qui a accueilli la publication de Sautuola, c’est en effet un véritable attentat au préhistoriquement correct, structuraliste, du moment. Elle a suscité aussi quelques réactions de préhistoriens ou d’ethnologues d’une surprenante violence."
http://www.hominides.com/html/art/art.html

MessagePosté: Ven 22 Juil, 2005 10:22
de Muskull
Un peu de "lait de lune" Lopi ? :D

« En fait, les occupants de Cosquer cherchaient, il y a 27 000 ans, la même chose que les Chinois quatre siècles avant notre ère ou les tribus africaines au siècle dernier : le carbonate de calcium, dont les vertus thérapeutiques sont aujourd’hui incontestées ». Le mondmilch, ou lait de lune, qui recouvre les parois et les stalactiques, n’est rien d’autre que du concentré de calcium, qui, une fois réduit en poudre, devient le tout premier médicament du monde. Il est réputé solidifier les os, aider la montée du lait chez les femmes enceintes, favoriser la transpiration pendant les fièvres, ralentir les hémorragies et les diarrhées, apaiser, tonifier, soigner la toux, résorber les fractures, etc. Rien que cela !

Le lait de lune. Pour Jean Clottes, qui a pourtant parcouru presque toutes les grottes ornées du monde, c’est une révélation : « On aurait sans doute pu trouver ailleurs de telles marques. Pourquoi Cosquer ? D’abord, elle a l’avantage d’avoir des parois très molles, ce qui a permis de mieux prélever le lait de lune. Et puis, à l’époque, les gens ne faisaient pas tous la même chose au même moment. Ils pouvaient très bien avoir compris les bienfaits du calcium ici et pas ailleurs. »
http://presse.ffspeleo.fr/article.php3?id_article=1991