Jacques a écrit:Je voulais simplement savoir si les deux leçons « voce commonuit » et « voce gallica monuit » étaient admissibles. Or elles le sont toutes les deux. Reste à établir l'existence réelle et l'authenticité de la seconde, et le cas échéant son antériorité, car la lecture « voce gallica » a évidemment une importance capitale ; mais c'est une affaire de spécialiste.
Bonjour Jacques,
Je ne sais pas si j'appartiens à cette catégorie de spécialistes à qui vous confiez le soin de trancher la question, mais je me permets de rebondir sur votre approche méthodologique.
1/ en tout état de cause un retour aux manuscrits s'impose : d'abord en établir l' inventaire précis ; puis en faire l'édition. L'édition de référence demeure, je l'ai souligné, celle des
Acta sanctorum au XVII siècle et depuis la codicologie ainsi que la critique externe et interne des textes, ont fait des progrès considérables. Il ne semble pas au travers de leurs articles, que W. Meuer et R. Thurneysen aient procédé à une telle édition scientifique.
2/A propos de critique textuelle donc, le texte de cette
vita Symphoriani nous a été transmis par des manuscrits relativement tardifs et par des copies d'érudits effectuées à partir de manuscrits disparus. Il est donc largement probable que seule une critique interne d'un texte dont nous connaîtrions l'ensemble des variantes, peut nous permettre de déterminer si la leçon
voce gallica monuit constitue ou non une interpolation. Quand j'ai publié et commenté le dossier hagiographique de saint Mélar, j'ai eu la surprise de constater que plusieurs des éditions antérieures dérivaient toutes de celle d'un érudit du XIXe siècle qui avait copieusement et délibérément farci le texte édité de ses propres interpolations ! Depuis, je suis méfiant !
3/ Dans le cadre de cette approche critique, deux remarques:
- Seule la première phrase du discours de la mère de Symphorien est en "gaulois", si j'en crois les transcriptions érudites de Meyer et Thurneysen ; mais, comme je l'ai souligné, l'exhortation maternelle se prolonge par un discours en "latin".
- Dans les enquêtes de canonisation d'Yves de Kermartin et de Charles de Blois (au XIVe siècle) on trouve plusieurs fois la mention de paroles prononcées au style direct
britonice (en breton) ; mais pas un passage ne figure, même court, dans cette langue, puisque les procès verbaux sont évidemment rédigés en latin. Peut-être en va-t-il de même pour le texte qui nous intéresse : l'hagiographe souligne que la mère de Symphorien s'adresse à ce dernier en gaulois ; mais les paroles maternelles ont été transcrites en latin.
Bien cordialement,
André-Yves Bourgès