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Re: Coracle

MessagePosté: Ven 03 Avr, 2015 12:58
de gaelwen
Bonjour,

Je reviens sur l'exposé de ce cher Matrix :

Matrix a écrit:Xavier Delamarre Dictionnaire de la langue Gauloise
Coracle = Corucos
Canot/Coracle/Embarcation légère en cuir
Mot du Celtique insulaire que les Gaulois ont du connaître. Rapporté par Gildas (De Escid. Brit.-15) dans sa forme latinisée Curucus, désignant une embarcation faite d’une armature recouverte de peaux.
Étymologie
Brittonique : Gallois Corwg/Crwg/Cwrwc.
Gaélique : Vieil Irlandais Curach.
Grec Kórukos (Sac en cuir). Latin Corium (Cuir/Peau) → Ancien Français Corier (Tanneur)
Sanskrit Cárman (Cuir/Peau)

Curacos : Dictionnaire Français Gaulois Jean Paul Savignac = barque en cuir


MacBain dictionnary :
curach
a boat, coracle, Irish, Early Irish curach, Irish Latin curucis, dat.pl. (Adamnan), Welsh corwc, cwrwg, cwrwgl, *kuruko- (Stokes); Armen. kur, a boat, Old Slavonic korici, a kind of vessel. The Latin carina has been compared, but the vowels are unsuitable. Hence English coracle.

mais je n'ai rien en Breton


Curach est-il bien du vieil irlandais ?

Il me semblait qu'en Irlande, ce type de bateau s'appelait naomhóg dans les temps anciens (VIIe siècle) et les peaux tannées à l'écorce de chêne et cousues avec des lanières de cuir sur l'ossature d'osier formaient le codal ?

Bonnes Pâques à tous !

Re: Coracle

MessagePosté: Sam 04 Avr, 2015 12:15
de gérard
Bonjour à tous,

En tous cas, il figure dans le LEIA (Lexique étymologique de l'irlandais ancien), p. C-294 et 295.

Le curucus de Gildas serait du latin celtique.
et donc pas un emprunt au latin curu:ca, contrairement à ce que pensait Vendryes.

"Gallois corwg et irlandais curach renvoient à *koruko-"

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J'en profite pour signaler (bref compte-rendu de Herve Bihan lu dans Hor Yezh 281, Meurzh 2015):
de Ranko Matasović
Etymological Dictionary of Proto-Celtic, Leiden - Boston, 2009, 543p
ISBN 978 90 04 17336 1

Re: Coracle

MessagePosté: Ven 10 Avr, 2015 15:09
de gaelwen
gaelwen a écrit:Une idée comme cela (une piste peut-être) : quelqu'un connaît-il le terme correspondant en cornique ?


J'ai interrogé le Cornwall council mais leur réponse est décevante : on m'a d'abord donné comme traduction de "coracle" le mot "skathik" qui ne signifie en réalité que "petit bateau" ("skath" = boat, "ik" étant un suffixe diminutif) !
Sur une première insistance, ils m'ont confirmé n'avoir pas de mot attesté pour "coracle" et avoir créé un mot nouveau avec "skathik". Cette création s'appliquerait aussi bien à un petit bateau gonflable comme on utilise l'été en engins de plage.

Donc rien d'authentique en cornique qui corresponde à cette catégorie spécifique de petit bateau (armature légère en bois ou en osier, revêtue de peau)...

Sur une seconde relance, on m'a précisé avoir une traduction plus précise ("a more accurate translation") : "koroug" mais il s'agit sans doute d'un décalque du gallois ("this spelling comes from examining the welsh word").

Re: Coracle

MessagePosté: Jeu 28 Mai, 2015 12:14
de gaelwen
André-Yves Bourgès a écrit:Bonjour Gaelwen,

Le premier travail mentionné de G. Milin "La traversée prodigieuse dans le folklore et l'hagiographie celtique : essai de typologie", Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. 118 (1989), p. 125-140, est essentiel à lire ; mais à ma connaissance, il n'est pas accessible en ligne.

Je me demande parfois si la figure de l'intrépide marin breton aux époques anciennes n'est pas un mythe : l'implication des Bretons dans le commerce maritime est bien attestée au bas Moyen Âge ; en revanche nous n'avons guère de documents pour le plein Moyen Âge. Au IXe et Xe siècles, il me semble que ce sont surtout les Normands qui ont le monopole des mers européennes (et sans doute au delà). Et auparavant, il faut compter avec les divers "pirates" dont faisaient incontestablement partie les Scots ; mais les Bretons, qu'ils fussent insulaires ou continentaux, ont-ils joué un véritable rôle ?

Je ne suis absolument pas un expert de la question : l'ouvrage de référence me paraît être celui du regretté J.-C. Cassard, Les Bretons et la mer au Moyen Âge (voir CR de cet ouvrage par le non moins regretté B. Merdrignac en ligne ici) ; mais pour ce qui est de la littérature hagiographique que je connais un peu moins mal, il me semble souvent difficile d'y trouver tout ce que l'on prétend parfois lui faire dire.

Cordialement.


Bonjour,

Philippe Tourault (Les rois de Bretagne IVe-Xe siècle, PERRIN, 2005) semble d'un avis contraire. Il écrit au sujet des marins bretons sous le règle de Salomon (p.251 s.) :
"la mer autorise de plus larges débouchés, la connaissance d'horizons plus lointains. Les marins bretons traversent volontiers la Manche pour livrer leurs marchandises à leurs semblables du Pays de Galles ou de la Cornouailles anglaise (sic !). Ils gagnent aussi les hautes eaux de l'Atlantique, se rendent vraisemblablement jusqu'en Galice et dans les Asturies, ou alors s'arrêtent à Bordeaux, étape plus proche. Pour ces expéditions, ils utilisent des bateaux de bois assez longs, de l'ordre d'une vingtaine de mètres, et naviguent à la voile, sauf quand le vent leur fait défaut : ils doivent se résoudre alors à ramer pour continuer leur voyage malgré l'adversité. Le large, qui les attire depuis longtemps, ne les arrête pas malgré les tempêtes et autres grands dangers".

D'après lui, les marins bretons de l'époque auraient donc été assez intrépides !

Cordialement.

Re: Coracle

MessagePosté: Ven 29 Mai, 2015 16:01
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Oui, je lis ; mais je vois surtout des affirmations un peu péremptoires et pas beaucoup de références !

Cordialement.

Re: Coracle

MessagePosté: Ven 29 Mai, 2015 19:31
de gaelwen
Bonjour André-Yves et merci de ta réponse.

J'avoue que n'étant pas historien, je dois bien me contenter de me fier à ce qu'écrivent les historiens (comment faire autrement ?).

Effectivement, les affirmations que j'ai rapportées ne sont guère sourcées...

Sont-elles dépourvues de valeur pour autant ?

Cordiales salutations

Re: Coracle

MessagePosté: Sam 30 Mai, 2015 11:15
de André-Yves Bourgès
gaelwen a écrit:J'avoue que n'étant pas historien, je dois bien me contenter de me fier à ce qu'écrivent les historiens (comment faire autrement ?).


C'est une marque de confiance qui nous honorent ; mais il vaudrait mieux en l'occurrence se reporter aux spécialistes de la question. Outre le regretté J.-C. Cassard, que j'ai déjà cité, me viennent à l'esprit quelques noms associés à des travaux spécifiques : A. A. Lewis, "Commerce et navigation sur les côtes de la Gaule", Ch. Mériaux, "Manche et mer du Nord au Haut Moyen Âge", M. Comber, "Foreigh Trade in Early Historic Ireland", M. Mollat, "L'Europe et l'océan au Moyen Âge", M. Reddé, "La navigation sur les côtes atlantiques de la Gaule", P. Marquand, "Mare Britannicum" et S. Lebecq, "La Neustrie et la mer". Les Bretons continentaux apparaissent ici ou là, au détour des ces différentes études, dont la liste n'est nullement exhaustive...

Par ailleurs au point de vue méthodologique, il ne s'agit pas de renoncer à la conjecturation, essentielle à la démarche historienne ; mais en même temps, y recourant, accepter de rester fermement cantonné sur le terrain de l'hypothèse... Laisser bien sûr son intuition vous porter vers le probable ou à tout le moins le plausible ; mais ne jamais revendiquer le certain que lorsqu'il est certain.

Cordialement.